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Les bourdons et les fongicides

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 168 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 30/11/2017
    • de MORREALE Christie
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région

    Une nouvelle étude menée par des chercheurs de l’Université Cornell, aux États-Unis, établit le lien entre l’utilisation des fongicides, souvent détectés dans les ruches, et le déclin d’au moins quatre espèces de bourdons.

    Le fongicide étudié rendrait en effet les bourdons bien plus vulnérables au pathogène responsable de la Nosema, une infection qui peut leur être fatale. La substance contribuerait ainsi au déclin de la population de ces insectes. Or, les bourdons jouent un rôle essentiel dans nos cultures. En transportant le pollen d’une fleur à l’autre, ils participent à leur fécondation et contribuent ainsi à l’amélioration du rendement des cultures et à la sauvegarde des plantes sauvages.

    Nos bourdons sont-ils menacés par l’utilisation des fongicides ? Les ruches sont-elles contaminées par ces pesticides ? Une étude wallonne permet-elle de mesurer l’impact de ces produits sur les bourdons ?
  • Réponse du 20/12/2017
    • de COLLIN René

    Une étude (Honeybee Colony Disorder in Crop Areas: The Role of Pesticides and Viruses
    http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0103073) financée par la Région wallonne a été menée en 2011 et 2012 par le Centre wallon de Recherches agronomiques (CRA-W) et le Centre apicole de Recherche et d'Information (CARI), dans le but de tester l’hypothèse d’un effet synergique entre, d’une part les maladies virales affectant les abeilles et, d’autre part l’exposition aux insecticides. Elle a consisté à rechercher à la fois les pesticides et les virus dans 330 ruches distribuées sur le territoire wallon. Les analyses ont porté sur la cire, les abeilles, le miel et le pain d’abeilles. C’était donc une étude d’envergure.

    Cette étude n’a pas mis en évidence d’effet synergique entre les insecticides et les virus, en termes de mortalité des colonies. En revanche — et de façon inattendue —, une corrélation étroite est apparue entre la probabilité d’effondrement de la colonie et le nombre de fongicides dont des résidus étaient retrouvés dans la ruche. Une seconde corrélation se révélait entre la probabilité d’effondrement et la proportion de surface de culture dans l’environnement des ruchers.

    Cette découverte faite en Wallonie sur l’abeille mellifère, on ne peut s’empêcher de la rapprocher des conclusions de la recherche qu'évoque l'honorable membre, portant sur les bourdons aux États-Unis. Non, les fongicides ne sont pas nécessairement inoffensifs envers les insectes. Oui, à force de polariser toute l’attention sur les seuls néonicotinoïdes, d’autres causes plus subtiles d’effondrement des populations de pollinisateurs n’ont sans doute pas reçu l’attention qu’elles méritaient.

    Les observations faites en 2011-2012 se sont prolongées et se prolongent encore aujourd’hui au CRA-W et au CARI, notamment par la réalisation de tests écotoxicologiques approfondis sur les principaux fongicides incriminés dans cette étude. Aux mesures de l’effet direct des produits sur les abeilles et sur le couvain, doivent encore s’ajouter des observations sur les effets indirects de ces produits sur les colonies dans leur ensemble. Une hypothèse émise est celle d’une perturbation des processus de transformation du pain d’abeille, à partir du pollen. Ces processus complexes impliquent notamment des levures, qui pourraient être affectées par les fongicides.

    Au stade actuel, il me semble prématuré de prendre des mesures immédiates sur le terrain. En revanche, nous ne pouvons qu’encourager nos chercheurs à poursuivre leurs travaux, en espérant que leur intuition et leur travail les conduiront à élucider les phénomènes délétères pour les insectes pollinisateurs, et que ceci nous permettra alors de prendre les mesures adéquates pour les prévenir.