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L'introduction du gender mainstreaming dans les politiques d'aménagement du territoire

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 548 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 03/01/2018
    • de MORREALE Christie
    • à DI ANTONIO Carlo, Ministre de l'Environnement, de la Transition écologique, de l'Aménagement du Territoire, des Travaux publics, de la Mobilité, des Transports, du Bien-être animal et des Zonings

    Le décret du 11 avril 2014 visant à la mise en œuvre des résolutions de la conférence des Nations Unies sur les femmes à Pékin de septembre 1995, prévoit l'intégration structurelle de la dimension de genre dans les politiques régionales, c’est le gender mainstreaming. Or, dans ce plan, aucun objectif spécifique ne concerne l’aménagement du territoire.

    En effet, les politiques d'urbanisme en général, et l'aménagement de l'espace public en particulier, sont rarement soumises à une analyse genrée. Pensons par exemple à la séparation spatiale entre les quartiers résidentiels et de loisir et les quartiers « où on travaille », commerçants, industriels et administratifs. Or le domicile et les espaces verts ne sont pas seulement des lieux de loisir et de repos, ils sont aussi des lieux de travail : le travail domestique et de soin aux personnes, tels que de ménage, de soin et d'éducation des enfants et de personnes dépendantes.

    Par la distribution inégalitaire de ce travail reproductif, ce sont surtout les femmes qui assument ces tâches, dans des espaces qui ne sont que rarement pensés pour le travail. Les politiques et pratiques d'urbanisme rendent ce fait invisible et participent ainsi au manque de reconnaissance du travail reproductif, à sa distribution inégalitaire et à son poids sur les individus.

    Ce manque d'analyse de genre ne mène pas à des décisions «neutres» ni équitables, mais à des politiques basées sur un modèle implicitement masculin d'organisation de la vie quotidienne qui ne laisse pas de place pour les expériences et besoins spécifiques des femmes.

    Il a été remarqué dans d'autres pays qui ont entamé une réflexion genrée de l’espace public, que certains changements de l'environnement égalisent l'accès à l'espace public. Ils peuvent aussi avoir une répercussion sur des comportements considérés comme «insécurisants». Il n'est donc pas anodin de prendre en considération l'espace public et les décisions d'urbanisme comme étant des facteurs contribuant au bien-être et d'égalité dans l'accès à la ville.

    Dans ce cadre, l’ASBL Garance a réalisé 10 marches exploratoires avec des femmes namuroises pour analyser leurs expériences, leurs ressentis, leurs envies et leurs recommandations pour une ville idéale où elles se sentiraient à l'aise d'utiliser les espaces publics, même en soirée.

    Plusieurs recommandations ont alors été émises en termes d’éclairage public, d’indication des rues et des endroits, d’aménagement des trottoirs et des pistes cyclables.
    Monsieur le Ministre a-t-il pris connaissance de ces recommandations ? Pourquoi cette analyse genrée n’est-elle pas systématiquement appliquée aux différents projets d’aménagements urbains ? Ne pense-t-il pas que cette analyse contribuerait à améliorer l’accessibilité des femmes aux espaces publics ?
  • Réponse du 19/01/2018
    • de DI ANTONIO Carlo

    La Région applique le décret du 11 avril 2014, visant à la mise en œuvre des résolutions de la Conférence des Nations unies sur les femmes à Pékin de septembre 1995 (MB du 6 juin 2014), lequel prévoit l'intégration structurelle de la dimension de genre dans les politiques régionales (gendermainstreaming).

    À titre d’exemple, le CoDT impose une représentation équilibrée des hommes et des femmes dans les organes consultatifs amenés à remettre des avis sur les projets d’aménagement du territoire et d’urbanisme. Le point de vue des utilisatrices peut donc d’ores et déjà être relayé par le biais du Pôle « Aménagement du territoire » et des commissions consultatives communales d’aménagement du territoire et de mobilité. Par ailleurs, le point de vue des utilisatrices peut aussi s’exprimer au sein des collèges communaux qui remettent des décisions, notamment, sur l’aménagement des espaces publics.

    Par ailleurs, sous le Gouvernement précédent, le 26 février 2015, le Gouvernement avait pris acte, du « plan genre » composé de 16 objectifs stratégiques dont deux ressortant de ma compétence : la mobilité et l’accessibilité aux transports en commun.

    Le schéma de développement du territoire (SDT) est en cours d’élaboration. Ce document définit à l’échelle régionale la stratégie territoriale pour la Wallonie, sur la base d’une analyse contextuelle. Situé au sommet de la hiérarchie des outils d’aménagement du territoire et d’urbanisme en Wallonie, le SDT s’impose aux autres outils d’aménagement du territoire.

    L’un des 20 objectifs identifiés dans l’avant-projet de SDT dont le Gouvernement wallon a pris acte le 26 octobre dernier est de « Développer des espaces publics de qualité, conviviaux et sûrs » (DE.3). Les recommandations proposées par l’ASBL GARANCE pourraient être intégrées dans les principes de mise en œuvre de cet objectif.

    Par ailleurs, d’autres opportunités existent bel et bien, qui permettent une gestion de l’urbanisme en faveur de l’égalité sociale entre hommes et femmes. Je citerai notamment :
    * la création de quartiers nouveaux et villes nouvelles génératrices de citoyenneté et de cohésion sociale et permettant de multiplier les itinéraires piétons, de rapprocher les crèches des bureaux, des ateliers, des magasins et des maisons d’habitations, de renforcer l’accessibilité et le confort des espaces publics ; la conférence permanente de développement territorial (CPDT) a été chargée dans le cadre de son programme de travail 2018 d’établir une Stratégie et référentiel pour des Quartiers Nouveaux de taille moyenne, dans la foulée de celui qui existe pour les quartiers de plus de quinze hectares.
    * la nouvelle zone d’enjeu communal créée dans le cadre du CoDT qui permet d’amplifier les opérations de reconstruction de la ville sur la ville avec une mixité des fonctions et l’imposition d’y développer un réseau de mobilité douce et des espaces verts reconstruire ; ces nouvelles zones permettent de réduire les déplacements « domicile-travail » ainsi que l’étalement pavillonnaire sans services de proximité.

    Ceci étant, je rejoins l’analyse de l'honorable membre quant à la nécessité de continuer à veiller à intégrer les enjeux de l’inégalité sociale entre les hommes et les femmes dans les politiques de l’urbanisme et de l'aménagement du territoire et d’en faire une priorité.