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La larve de la fausse teigne de la cire

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 843 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 12/05/2017
    • de DODRIMONT Philippe
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire, de la Mobilité et des Transports et du Bien-être animal

    Les déchets plastiques s’avèrent un problème environnemental mondial. Une chercheuse au centre espagnol de la recherche nationale a découvert que la larve de la fausse teigne de la cire (Galleria mellonella) était capable de dévorer le polyéthylène, matière plastique très résistante.

    Cette larve, élevée commercialement en grand nombre pour servir d’appât pour la pêche, est à l’état sauvage un parasite des ruches qui se loge dans la cire d’abeilles, partout en Europe.

    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de cette étude  ?

    Cette larve se trouve-t-elle également chez nous  ?

    Est-ce une piste qui pourrait être développée en Wallonie  ?

    Prend-il au sérieux cette découverte  ?

    Envisage-t-il de mener une expérience de ce type  ?
  • Réponse du 31/05/2017
    • de DI ANTONIO Carlo

    La larve de la fausse teigne de la cire (Galleria mellonella) est la chenille d’un papillon de la famille des Pyralidés (Lépidoptères) vivant en Europe. Elle est bien présente en Belgique.

    Elle pose problème à de nombreux apiculteurs, car elle se nourrit des rayons de cire des ruches d’abeilles domestiques. La cire exposée à la ponte de ce petit papillon est en effet détruite très rapidement par les larves si la température est favorable à leur développement. À ce titre, la Galleria mellonella est un nuisible avec lequel les apiculteurs wallons doivent vivre au quotidien.

    Elle est élevée par certains amateurs d’élevage d’oiseaux, de reptiles ou de batraciens afin de nourrir leurs animaux favoris, mais aussi à une échelle professionnelle pour la production d’appâts vendus pour la pêche récréative. Accessoirement, elle est autorisée par l’AFSCA à certaines conditions pour la consommation humaine (circulaire du 26/04/2016).

    Récemment, une étude est parue dans la très sérieuse revue scientifique Current Biology. Une équipe internationale de chercheurs a pu montrer que la larve de ce papillon est capable de consommer des sacs plastiques en polyéthylène, tels les sacs de caisse à usage unique qui sont interdits dans les commerces de détail depuis le 1er décembre 2016.

    À vrai dire, cette découverte n’en est pas réellement une pour bon nombre d’apiculteurs qui ont expérimenté à leurs dépends la capacité de la larve de la fausse-teigne à dégrader très rapidement le sac poubelle ou autre dans lequel ils avaient stocké temporairement leurs vieux cadres de ruche ou leurs déchets de cire.

    Par ailleurs, une équipe japonaise a montré en 2014 que des bactéries étaient capables de dégrader le polyéthylène, mais beaucoup plus lentement que ce qui est rapporté dans l’étude évoquée ici, où il est question d’une dégradation d’environ 3 sacs par jour et par kilo de larves. Cette rapidité relative étonne d’autant plus que le polyéthylène était réputé jusqu’il y a peu comme impossible à biodégrader car particulièrement résistant.

    Cela étant, à ce stade, il reste à comprendre le mécanisme biochimique qui permet à la larve de dégrader le polyéthylène, à isoler la ou les molécules responsables de la dégradation, à les synthétiser, à imaginer comment utiliser ou dégrader les métabolites nuisibles issus de la dégradation, à gérer les larves après qu’elles aient accompli leur travail, etc.

    En priorité, il convient sans doute d’identifier les mécanismes à l’origine de la capacité digestive remarquable de cette larve. En effet, on ignore encore à ce stade si ce processus est dû à une enzyme spécifique produite par cette larve ou s’il est rendu possible grâce à certains microbes de sa flore intestinale. S’il s’avère qu’il est d’origine enzymatique, il serait alors très intéressant de déterminer comment produire cette enzyme au moyen de biotechnologies.

    La Wallonie dispose incontestablement de certains atouts pour développer ce secteur d’activité, comme les compétences scientifiques en entomologie de ses laboratoires universitaires, mais elle ne doit pas traîner, car il ne fait aucun doute que cette découverte provoque l’intérêt de nombreux pays industrialisés.

    Une étude de faisabilité technico-économique devrait être réalisée au plus vite en tenant compte notamment du fait que l’élevage de cette larve requiert une température de 25 à 35 °C, que l’AFSCA interdit l’alimentation des insectes destinés à l’alimentation humaine avec des emballages et des déchets et que le produit de la dégradation est l’éthylène glycol, un produit toxique, explosif à l’état gazeux, mais cependant utile dans l’industrie.