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Les centres d'accueil pour femmes battues

  • Session : 2004-2005
  • Année : 2005
  • N° : 136 (2004-2005) 1

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  • Question écrite du 15/09/2005
    • de CRUCKE Jean-Luc
    • à VIENNE Christiane, Ministre de la Santé, de l'Action sociale et de l'Egalité des chances
    Selon le quotidien flamand De Morgen, les maisons de refuge en Flandre seraient obligées de refuser chaque année une femme sur trois qui vient demander des secours temporaires.

    Les raisons de ces refus sont principalement imputables aux problèmes financiers chroniques auxquels les maisons de refuge pour femmes doivent faire face.

    Corollaire préjudiciable de cette “saturation”: la plupart des maisons ne peuvent pas se permettre de changer d’adresses - environ tous les dix ans - dans un souci légitime de protection de la victime.

    Face à cette problématique en Flandre, je me demandais, Madame la Ministre, si la situation en Wallonie était comparable. Sommes-nous également confrontés à un phénomène de saturation?

    Si ce problème existe également en Wallonie, quelles sont les mesures envisagées pour y remédier? Vous placez-vous dans une optique de création d’un plus grand nombre de centres d’accueil ou bien sur le terrain de la prévention? Dans ce dernier cas, des contacts et démarches visant à créer des synergies ont-elles été entreprises auprès de Mme Arena, Ministre de l’égalité des chances en Communauté française?
  • Réponse du 21/11/2005
    • de VIENNE Christiane

    La question que me pose l'honorable Membre aujourd'hui me permet de faire le point sur une situation qui me tient particulièrement à cœur. La problématique des femmes battues touche en effet des matières bien spécifiques qui me concernent, mais pour lesquelles des solutions doivent aussi être envisagées de manière transversale.

    En effet, « l'accueil des femmes battues » concerne tout autant mes compétences en matière d'hébergement et d'accompagnement social des personnes en difficultés sociales, que celles en matière d'égalité des chances.

    Comme l'honorable Membre le sait, le secteur de l'accueil des personnes en difficultés sociales est en pleine restructuration actuellement. En effet, le décret du 12 février 2004 relatif à l'accueil, l'hébergement et l'accompagnement des personnes en difficultés sociales rassemble désormais le secteur des centres d'accueil et le secteur des maisons maternelles.

    Ce nouveau décret poursuit un triple objectif :

    - rassembler, dans un même cadre juridique, les deux secteurs d'accueil et classifier les centres en fonction de leurs missions spécifiques : maisons d'accueil, maisons de vie communautaire, maisons d'hébergement de type familial et abris de nuit ;
    - réglementer le secteur : désormais, toute association désireuse d'accueillir des personnes en difficultés sociales doit être agréée par la Région wallonne ; seules les maisons d'accueil et les maisons de vie communautaire peuvent prétendre à une subvention ;
    - structurer et professionnaliser le secteur.

    La mise en application de ce nouveau décret a débuté en octobre 2004. Dès 2005, des moyens financiers supplémentaires ont été octroyés pour stabiliser le personnel d'encadrement de base. Il faut savoir que l'application globale de ce décret est estimée à un apport financier supplémentaire de +/- 3.000.000 euros. Malgré l'importance que je désire consacrer au secteur, je suis dans l'obligation d'examiner progressivement les marges budgétaires dont je dispose pour l'avenir.

    Outre l'aspect financier, il faut analyser les pratiques de terrain et rationaliser les ressources existantes. La capacité d'accueil en Région wallonne compte, désormais, pour la totalité du territoire :

    - cinquante-quatre maisons d'accueil ( maisons issues des anciens centres d'accueil et maisons maternelles) ;
    - huit maisons de vie communautaire ;
    - deux maisons d'hébergement de type familial ;
    - six abris de nuit ;

    Ces infrastructures correspondent à une capacité estimée de 1.779 places agréées, pour 1.426 places subventionnées. Notre capacité d'hébergement, en Région wallonne est donc estimée à un minimum de 390.368 nuitées par an (calcul effectué sur la base des 75 % minimum requis de nuitées par an pour souscrire à une subvention).

    Malgré ce chiffre conséquent, il faut reconnaître que l'hébergement prévu ne répond pas encore suffisamment à la demande. Une étude statistique effectuée en 2003 révélait déjà une relative saturation du secteur étant donné que 66 % des maisons interrogées refusaient des demandes pour manque de disponibilités.

    Etant donné la restructuration complète actuelle, je ne peux, aujourd'hui, me prononcer sur des chiffres précis. Une programmation est établie dans le cadre de l'arrêté d'exécution du nouveau décret précité. Celle-ci doit pouvoir être affinée en fonction du nouveau cadastre constitué. J'envisage de réaliser une nouvelle étude statistique dès 2006 afin de clarifier la situation et de pouvoir établir des perspectives adéquates aux besoins de terrain.

    Toutefois, je considère qu'il faut être nuancé face à cette relative saturation constatée. En effet, l'accueil et l'hébergement ne sont pas les seules solutions aux détresses rencontrées par les personnes concernées. L'écoute d'urgence, l'orientation adéquate vers des services spécialisés permettent souvent de débloquer des situations d'urgence et d'éviter un hébergement inutile.

    Cette problématique concerne tous les acteurs sociaux. Les réponses doivent être envisagées de manière coordonnée sur l'ensemble du territoire wallon. D'ici la fin de la législature, j'envisage de mettre en place un système d'encodage des demandes et des besoins de terrain via les relais sociaux. Cette base de données informatiques, alimentée au quotidien par les services sociaux et les services d'hébergement, permettra de visualiser le potentiel régional et donnera la possibilité de fournir une réponse rapide et adéquate à toute demande urgente.

    En outre, certains phénomènes sociaux semblent prendre actuellement plus d'ampleur. Ceci ne traduit pas nécessairement une recrudescence, mais souligne à tout le moins une prise de conscience plus importante.

    Ainsi, la question des violences conjugales est actuellement au centre des débats et, en tant que Ministre de l'Egalité des chances, je me dois d'encourager la réflexion et l'action politique en la matière.

    Dans cette perspective, j'ai constitué, dès le début de la législature, un groupe d'experts chargé de mener une réflexion sur la question afin de proposer des mesures concrètes à mettre en place.
    Ce groupe est composé de représentants de l'Institut pour l'égalité des femmes et des hommes de Praxis, du CEFA, des centres « femmes et société », du Centre contre les violences familiales et l'exclusion de Liège, de Solidarité femmes, du refuge pour femmes battues de La Louvière, d'Amnesty International, de Vie féminine et des Femmes Prévoyantes socialistes.

    Ce groupe a déjà formulé diverses propositions concrètes comme, par exemple :

    - améliorer l'accueil des femmes violentées et de leurs enfants ; veiller à la formation continuée des travailleurs psychosociaux du secteur ;
    - poursuivre les actions de sensibilisation ;
    - promouvoir l'éducation sur le respect mutuel entre les sexes qui doit intégrer une réflexion sur l'égalité entre hommes et femmes et la prévention des violences sexistes dès l'école primaire ;
    - promouvoir un travail de prévention et d'accompagnement en relais avec les centres de santé mentale et les centres de planning familial.

    Certaines de ces propositions seront intégrées dans le Plan national de lutte contre les violences à l'égard des femmes, plan piloté par mon collègue libérale Christian Dupont et présenté le 25 novembre 2005 à l'occasion de la journée mondiale de lutte contre la violence.

    Le travail à mener est conséquent. Les solutions à donner doivent être envisagées dans une dynamique transversale en fonction des compétences de chacun afin de mener une politique cohérente, concrète et constructive de lutte contre ces inégalités.