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La pratique de l'humusation en Wallonie

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 95 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 07/11/2017
    • de MORREALE Christie
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives

    Lorsque nous mourons, nous n'avons en Wallonie, selon le Code de la démocratie locale que deux options funéraires: l'enterrement et l'incinération.

    Plusieurs personnes plaident aujourd’hui pour une légalisation de la pratique de l’humusation, qui consiste à transformer les corps par les micro-organismes dans un compost composé de broyats de bois d'élagage, qui transforme, en 12 mois, les dépouilles mortelles en humus.

    Si je peux voir plusieurs avantages en la pratique (contrairement à l’enterrement, l’humusation ne nécessite pas de cercueil, pas de frais de concession dans un cimetière, pas de frais de pierre tombale, ni de caveau, pas de frais d'embaumement, ni l'ajout de produits chimiques et contrairement à l'incinération, ce processus ne génère pas de rejets dans l'atmosphère, ne consomme pas d'énergie fossile, ne détériore pas les couches superficielles du sol lors la dispersion des cendres…), des questions juridiques, sanitaires et mémorielles se posent. Depuis plusieurs mois, la Cellule de gestion du patrimoine funéraire de la DGO4 en collaboration avec les juristes de la DGO5, est en contact avec les promoteurs de ce processus.

    Plusieurs questions se posent également aux communes notamment en termes de formation du personnel, de la sécurisation des sites, de l’aménagement du territoire…

    Une pétition favorable à une modification décrétale, permettant l’humusation aurait récolté plus de 16.000 signatures. Plus de 1500 actes de "dernière volonté" envoyés par des citoyennes et des citoyens wallons à leurs élus locaux démontrent l’intérêt croissant pour cette méthode.

    Certaines communes ont également annoncé publiquement leur accord de principe. Il est donc nécessaire que la Région se positionne rapidement. À l’heure actuelle, que doivent répondre les communes sollicitées ?

    Quelle est la position de Madame la Ministre sur cette question ? La Wallonie pourrait-elle rapidement autoriser cette option funéraire ? D’autres pays européens pratiquent-ils ce processus ?
  • Réponse du 24/11/2017
    • de DE BUE Valérie

    J’ai déjà été questionnée à plusieurs reprises depuis le début de mon mandat ministériel sur la question de l’humusation.

    Ainsi que je l’ai précisé, il paraît délicat de légiférer d’emblée sur le sujet, sans avoir obtenu préalablement certaines garanties, notamment des études scientifiques, pourquoi pas tirées de la pratique d’autres pays qui auraient franchi le pas en autorisant la méthode, et qui pourraient alors déboucher sur une phase expérimentale, celle-ci devant nécessairement passer par une modification du décret et qui pourrait être mise en place via un suivi du Gouvernement.

    Je suis totalement ouverte à ce que la Commission des Pouvoirs locaux se saisisse de la question des nouvelles techniques de gestion des dépouilles, notamment l’humusation, ou encore la résomation, la promession, ou l’aquamation, mais également des matériaux des cercueils et plus spécifiquement, la question du carton. Cela est nécessaire pour y voir plus clair et prendre attitude sur la question.

    Mon administration, par le biais de la Cellule de gestion du patrimoine funéraire de la DGO4 en collaboration avec les juristes de la DGO5, est en contact avec les promoteurs de ce processus. Dans ce cadre, plusieurs réunions ont eu lieu dont la plus récente date du 16 octobre 2017 concernant une trentaine de questions et une centaine de sous-questions à eux remises le 13 mars 2017.

    Ces questions, que je tiens à la disposition des Parlementaires, visent à cibler les cadres législatif, culturels, sanitaires, mémoriels et d’aménagement du territoire concernés par cette nouvelle approche qui n’en est encore qu’au stade de la théorie.

    Considérer que cette pratique est écologique ne s’appuie sur strictement aucune étude relative à l’humusation des corps humains, lesquels ont un parcours alimentaire et médicamenteux qu’il serait absurde de négliger. La décomposition d’un corps humain est un phénomène particulier, or, à aucun moment, le processus invoqué n’envisage ni les risques de pollutions des sous-sols par les liquides organiques, ni les risques de pollution gazeuse, et encore moins ces deux risques associés à un nombre conséquent de corps traités de cette façon sur un même espace. Un ensemble d’interrogations est également soulevé en termes d’aménagement du territoire et de compétences communales. La réflexion devra également inclure une étude sur les lieux capables de prendre en charge ces techniques. Lorsque l’on connait les situations de sous-effectifs communaux pour la gestion des cimetières, il apparait peu pertinent d’envisager imposer à chaque commune la création d’un espace dévolu à l’humusation, d’autant que cette pratique suppose un personnel formé au traitement des restes humains à plusieurs moments du processus de décomposition. Dès lors, je ne suis pas persuadée, à ce stade, que les communes disposent du personnel suffisant pour gérer des humusations, d’autant qu’une formation spécifique doit intervenir, ni de la place suffisante. L’analyser, comme ce fut le cas pour l’incinération, au niveau intercommunal induit la réflexion sur les terrains à allouer à cette méthode, leur nature, leur sécurisation, le voisinage des vivants, la formation d’un personnel spécifique, les coûts, etc.

    Des questions éthiques et mémorielles se posent également, au moins concernant le devenir de ce “super-compost” dans lequel se retrouvent des escarbilles osseuses.

    Tant qu’une modification du Code n’est pas intervenue en ce sens, les communes sollicitées doivent refuser d’acter les dernières volontés de citoyens qui iraient dans le sens d’une humusation et leur préciser que ce mode n’est actuellement pas légal.