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L'impact des fongicides sur les bourdons

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2017
  • N° : 197 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 13/12/2017
    • de PUGET André-Pierre
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région

    Une étude menée par des chercheurs de l’université de Cornell aux États-Unis a établi un lien entre l’utilisation de fongicides et le déclin d’au moins quatre espèces de bourdons. Ce sont des produits utilisés pour venir à bout des champignons, principalement dans les cultures.

    Alors que les scientifiques pensaient retrouver les mêmes coupables qu’habituellement, à savoir les pesticides néonicotinoïdes, les fongicides ont attiré leur attention alors que ces derniers étaient considérés jusqu’alors comme totalement inoffensifs.

    Ce fongicide rendrait en effet les bourdons plus vulnérables au pathogène responsable de la Nosema et contribuerait ainsi au déclin de leur population.

    Enfin, les chercheurs ont aussi fait part de leur inquiétude concernant l’usage couplé de fongicides et d’insecticides, évoquant le fait que, bien que la plupart des fongicides ne soient pas toxiques pour ces insectes, beaucoup agissent néanmoins en synergie avec les insecticides, augmentant ainsi leur toxicité de manière considérable.

    Les bourdons sont des insectes pollinisateurs et jouent un rôle primordial dans nos cultures. Ils améliorent le rendement de celles-ci et contribuent à la sauvegarde des plantes sauvages.

    Je souhaiterais connaître l'avis de Monsieur le Ministre sur la question. A-t-il des informations supplémentaires en ce qui concerne l’usage de fongicides en Wallonie et la population des insectes pollinisateurs ?

    Pense-t-il qu’il soit nécessaire de se pencher davantage sur ce sujet et de commencer à parler de prévention ?

    Des mesures doivent-elles être prévues à l’avenir ?
  • Réponse du 18/12/2017
    • de COLLIN René

    Une étude (Honeybee Colony Disorder in Crop Areas: The Role of Pesticides and Viruses http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0103073) financée par la Région wallonne a été menée en 2011 et 2012 par le Centre wallon de Recherches agronomiques (CRA-W) et le CARI, dans le but de tester l’hypothèse d’un effet synergique entre, d’une part, les maladies virales affectant les abeilles et, d’autre part, l’exposition aux insecticides. Elle a consisté à rechercher à la fois les pesticides et les virus dans 330 ruches distribuées sur le territoire wallon. Les analyses ont porté sur la cire, les abeilles, le miel, le pain d’abeilles. C’était donc une étude d’envergure.

    Cette étude n’a pas mis en évidence d’effet synergique entre les insecticides et les virus, en termes de mortalité des colonies. En revanche -et de façon inattendue- une corrélation étroite est apparue entre la probabilité d’effondrement de la colonie et le nombre de fongicides dont des résidus étaient retrouvés dans la ruche. Une seconde corrélation se révélait entre la probabilité d’effondrement et la proportion de surface de culture dans l’environnement des ruchers.

    Cette découverte faite en Wallonie sur l’abeille mellifère, on ne peut s’empêcher de la rapprocher des conclusions de la recherche qu'évoque l'honorable membre, portant sur les bourdons aux États-Unis. Non, les fongicides ne sont pas nécessairement inoffensifs envers les insectes. Oui, à force de polariser toute l’attention sur les seuls néonicotinoïdes, d’autres causes plus subtiles d’effondrement des populations de pollinisateurs n’ont sans doute pas reçu l’attention qu’elles méritaient.

    Les observations faites en 2011-12 se sont prolongées et se prolongent encore aujourd’hui au CRA-W et au CARI, notamment par la réalisation de tests écotoxicologiques approfondis sur les principaux fongicides incriminés dans cette étude. Aux mesures de l’effet direct des produits sur les abeilles et sur le couvain, doivent encore s’ajouter des observations sur les effets indirects de ces produits sur les colonies dans leur ensemble. Une hypothèse émise est celle d’une perturbation des processus de transformation du pain d’abeille, à partir du pollen. Ces processus complexes impliquent notamment des levures, qui pourraient être affectées par les fongicides.

    Au stade actuel, il me semble prématuré de prendre des mesures immédiates sur le terrain. En revanche, nous ne pouvons qu’encourager nos chercheurs à poursuivre leurs travaux, en espérant que leur intuition et leur travail les conduiront à élucider les phénomènes délétères pour les insectes pollinisateurs, et que ceci nous permettra alors de prendre les mesures adéquates pour les prévenir.