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Les mécanismes de protection contre la dérégulation étudiés par la Commission européenne

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 27 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 06/11/2017
    • de HAZEE Stéphane
    • à BORSUS Willy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    Nos entreprises font parfois face à une concurrence totalement déloyale, lorsque la concurrence ne se fonde plus sur la qualité des marchandises ou sur des prix qui reflètent justement l'ensemble des coûts de production, mais lorsqu'elle est organisée à partir de normes sociales et environnementales tirées vers le bas. Le libre-échange devient alors le libre-échange de la pollution et de l'exploitation des travailleurs.

    Il semble que la Commission européenne commence à réfléchir à ce problème important, notamment à l'égard de la Chine. Ainsi, Le Soir indique, en date de ce 6 octobre 2017, qu'elle étudie le concept de distorsions significatives, qui prendraient également en compte le respect des normes environnementales et de travail.

    Une telle perspective est particulièrement intéressante.

    Monsieur le Ministre est-il informé de ce projet ?
    Le cas échéant, peut-il préciser :
    - si les États sont associés à cette réflexion et au processus de décision en la matière ;
    - les tenants et aboutissants du dossier, notamment quant aux pays concernés et quant aux normes environnementales et de travail prises en compte ;
    - le calendrier prévisible du dossier ?

    Si tel n'est pas le cas, peut-il examiner la problématique et recueillir des informations sur les réflexions en cours, en lien avec la Délégation permanente, et analyser les perspectives potentielles pour les entreprises de Wallonie  ?
  • Réponse du 21/11/2017
    • de BORSUS Willy

    Le 3 octobre 2017, les négociateurs du Parlement européen et du Conseil sont parvenus à un accord sur la proposition de la Commission européenne du 9 novembre 2016 en vue de modifier la législation antidumping et antisubventions de l’Union européenne. La nouvelle législation antidumping devrait donc pouvoir entrer en vigueur avant la fin de cette année.

    Pour déterminer l’existence ou non de dumping, on part de la valeur normale (prix ou coûts) du produit sur le marché intérieur du pays exportateur. On compare ensuite cette valeur avec le prix à l’exportation du produit vers l’Union. Si le prix auquel le produit est exporté est inférieur à la valeur normale du bien dans le pays exportateur, il est question de dumping. Afin de supprimer l’avantage tarifaire des produits étrangers ayant fait l’objet d’un dumping, l’Union peut décider d’adopter des mesures correctrices antidumping.

    La législation actuelle de l’UE distinguait, pour le calcul de la valeur normale, les pays à économie de marché et les pays ne disposant pas d’une économie de marché, parmi lesquels la Chine. Pour ces derniers, la législation européenne permettait l’utilisation des prix pratiqués dans un pays analogue pour déterminer la valeur normale des biens exportés dans ces pays. La valeur normale ainsi établie était ensuite comparée au prix à l’exportation du produit dans le pays ne disposant pas d’une économie de marché. Cette méthode tend à établir une marge de dumping plus importante que celle qui résulte d’une comparaison au départ des prix et coûts du pays ne disposant pas d’une économie de marché.

    Le maintien de la législation actuelle de l’Union européenne et cette distinction entre pays avec – ou sans - économie de marché devenaient compliqués du fait de l’évolution de l’environnement commercial mondial et surtout des changements intervenus dans le cadre juridique de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC).

    La nouvelle législation repose désormais sur le concept de « distorsions significatives », c’est-à-dire de distorsions de concurrence affectant la fiabilité des prix et des coûts. Ainsi, s’il peut être prouvé que dans un pays X membre de l’OMC, il existe une distorsion significative de la structure des coûts et des produits, la valeur normale pourra être déterminée sur la base de prix et coûts non faussés par des interventions étatiques discriminatoires.

    Pour déterminer l’existence de distorsions dans une économie, la Commission européenne élaborera et diffusera des rapports analysant la situation particulière du marché dans un secteur ou un pays donné. Ces rapports seront consultables par le grand public. L’industrie européenne pourra se fonder sur les informations contenues dans ces rapports lors d’un dépôt d’une plainte antidumping ou lors d’une demande de réexamen. Le premier rapport qui sera rédigé par la Commission portera sur la Chine.

    Pour la première fois, les normes sociales et environnementales seront prises en compte dans le cadre des mesures de défense commerciale. Lorsque la Commission aura le choix, pour l’établissement des prix et coûts non faussés, entre différents pays représentatifs appropriés présentant un niveau de développement économique analogue à celui du pays exportateur faisant l’objet de l’enquête, le niveau de protection sociale et environnementale dans les pays envisagés sera un facteur de sélection. C’était une demande forte du Parlement européen qui a été acceptée par le Conseil.

    Dans le cadre de ces débats qui ont été difficiles, mais qui ont malgré tout abouti rapidement, démontrant la volonté européenne de se doter d’armes antidumping efficaces, la Belgique a mis en avant la nécessité de ne pas affaiblir le niveau de protection de l’industrie européenne et de ne pas faire supporter la charge de la preuve par l’industrie de l’Union. Des garanties ont été obtenues sur ces deux points : le niveau de protection devrait être maintenu et les nouvelles modalités n’imposeront aucune charge supplémentaire pour l’industrie de l’Union vu que c’est à la Commission européenne que revient la charge d’établir l’existence de distorsions dans un pays donné.

    La nouvelle législation reflète la position de l’Union européenne de défense d’un commerce ouvert et équitable que nous défendons aussi.