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Natura 2000.

  • Session : 2005-2006
  • Année : 2005
  • N° : 19 (2005-2006) 1

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  • Question écrite du 12/10/2005
    • de STOFFELS Edmund
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Le réseau Natura 2000, quel programme ! Des sites retenus, aux arrêtés de désignations que nous attendons désespérément, en passant par la désignation des commissions de concertation. Tout dans la mise en place de ce réseau aura été propice aux interventions parlementaires et aux inquiétudes des acteurs concernés. A mon tour, je voudrais aborder le sujet.

    Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais rappeler la philosophie générale du projet. Natura 2000, c'est un réseau européen qui vise au maintien de la biodiversité, et ce, dans toute l'Union européenne.

    Depuis 2004, le réseau Natura 2000 wallon couvre environ 220.828 hectares, soit 13% du territoire régional. C'est impressionnant. Une multitude d'acteurs sont concernés par l'édification de ce réseau, que ce soit des propriétaires privés, des agriculteurs ou des autorités publiques, tous sont concernés par le fonctionnement de Natura 2000.

    D'une manière générale, la mise en place de ce réseau représente des enjeux environnementaux, agricoles, économiques et sociaux importants. C'est pourquoi, il est temps de proposer aux acteurs concernés une clarification de la législation car le flou actuel est propice à de nombreuses interrogations.

    Les enjeux environnementaux inhérents à Natura 2000 sont évidents. Il s'agit de concilier respect et protection de la biodiversité avec les activités humaines. Il ne faut pas voir les sites retenus comme des sanctuaires inviolables où seule une vision naturaliste aurait la préséance.
    Néanmoins, il faut accepter que, sur ces sites, l'activité humaine soit régulée et permette une plus grande préservation de la biodiversité.
    Depuis la conférence de Rio, en 1992, la lutte pour la préservation de la biodiversité est devenue une préoccupation internationale. C'est dans cette optique que Natura 2000 a été créée. Chez nous, l'érosion de la biodiversité se poursuit et près d'un quart des espèces vivant sur notre territoire sont menacées. C'est pourquoi, il est urgent d'agir !

    D'autre part, il est évident que, pour les agriculteurs wallons, Natura 2000 va impliquer des changements. Les agriculteurs, en proie à de nombreuses difficultés, risquent de voir une fois de plus leur travail rendu plus difficile par la réalisation du réseau. Il est certain qu'ils ne seront pas tous touchés de la même manière.




    C'est pourquoi, il serait intéressant d'étudier la possibilité de créer une cellule spécifique d'accompagnement des agriculteurs afin, de les aider à passer par delà cet écueil. On pourrait imaginer que cette cellule intervienne lorsqu'un certain pourcentage d'une exploitation agricole est repris en zone Natura 2000.

    En outre, les enjeux économiques sont non négligeables. En effet, de part la nature même des sites retenus, il va sans doute falloir y modifier l'activité humaine. Dés lors, qu'ils soient agriculteurs, chasseurs, pêcheurs ou encore exploitants forestiers, ces acteurs risquent de subir des pertes économiques plus ou moins importantes. C'est pourquoi, une évaluation de ces pertes doit être réalisée afin de les compenser au mieux.

    Certes, la mise en place de ce réseau présente de nombreuses difficultés, mais après plusieurs années, il est temps de nous présenter un échéancier précis et des mesures concrètes. Quand, Monsieur le Ministre présentera-t-il le premier arrêté de désignation ?

    Pour rappel, ceux-ci sont indispensables car ils apporteront des précisions quant au contour des sites, les espèces et les habitats visés qui sont présents sur les sites, ainsi que leur état de conservation et les objectifs du régime de gestion à mettre en place.

    En l'état actuel, Monsieur le Ministre peut-il nous dire ce qu'il y aura dans les modalités de gestion ?
    On ne sait rien des modalités de financement prévues. Quelles pistes envisage-t-il ?

    Comme je l'ai déjà dit précédemment, le flou actuel entretient de nombreuses supputations. Sera-t-il possible à Monsieur le Ministre de commenter les informations suivantes:

    - qu'en est-il de la fameuse bande de 100 mètres à l'intérieur de laquelle la DGATLP à fait évaluer les projets d'aménagement des sites retenus ? Une bande de l00 mètres autour de chaque site, ça représente plusieurs milliers d'hectares. Monsieur le Ministre considère-t-il ces hectares comme faisant partie de Natura 2000 ? Quelle est la pertinence d'une telle mesure ;

    - en son temps, on avait évoqué la possibilité de supprimer le précompte immobilier sur les territoires
    retenus. Or, en Région wallonne, la plupart des agriculteurs louent les terrains qu'ils exploitent. Cette
    exonération de précompte bénéficiera au propriétaire et non à l'exploitant, ... Monsieur le Ministre
    envisage-t-il de financer Natura 2000 avec l'argent issu du deuxième pilier de la PAC ?
    ..

    En outre, il y a encore de nombreuses carences dans l'information. Comment Monsieur le Ministre explique-t-il que des propriétaires de terrains recensés dans Natura 2000 n'en aient jamais été avertis ?

    Il est temps de mettre en place une stratégie pédagogique qui permette l'information de tous les acteurs concernés.

    Après de nombreux atermoiements, il faut maintenant passer aux actes, informer chaque propriétaire ou locataire d'une parcelle Natura 2000 et conclure avec eux une convention qui retiendra non seulement les informations à propos des conditions d'exploitation qu'il devra respecter en fonction des données qui ont conduit à reconnaître ladite parcelle comme un site Natura 2000, mais qui identifiera aussi les dédommagements octroyés par la Région wallonne.

    Avant d'en finir, que Monsieur le Ministre me permette une dernière remarque. Elle concerne la Direction de Malmédy. Pour cette direction, Monsieur le Ministre dispose d'un agent bilingue, remplacé actuellement, selon mes informations, par un agent ne maîtrisant pas l'allemand. Autant qu'il importe que le Président de la Commission soit bilingue, autant il importe que l'interlocuteur administratif des agriculteurs germanophones maîtrise parfaitement leur langue, notamment si

    l'opération Natura 2000 veut être une réussite tant sur le plan général que sur le plan des conventions individuelles à préparer.

    Comment et dans quels délais Monsieur le Ministre pense-t-il remédier à ce problème ?

    Je conclurai mon intervention par ces quelques réflexions. Il est de notre devoir dans la gestion de tous les espaces naturels, et pas seulement les sites Natura 2000, de concilier l'activité humaine avec la protection de l'environnement. Natura 2000 a un objectif louable qu'il faut, tous ensembles, acteurs et autorités, réaliser. Néanmoins, il ne faut pas tomber dans la démesure et transformer nos campagnes en désert naturel où l'homme n'aurait plus voix au chapitre.
  • Réponse du 19/10/2005
    • de LUTGEN Benoît

    Tout d'abord et avant de répondre aux différentes questions de l'honorable Membre, je tiens à lui préciser qu'une cellule spécifique d'accompagnement des agriculteurs n'a pas été créée. Par contre, depuis 2004, la Région a subventionné la Fédération wallonne de l'agriculture, à raison de 108.000 euros, afin de remplir une mission d'information et de sensibilisation auprès des agriculteurs. La même démarche a été effectuée pour la Société royale forestière de Belgique (SRFB) afin de sensibiliser les propriétaires et gestionnaires forestiers.

    Je répondrai dans l'ordre à ses questions.

    1) Les premiers arrêtés de désignation de sites Natura 2000 devraient être finalisés fin 2005 - début 2006. Il est évident que ce dossier nécessite une attention toute particulière, tant les enjeux sur le terrain sont importants. J'ai la ferme intention de présenter un travail systématique, qui ne puisse faire l'objet d'aucune critique, ni sur le plan légal ni sur le plan technique.

    Un inventaire de mesures possibles a été identifié pour la protection des différentes espèces et habitats concernés par Natura 2000. Ces mesures font l'objet actuellement d'une concertation entre la Fédération wallonne de l'agriculture, La Société royale forestière de Belgique, et Inter-Environnement Wallonie. Il importe d'identifier, parmi la liste des « possibles », les mesures utiles et nécessaires.

    D'autre part, on s'est interrogé sur la forme juridique que devrait prendre un arrêté, en fonction des différentes mesures identifiées par les scientifiques. Un bureau d'études juridiques, spécialisé dans cette matière, a été chargé d'étudier les modalités légales que devront respecter ces arrêtés.

    Comme je l'ai déjà dit, je désire que les premiers arrêtés qui seront adoptés soient une référence pour tous les suivants et non des arrêtés martyrs. C'est pourquoi je ne céderai pas à la précipitation et je ne présenterai ces premiers arrêtés que lorsque j'aurai la conviction qu'ils ne souffrent d'aucunes critiques tant sur le plan technique que légal.

    Je suis convaincu que cet exercice ne peut être bâclé. L'enjeu est trop important pour le monde rural, surtout pour les agriculteurs et les forestiers.

    2) En ce qui concerne les modalités de gestion, je pense qu'il est prématuré d'en parler. Les scientifiques ont identifié toute une liste de mesures.

    Ces mesures, comme je viens de le signaler, sont en cours de négociation avec les partenaires privilégiés que sont la Fédération wallonne de l'agriculture, la Société royale forestière de Belgique et Inter-Environnement Wallonie. Les différentes options sont analysées et rien n'est encore décidé.

    3) Pour ce qui est des modalités de financement de certains travaux, je ne dois pas rappeler à l'honorable Membre que des mesures agro-environnementales sont majorées lorsque les parcelles sont situées en zone Natura 2000.

    J'étudie aussi un projet de subventionnement des travaux extraordinaires en sites Natura 2000. Je dois encore analyser l'impact budgétaire que cela représenterait et étudier les possibilités de commencer à l'inscrire dès le budget 2006, en concertation avec mes collègues du Gouvernement.

    4) La "fameuse bande de 100 mètres" a déjà fait l'objet d'au moins une réponse à une question parlementaire, notamment lors de l'interpellation de Madame la Députée Cassart le 22 mars dernier, ou encore lors ma réponse à la question d'actualité de Monsieur le Député Borsus le 23 février 2005.

    Pour rappel, la DGATLP (Direction générale de l'aménagement du territoire, du logement et du patrimoine) a décidé de cette bande pour répondre aux obligations découlant de la Directive européenne elle-même.

    5) La mesure d'exonération fiscale vise effectivement les propriétaires. Les agriculteurs qui louent ces terres pourront néanmoins bénéficier de primes agri-environnementales majorées dans les sites Natura 2000, ce qui constitue déjà un avantage certain. En cas de location d'un terrain en zone Natura 2000, on peut aussi imaginer que le prix de la location soit revu à la baisse. Je ne suis évidemment pas en état d'arbitrer ce problème qui touche spécifiquement le droit de la propriété privée.

    6) Si on envisage de compenser aux agriculteurs pour les pertes de revenus liées à Natura 2000, il serait logique et justifié de les insérer dans le cadre de l'axe 2 du P.D.R (Axe 2 : « Amélioration de l'environnement et aménagement de l'espace rural »).

    La mise au point du Plan stratégique de ce P.D.R. se fera en étroite collaboration avec une série de partenaires privilégiés (secteurs agricole, forestier, etc…). Cette concertation est en cours et je ne peux actuellement préjuger des résultats. Mais je serai très attentif à ce qu'une mesure puisse compenser les pertes pour les agriculteurs et soit financée dans le cadre du PDR.

    7) En ce qui concerne l'emploi d 'un responsable "Natura 2000" à la Direction de Malmédy, je ne peux que déplorer le départ de l'agent occupant cette fonction. Contrairement à ce que mentionne l'honorable Membre, cette personne n'a pas été remplacée. Dès qu'une possibilité de recrutement me sera offerte, il va sans dire que je serai attentif à ce que l'agent exerçant cette fonction soit bilingue.