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La déconstruction de la vision négative de la précarité face à l’effet dévastateur du discours sur l’assistanat

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 23 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 30/10/2017
    • de ZRIHEN Olga
    • à BORSUS Willy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    A l’occasion de la journée mondiale de lutte contre la pauvreté, nous avons pu lire une carte blanche parue dans Le Soir qui évoquait l’urgence de déconstruire une vision négative de la précarité. Cette vision était illustrée par la prostitution étudiante mise en avant dans le cadre du débat suscité par le sugar-dating.

    Cet exemple soulignait l’effet dévastateur du discours sur l’assistanat. En effet, pour plusieurs étudiants interrogés, se prostituer constituait un acte plus « digne » que « d’aller mendier de l’argent au CPAS ». Ainsi, vendre quelque chose, même son corps, semble être devenu, dans la représentation collective, un acte plus estimable que de recourir à l’aide sociale.

    Cette vision provenait, entre autres, selon l’auteur de la carte blanche, d’une évolution insidieuse du rôle de l’État, qui doit désormais se limiter à protéger l’espace de liberté des individus et qui dénonce toute autre intervention comme illégitime.

    Suivant cette doctrine, l’État qui intervient au nom de la justice sociale contrevient donc au droit naturel, nourrit une « culture de la déresponsabilisation » en mettant toujours plus l’accent sur la responsabilité individuelle, en faisant croître dans la société la conviction que « les pauvres doivent d’abord se prendre en charge eux-mêmes ».

    Comment Monsieur le Ministre-Président se positionne-t-il en la matière ? Partage-t-il les propos évoquant la nécessité de déconstruire une vision négative de la précarité ?

    Comment conçoit-il le rôle de la Région wallonne en particulier et des pouvoirs publics en général en matière de lutte contre la pauvreté ?
  • Réponse du 21/11/2017
    • de BORSUS Willy

    J’ai en effet eu l’occasion de lire cette carte blanche dans le quotidien « Le Soir » du 17 octobre. « Pauvreté n’est pas vice » bien entendu. Si la Région wallonne a pu d’une façon ou d’une autre ces dernières années donner l’impression d’une telle vision de la pauvreté, je m’attacherai à la déconstruire, et en premier par des politiques porteuses d’actions concrètes.

    J’ai aussi eu il y a quelques semaines l’occasion de rencontrer des représentants du Réseau wallon de lutte contre la pauvreté. Issus de l’encadrement de ce réseau, mais aussi des militants directement touchés par la précarité, des « témoins du vécu », qui nous ont apporté des témoignages bouleversants sur le quotidien des privations qu’ils subissent, et des parcours difficiles pour faire valoir leurs droits et leur place dans la société. Ces témoignages, ainsi que d’autres à l’occasion de la Journée mondiale de Lutte contre la pauvreté ce 17 octobre, entendus au Parlement, dans les rues de Namur ou dans les médias, indiquent aussi qu’au-delà bien sûr des privations matérielles, il y a une reconnaissance des problématiques et des personnes qui est attendue. Retrouver considération et autonomie apparaît central.

    Retrouver un emploi, même si cela ne permet pas de résoudre toutes les situations de précarité, reste un des moyens les plus efficaces de retrouver une autonomie et de s’affranchir des carcans générés par les privations matérielles ou d’un encadrement administratif qui peut parfois être vécu comme contraignant. En exécution de la Déclaration de politique régionale, c’est une priorité transversale à l’action du Gouvernement. Cette importance de l’Emploi, notamment évoquée dans la Carte blanche, devrait à terme être partie intégrante du Plan wallon de Lutte contre la Pauvreté, alors qu’elle en est singulièrement absente aujourd’hui.

    L’autre action majeure permettant de lutter contre la précarité est la politique du logement. Celle-ci est en effet déjà fort développée dans le cadre du Plan wallon de lutte contre la pauvreté, et les politiques de Housing First notamment seront poursuivies et développées. La plupart des autres actions issues du Plan de lutte contre la pauvreté devraient par ailleurs être confirmées moyennant évaluation.

    Le projet de 3e rapport semestriel du Plan wallon de lutte contre la pauvreté m’est par ailleurs parvenu. Nous ne manquerons pas de revenir vers l'honorable membre avec le suivi.

    Enfin, afin de diminuer l’importance de la responsabilisation individuelle pour l’octroi de droits aux personnes en situation de précarité, un accès automatique aux droits existants sera en particulier envisagé. Un travail de recensement de ces droits potentiellement activables automatiquement sera demandé aux administrations compétentes. Les actions utiles seront à envisager pour concrétiser cette automaticité.