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Les discriminations en matière de logement

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 109 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 17/11/2017
    • de COLLIGNON Christophe
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives

    Récemment, un reportage de la RTBF a mis en avant la problématique de l'existence de discriminations en matière de logement.  Celle-ci est malheureusement bien réelle. Certains agents immobiliers n'hésitent pas à outrepasser le Code de déontologie des agents immobiliers.

    Notre assemblée à l'initiative de mon groupe avait adopté une résolution visant à lutter contre les discriminations en matière de logement.

    En effet, si un arsenal législatif existe et réprime toutes formes de discriminations, dans les faits, force est malheureusement de constater que les cas de discriminations perdurent notamment en matière de logement. Ceux-ci sont encore trop nombreux et trop souvent impu­nis.

    Essentiellement car, d'une part, il est difficile d'apporter la preuve de la discrimination et, d'autre part, parce que beaucoup de personnes n'osent pas porter plainte.

    En effet, malgré des législations antidiscriminations organisant un régime de partage, la preuve favorable à la victime, les outils mis en place sont trop peu utilisés.

    Madame la Ministre va-t-elle mettre en œuvre les dispositions prévues dans ce texte ?

    Compte-t-elle renforcer, développer, promouvoir les outils existants ?

    Il était envisagé dans notre texte de nouvelles mesures comme des tests de situations organisés et/ou de contrôles mystères et/ou de clients mystères (encore appelés "mystery shop­pers"), de manière loyale, légale et non provocante et ce en bonne concertation avec les acteurs de terrain. C'est un dispositif qu'on retrouve également en matière de lutte contre la discrimination en matière d'emploi. 

    Quelle est la position de Madame la Ministre en la matière ? Est-elle favorable à ce genre de dispositif ? Quelle est la position du Gouvernement wallon en la matière ?
  • Réponse du 06/12/2017
    • de DE BUE Valérie

    Il est constaté sur le marché locatif privé des pratiques discriminatoires de la part de bailleurs, qui refusent des candidats locataires en raison uniquement de leur couleur de peau, de leur statut d’allocataire social, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur âge, etc.

    Toute discrimination est interdite de manière générale en vertu du principe d’égalité et de non-discrimination visé aux articles 10 et 11 de la Constitution.

    Consacré par l’article 23 de la Constitution, le droit au logement ne peut tolérer des disparités inéquitables qui touchent principalement les locataires les plus fragiles.

    La lutte contre les discriminations est consacrée par plusieurs instruments, dont la loi du 10 mai 2007.

    Sont visées aussi bien les discriminations directes, comme l’annonce locative stipulant « Pas de locataires CPAS » ou « Étrangers s’abstenir » que les discriminations indirectes.

    Les discriminations indirectes se produisent lorsqu’une disposition, un critère ou une pratique, apparemment neutre, est susceptible d’entraîner, par rapport à d’autres personnes, un désavantage particulier pour des personnes caractérisées par l’un des critères protégés.

    Toute inégalité de traitement doit objectivement être justifiée par un but légitime et pour autant que les moyens de réaliser ce but soient appropriés et nécessaires.

    Dans le rapport d’évaluation qu’il vient de publier sur les lois du 10 mai 2007 tendant à réprimer certains actes inspirés par le racisme ou la xénophobie et certaines discriminations, « Unia constate que le critère de fortune est très présent dans l’accès au logement (refus de louer à une personne qui touche un revenu de remplacement tel qu’un revenu d’intégration sociale, une indemnité de chômage ou d’invalidité…) ».

    Qu’il me soit permis de rappeler une décision importante rendue le 5 mai 2015, le Tribunal de première instance de Namur a jugé qu’un propriétaire qui exigeait des candidats locataires qu’ils disposent d’un contrat de travail à durée indéterminée (ou au moins d’un contrat de travail) se rendait coupable de discrimination. Le propriétaire avait fait valoir qu’il voulait ainsi s’assurer de la solvabilité des locataires potentiels. Mais le tribunal a estimé qu’il allait trop loin dans les conditions qu’il imposait : en effet, cela revenait à exclure des candidats locataires parfaitement solvables, mais sans contrat de travail (par exemple des personnes disposant de revenus mobiliers ou immobiliers, des retraités, des bénéficiaires d’une indemnité d’invalidité, des indépendants…). D’autre part, le tribunal a aussi indiqué que l’emploi et les revenus n’étaient pas garantis, même pour des personnes qui ont un contrat de travail à durée indéterminée.

    Dans le projet de décret relatif au bail d’habitation que je suis en train de finaliser, il sera rappelé le principe du libre choix du preneur par le bailleur.

    Il est entendu que ce libre choix ne peut s’exercer sans limites et l’amener à discriminer d’éventuels potentiels locataires.

    À cette fin, sur base du travail réalisé en la matière par UNIA et sur base des recommandations de la Commission de la protection de la vie privée aux bailleurs et aux agents immobiliers relative au traitement des données des candidats locataires (SE/08/128 – n°1/2009 du 18 mars 2009), je compte établir une liste des données pouvant être sollicitées par le propriétaire à un candidat-preneur en vue de procéder à la conclusion du contrat de bail.

    Il sera également prévu que les opérateurs immobiliers publics – et notamment les sociétés de logement de service public puissent solliciter des informations complémentaires afin de leur permettre d’exercer leurs missions de service public définies par le Code wallon du logement et de l’habitat durable.

    J’ai rencontré Unia et nous avons convenu de travailler sur l’aspect « contrôle » ensemble. Le texte des Ministres Furlan/Dermagne a été vertement critiqué par le Conseil d’État. Nous l’avons donc omis. Il nous semble nécessaire de travailler sereinement à un texte respectueux des droits fondamentaux de chacun.

    Nous aurons l’occasion de débattre de ces questions lorsque je déposerai prochainement le projet de décret relatif au bail d’habitation dans cette enceinte.