/

La sensibilisation aux dangers de la polymédication

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 742 (2016-2017) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 24/03/2017
    • de PREVOT Patrick
    • à PREVOT Maxime, Ministre des Travaux publics, de la Santé, de l'Action sociale et du Patrimoine

    Selon la presse, le wallon, en particulier le senior, consommerait trop de médicaments et de manière trop régulière. Il s’agit de la polymédication.

    Selon certains professionnels, elle serait en partie due au fait que trop peu de médecins lient la prise de médicaments avec certains symptômes.

    Monsieur le Ministre a-t-il des études et des chiffres qui analysent concrètement les dangers de la polymédication ?

    Une sensibilisation des médecins et des maisons de repos est-elle à l’ordre du jour ?
  • Réponse du 13/04/2017 | Annexe [PDF]
    • de PREVOT Maxime

    La polymédication chez les personnes âgées est liée à l’évolution de notre système de soins de santé qui a permis un allongement de l’espérance de vie, mais qui s’accompagne aussi d’une augmentation de la prévalence des maladies chroniques. Les personnes âgées cumulent dès lors les polypathologies qui génèrent des prises en charge plus complexes, et la nécessité de prendre de nombreux médicaments. Il ne faut d’ailleurs pas limiter cette problématique dans le cadre des maisons de repos, puisqu’elle se produit aussi au domicile des patients.

    Le dernier rapport du KCE sur « la performance du système de santé belge » (Vrijens F, Renard F, Camberlin C, Desomer A, Dubois C, Jonckheer P, Van den Heede K, Van de Voorde C, Walckiers D, Léonard C, Meeus P. La performance du système de santé Belge - Rapport 2015. Health Services Research (HSR). Bruxelles : Centre Fédéral d’Expertise des Soins de Santé (KCE). 2015. KCE Reports 259B. D/2015/10.273/02) fait état de deux indicateurs qui ont été sélectionnés pour surveiller ce phénomène : la polymédication (au moins 5 médicaments différents/jour) et la polymédication excessive (au moins 9 médicaments différents/jour). À noter que l’expression « polymédication excessive » utilisée dans ce contexte n’a pas de connotation négative quant à la pertinence de cette polymédication.

    Les résultats de l’enquête de santé (HIS) révèlent une tendance à la baisse depuis 2008 pour ces deux indicateurs, avec de très faibles variations régionales, comme l’illustre le tableau en annexe.

    Toutefois, ces résultats positifs sont quelque peu en contradiction avec l’augmentation globale de la consommation de médicaments et les raisons de ces divergences (HIS vs données de facturation) devraient faire l’objet de recherches plus poussées. Par ailleurs, la prévalence de la polymédication excessive est plus élevée parmi les personnes âgées de plus de 85 ans. Ce groupe mérite une attention toute particulière étant donné le risque accru d’effets secondaires associé à des fonctions rénale et hépatique potentiellement réduites.

    Tout récemment, une étude livrée par « Familia » et relayée par la presse indique que dans un cas sur cinq, l’hospitalisation d’un patient âgé de plus de 75 ans est causée par un mauvais suivi de la prise de médicaments. En outre, 42,8 % des patients en maison de repos et de soins consomment un antidépresseur.

    Je voudrais tout d’abord rappeler que l’acte de prescription ressort de la responsabilité du médecin, et relève donc de l’art de guérir, qui est de la compétence du Fédéral. C’est le rôle du médecin traitant, dans le cadre de sa relation thérapeutique individuelle avec son patient, de prescrire le traitement adéquat, et ce, en pratiquant « l’evidence based medicine ».

    Dans sa prise en charge, celui-ci doit vérifier l’efficacité des traitements prescrits, ainsi que les interactions possibles entre médicaments. En outre, le pharmacien a aussi un rôle essentiel dans l’accompagnement de la délivrance des médicaments, dans le contrôle des éventuelles interactions ou contre-indication, tout comme les infirmiers qui administrent fréquemment eux-mêmes les médicaments aux patients.

    Une bonne prise en charge des patients gériatriques nécessite donc à la fois une bonne formation (initiale et continue) des professionnels de la santé et une collaboration interdisciplinaire efficace : la coordination et la communication entre acteurs intervenant en première ligne à domicile ou en maison de repos doivent en effet être optimales.

    Ceci étant dit, concernant les maisons de repos et de soins, je rappelle que l’arrêté royal du 9 mars 2014 qui est venu modifier l’arrêté royal du 21 septembre 2004 fixant les normes pour l'agrément spécial comme maison de repos et de soins (…) contient des dispositions relatives à la prescription de médicaments et au rôle du médecin coordinateur et conseiller. Le texte arrête en effet toute une série de tâches que le médecin coordinateur et conseiller doit assumer, en concertation avec l’infirmièr(e) en chef. Parmi les tâches liées aux soins, le législateur fédéral a prévu l’organisation de « la prescription, la fourniture, la délivrance, la conservation et la distribution de médicaments en concertation avec les pharmaciens ».

    En Wallonie, un subside de 50.000 euros par an est d’ailleurs octroyé à la Société scientifique de médecine générale (SSMG) pour la formation initiale et continue des médecins coordinateurs et conseillers dans les maisons de repos. La médecine gériatrique avec les problématiques de polypathologies et de polymédication, l’usage rationnel des médicaments, ainsi que l’interdisciplinarité constituent des modules de formation dans le cadre de ce projet.

    Concernant la problématique de polymédication des personnes âgées à domicile, d’autres actions sont menées par la Wallonie. Par exemple, le projet Rampe-âge de la SSMG (66.500 euros en 2016) se centre sur une meilleure collaboration entre les acteurs de 1re ligne pour favoriser le maintien à domicile des personnes âgées.

    Le BelRAI, projet commandité par le Service public fédéral de Santé publique pour l'enregistrement uniforme et informatisé en ligne de données de clients provenant éventuellement de différents contextes de soins, comporte un chapitre relatif aux médicaments et il existe un logiciel qui, sur la base d’algorithmes, permet de juger de la qualité des prescriptions (risques d’incompatibilité entre médicaments, risques de surdosage).

    Enfin, la Note-cadre concernant la réorganisation de la 1re ligne de soins prévoit une série de mesures visant l’approche multidisciplinaire et intégrée : il s’agit par exemple du Plan conjoint (Fédéral - entités fédérées) en faveur des maladies chroniques, pour lequel les projets-pilotes ont notamment pour objectifs une meilleure coordination et communication au profit du patient et la rationalisation des traitements médicamenteux.