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La stratégie wallonne à long terme pour la rénovation énergétique des bâtiments

  • Session : 2016-2017
  • Année : 2017
  • N° : 329 (2016-2017) 1

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  • Question écrite du 31/05/2017
    • de HENRY Philippe
    • à LACROIX Christophe, Ministre du Budget, de la Fonction publique, de la Simplification administrative et de l'Energie

    En date du 20 avril dernier, le Gouvernement wallon a acté sa stratégie wallonne à long terme pour la rénovation énergétique des bâtiments.

    Cette stratégie se donne pour objectif, à l'horizon 2050, de tendre vers le label PEB A pour les bâtiments résidentiels et vers des bâtiments neutres en énergie pour ce qui concerne le secteur tertiaire.

    Cette stratégie prévoit d'une part des mesures à mettre en œuvre à court terme (d'ici 2020) et d'autre part des dispositifs à mettre en place à moyen terme. Certaines de ces mesures s’inscrivent dans la continuité de l’action menée par le Gouvernement de Monsieur le Ministre, d’autres laissent entrevoir des ajustements plus ou moins importants par rapport à l’action menée par votre prédécesseur.

    Un document d’une telle importance et qui engage la région sur plusieurs législatures n’aurait-il pas mérité un débat au Parlement avant envoi aux autorités européennes ?

    Je souhaitais plus particulièrement interroger Monsieur le Ministre sur ces mesures à court terme, dont certaines sont annoncées à une échéance très proche.

    Peut-il dresser un calendrier précis des actions qui seront menées et finalisées sous cette législature et celles qui sont annoncées à l'horizon 2020 ?

    Quelle enveloppe budgétaire le Gouvernement consacrera-t-il à ces mesures ?

    À titre d’exemple, on sait que la réforme du système des primes s’est accompagnée d’une réduction de moitié du budget y consacré ; le Gouvernement a-t-il prévu d’assortir les moyens à ses ambitions ?

    À ce stade, que peut-il nous dire des modalités d'application de ces mesures ?

    Par ailleurs, comment et à quelle échéance les citoyens, les acteurs du secteur et les entreprises seront-ils informés des nouveaux objectifs et des nouvelles démarches à entreprendre ?

    Comment seront-ils associés ?

    À titre d’illustration, son prédécesseur avait annoncé une évaluation du régime des primes.

    Les acteurs du secteur seront-ils dès lors associés à la refonte annoncée ?
  • Réponse du 20/06/2017
    • de LACROIX Christophe

    Il convient de rappeler le contexte dans lequel elle s’inscrit et dans lequel elle a été élaborée.

    La stratégie wallonne à long terme pour la rénovation énergétique des logements a été actée par le Gouvernement wallon ce 20 avril dernier et a été publié sur le site internet www.ernergie.wallonie.be. Elle a été élaborée en réponse aux impositions de la Directive européenne 2012/27/EU relative à l’efficacité énergétique, en particulier l’article 4 qui impose aux états membres de disposer d’une stratégie de rénovation à long terme mise à jour tous les 3 ans. La stratégie wallonne fixe des objectifs de rénovation à court, moyen et long terme pour l’ensemble du parc de bâtiments en Wallonie.

    Ces objectifs sont alignés sur celui du Décret Climat dans lequel la Wallonie s’est engagée à réduire ses émissions de GES, à raison de 80 à 95 % d’ici 2050 par rapport au niveau de 1990. Des jalons intermédiaires en 2020 et 2030 sont également alignés sur les trajectoires belges et européennes en matière d’efficacité énergétique, d’émission de gaz à effets de serre et de recours aux énergies renouvelables.

    Outre cet objectif global, les objectifs spécifiques de la stratégie de rénovation énergétique du parc de bâtiments wallons sont:
    - Pour le résidentiel : tendre en 2050 vers le label PEB A (Espec ≤ 85kWh/m²an) en moyenne pour l’ensemble du parc de logements.
    - Pour le tertiaire : tendre en 2050 vers un parc de bâtiments tertiaires neutre en énergie (zéro énergie) pour le chauffage, l’eau chaude sanitaire, le refroidissement et l’éclairage.

    Pour répondre aux objectifs ambitieux que la Wallonie s’est fixés et parvenir à augmenter significativement le taux de rénovations (> 3%/an), la stratégie wallonne de rénovation énergétique à long terme du bâtiment propose un panel d’actions et de mesures, tant pour le parc résidentiel que tertiaire. Ces mesures s’articulent autour de trois axes.

    L’axe 1 vise à créer le cadre transparent propice aux investissements énergétiquement efficaces.
    L’axe 2 vise à structurer et renforcer le marché de l’offre des fournitures et des services liés à la rénovation.
    L’axe 3 vise à renforcer la demande pour des bâtiments énergétiquement performants.

    L’ensemble des mesures et actions proposées a fait l’objet d’une consultation du secteur sous forme de groupes de travail. Les parties prenantes, représentantes du secteur ont été invitées à s’exprimer sur les objectifs et à formuler des propositions d’actions, au sein de chaque groupe de travail. L’implémentation des mesures de la stratégie est également coordonnée avec les autres plans du Gouvernement et notamment le Plan Marshal 4.0, le Plan Air-Climat-Energie, le cadre légal mis en place par la législation relative à la performance énergétique des bâtiments, le Décret Climat, l’Alliance emploi-environnement recentrée, la stratégie de développement durable et le Plan de Lutte contre la Pauvreté.

    Le résultat de ce travail a conduit à la stratégie telle qu’elle a été actée par le gouvernement le 20 avril dernier. S’agissant bien d’une stratégie, l’ensemble des modalités d’application des mesures n’a à ce jour pas encore été défini. Mon administration va à présent travailler à l’opérationnalisation de ces mesures. Chacune d’entre elles devra faire l’objet d’une réflexion approfondie sur son cadre et ses modalités d’application et, si nécessaire, s’en suivre d’un passage au Gouvernement. Cette réflexion sur la mise en œuvre des mesures sera menée en collaboration avec l’ensemble des parties prenantes et acteurs du secteur déjà actifs lors de l’élaboration de la stratégie par le biais de nouveaux groupes de travail notamment sur la question des mesures liées au financement et sur les outils à développer.

    Chaque mesure est détaillée dans le rapport, en définissant et expliquant l’objectif, le contexte, les initiatives envisagées d’ici à 2020 (court terme) et les initiatives proposées à moyen terme.

    Plus spécifiquement, le passeport bâtiment, la feuille de route et le guichet unique, sont les trois outils clé à qui traduisent une volonté du secteur, exprimée de façon récurrente lors des consultations, d’inscrire tout projet de rénovation dans une réflexion globale, cohérente avec les objectifs à long terme de la Wallonie et en garantissant un encadrement des travaux de rénovation. Un panel de mesures et d’actions construites autour de ces trois outils clés est présenté en détail dans la stratégie de rénovation.

    Le passeport bâtiment permettra au citoyen de suivre l’évolution du bâtiment, lors de tout changement de propriétaire, facilitant ainsi les démarches notamment administratives liées à la rénovation et à la maintenance de son bâtiment. À cette fin, le passeport rassemblera toutes les informations liées au bâtiment, quelles qu’elles soient (techniques, administratives, salubrité, etc.). La manière dont il sera élaboré doit faire l’objet de discussions avec les administrations en concertation avec le secteur et les acteurs concernés. Il n’est actuellement pas envisagé de le rendre obligatoire. Le volet énergie sera développé prioritairement, mais il intègrera à terme d’autres volets, notamment le passeport Eau-habitation que le Gouvernement a approuvé dans son principe le 14 mai 2015 dans la note d’orientation relative à la promotion d’une politique intégrée de l’eau. Ce passeport Eau-habitation est en cours d’élaboration.

    La feuille de route rénovation permettra d’évaluer le potentiel d’un bâtiment et de chiffrer les investissements nécessaires sur base de l’atteinte de l’objectif long terme. La feuille de route mettra également en évidence les co-bénéfices, notamment en termes de santé, de confort et de qualité de vie. Les profils de compétences techniques pour la réalisation de ces feuilles de route ainsi que ses modalités d’application devront faire l’objet de réflexions approfondies avec le secteur.

    Concernant le guichet unique, il existe actuellement de nombreuses structures publiques qui accompagnent les ménages dans leurs travaux de rénovation : espaces Wallonie, guichets de l’énergie, info-conseils Logement, conseillers énergie dans les communes, conseillers logement dans les communes, experts de la SWCS et du Fonds du Logement, écopasseurs communaux, … Chaque structure a des missions propres et un champ d’expertise particulier dans le domaine du logement (salubrité, permis de location, rénovation, primes) et/ou de l’énergie (système de chauffage, priorités de travaux d’isolation, primes).

    La proposition consiste à créer un guichet centralisant tous ces services d’accompagnement aux ménages en énergie/logement. Le guichet unique permettra d’informer et d’accompagner les ménages wallons dans leurs démarches de rénovation. Il assumera plusieurs fonctions, que ce soit la sensibilisation et l’information aux demandeurs ou les appuis technique, administratif et financier. Il centralisera et tiendra à jour l’ensemble des informations pertinentes, qu’elles soient techniques, administratives ou de financement. Ce guichet unique aurait pour rôle d’aiguiller le ménage dans le type de rénovation énergétique à réaliser, de l’aider à comprendre les avantages et inconvénients de la rénovation, de s’assurer que les travaux soient en cohérence avec la trajectoire globale de rénovation, d’accompagner les ménages dans l’identification des entrepreneurs qui pourront réaliser les travaux, la manière de financer ces derniers (prêts bancaires, primes, subsides et avantages fiscaux) et le suivi des travaux. Le développement de ce guichet n’est pas prévu à court terme vu la complexité qu’il peut entrainer. Pour le développer de manière sereine et efficace, il faudra notamment s’inspirer des expériences de guichets uniques dans les autres états membres.

    Concernant le loyer chaud, la stratégie prévoit que ce mécanisme permette de limiter la somme loyer + charges de chauffage après la rénovation énergétique d’un logement. Cette somme serait équivalente ou inférieure à la situation avant travaux. Cette mesure entend encourager les propriétaires bailleurs à investir dans la rénovation énergétique et atténuer la précarité énergétique. Son fonctionnement et la manière donc il devra s’articuler feront également l’objet des discussions prochaines avec le secteur. Aussi, afin d’inciter les propriétaires bailleurs à rénover énergétiquement leurs biens mis en location, la stratégie prévoit l’application de l’article 4 de l’arrêté du Gouvernement du 26 mars 2015 relatif aux primes énergie logement précisant que lorsqu’une grille indicative des loyers sera entrée en vigueur, le bénéfice des primes s’étendra aux propriétaires d’un logement mis en location dans le respect de cette grille. Les modalités pratiques de mise en œuvre de cette mesure font actuellement l’objet de discussions et devraient être déposées prochainement au Gouvernement.

    Sur la question des mesures fiscales favorisant la rénovation, nous disposons d’instruments permettant de soutenir les financements sur fonds propres, comme les crédits à taux et conditions préférentiels, les garanties, les primes et subventions et finalement, les aspects fiscaux. Certains moments que l’on peut qualifier de « clés » dans la vie d’un ménage et dans l’existence d’un bâtiment permettent particulièrement de sensibiliser aux travaux économiseurs d’énergie : la vente, la succession, la donation, la location et le permis d’urbanisme. Les instruments développés peuvent profiter de ces moments clés pour décider à entreprendre les adaptations nécessaires.

    Concernant, les familles d’impôts « précompte immobilier » ainsi que « droits d’enregistrement et de successions », elles sont toujours assurées par le Fédéral, avec certaines contraintes en matière de faisabilité technique. La reprise de ces familles d’impôts sera l’occasion idéale pour en repenser certains rouages, par exemple des aménagements fiscaux favorables à l’efficacité énergétique. La fiscalité peut être, en effet, un levier important en termes d’incitants. Concernant certaines mesures fiscales, les discussions sont en cours et ne permettent pas encore de répondre avec précision à des questions spécifiques telles que le taux, les conditions d’octroi voire les investissements éligibles. La mesure relative à la défiscalisation du précompte immobilier prévue dans la stratégie à court terme se limite en une analyse de la manière d’adapter ce précompte au niveau de performance énergétique des bâtiments.

    Concernant la question sur la réduction de TVA, un taux de 6 % s’applique en effet déjà à certains travaux de rénovation du bâti. La mesure qui est proposée dans la stratégie est d’étendre ce taux réduit de TVA aux travaux de démolition/reconstruction quand celle-ci apparait plus rentable et plus efficace que la rénovation profonde. Cette proposition doit être analysée pour en déterminer la faisabilité et l’opportunité. Le niveau fédéral, qui dispose des leviers sur cette mesure, devant tout naturellement participer à la discussion qui n’a pas encore été entamée.

    Afin d’estimer le coût des différentes mesures liées à la rénovation énergétique, il est nécessaire d’avoir au préalable cerné les contours de chacune d’entre elles, d’en avoir déterminé le public concerné et phasé la mise en application. Nous allons à présent entamer les réflexions sur ces aspects. Le coût et le financement seront abordés au cours de ces réflexions et l'honorable membre peut compter sur mon intérêt pour les aspects financiers pour mettre en lien ces coûts, avec leur effet de levier sur l’implication des autres acteurs du financement de la performance énergétique des bâtiments. En outre la stratégie s’entend dans le cadre budgétaire déjà dédicacé par la Wallonie aux mesures concernées. Lors de l’adoption de toute nouvelle mesure et actions y afférentes, le Gouvernement conviendra des moyens affectés à sa mise en œuvre.

    Le suivi annuel de la stratégie via des indicateurs permettra d’évaluer la bonne mise en œuvre des mesures et de monitorer leurs résultats au regard de l’objectif global. La mise à jour tous les trois ans de la stratégie permettra d’analyser l’opportunité de soutenir, amplifier ou revoir les mesures, d’en proposer de nouvelles, ou encore, de les étendre à d’autres secteurs.

    Pour plus de renseignements sur le contenu de la stratégie et son calendrier précis d’actions je l'invite à consulter l’ensemble du document sur le site www.energie.wallonie.be.