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Le soutien accordé aux partenariats privés-publics (PPP)

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 143 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 24/01/2018
    • de TZANETATOS Nicolas
    • à CRUCKE Jean-Luc, Ministre du Budget, des Finances, de l'Energie, du Climat et des Aéroports

    Depuis plus de trente ans, la Belgique se caractérise par un niveau d’investissement public structurellement bas. Ainsi, elle est, avec l’Allemagne, un des États membres de la zone euro dont l’investissement public est le plus faible.

    Une augmentation de l’investissement est donc nécessaire, d’autant que la Belgique a des besoins en infrastructures clairement identifiés.

    Le cadre budgétaire européen et la situation de la Belgique d’une manière générale ne permettent certes pas des dépenses inconsidérées, mais des pistes existent, notamment au travers des Partenariats publics privés (PPP) que Monsieur le Ministre a déjà défendus à de nombreuses reprises.

    Dans ce contexte, une réflexion devrait être engagée afin de s’interroger sur les freins à la mise en place de partenariats public-privé en Belgique. En effet, contrairement à d’autres pays comme le Royaume-Uni ou la France, on constate que la Belgique a relativement peu recours à ce type de partenariats.

    D’où mes questions par rapport à ces PPP qui ne semblent pas encore ou pas suffisamment utilisés. Est-ce parce que cette formule est plus coûteuse que les modes de financement traditionnels ? Est-ce par un manque de culture et d’habitude face à cette pratique ? Est-ce par un manque d’expertise au sein du secteur public pour pouvoir négocier avec le privé ces contrats relativement techniques ?  Monsieur le Ministre a-t-il d’ores et déjà planifié des mesures pour booster ce véhicule d’investissement ?

    Au vu de la complexité de ces partenariats, des outils pourraient également être prévus afin d’aider les acteurs publics à mettre en œuvre ceux-ci.

    Par ailleurs, on pourrait envisager la rédaction d’un guide pratique des PPP à destination des acteurs publics et privés belges. Est-ce que ce sont des pistes concrètes que Monsieur le Ministre étudie pour le moment ?
  • Réponse du 09/02/2018
    • de CRUCKE Jean-Luc

    1) Les PPP sont peu utilisés en Belgique

    En Belgique, 27 projets de PPP (sous forme de DBFM, DBFO et concessions de travaux et services publics) d’une valeur d’investissement supérieure à 10 millions d'euros sont recensés, pour un montant total de 6.2 milliards d'euros (recensement par l’Epec - Centre européen d’expertise constitué sous l’égide de la BEI et dont la CIF est membre pour la Wallonie et la Communauté française).

    Il est vrai que ces projets sont pour leur très grande majorité flamands, la Belgique francophone n’ayant pour l’instant que peu de projets de PPP de cette importance.

    Les obstacles généralement avancés pour expliquer l’absence d’un développement des PPP sont de plusieurs ordres et ont trait :
    * A l’engagement politique de réaliser une politique d’investissement sous la forme de PPP ;
    * Au cadre juridique et institutionnel, y compris la genèse des politiques d’investissement : ainsi l’eau ou les déchets entre autres sont des domaines de prédilection des PPP/concessions dans certains pays. Le choix de constituer des sociétés publiques dédiées à ces activités réduit d’autant l’intérêt de recourir à des formules contractuelles de type PPP ou concessions ;
    * À la capacité pour les administrations de mener une politique PPP : la réalisation d’investissements publics sous la forme de PPP suppose des compétences particulières qui ne correspondent que rarement aux profils des agents publics ; par ailleurs, la gestion de projet sur le long terme tenant compte de l’ensemble des paramètres d’un contrat sur 20 ou 30 ans implique une organisation et une transversalité qui peut être complexe à instituer ;
    * A la question de la motivation des PPP : les différents niveaux de pouvoir belges ont fait de la déconsolidation des investissements en PPP au regard du SEC un élément déterminant du recours à ce mode d’investissement. Outre les difficultés qui ont pu en résulter pour certains projets (tram de Liège par exemple), cette attention ne constitue sans doute pas un facteur propice à considérer plus généralement les développements d’une politique PPP en terme de value for money et de bancabilité des projets/programmes.



    2) La formule est-elle plus couteuse ?

    Le débat sur le coût plus élevé des PPP comparé aux marchés publics classiques pose la question de la mesure de ces coûts respectifs et de ce qui est effectivement comparé. Cela appelle les éléments d’appréciation suivants :
    * De première part, il conviendrait de comparer des données comparables à savoir le prix de prestations équivalentes (conception, construction et maintenance) réellement acquitté (intégrant donc les surcoûts générés en cours d’exécution du contrat) ;
    * De deuxième part, la question pose également celle des instruments de mesure et de comparaison a priori du recours aux marchés publics classiques ou aux PPP. Certains pays et régions ne recourent pas ou peu à des publics sector comparators (c’est le cas en Flandre par exemple). D’autres disposent d’un ensemble d’outils de comparaison (les Pays-Bas). La CIF dispose d’un tel outil de comparaison dont l’intérêt ne doit être ni exagéré ni minoré ;
    * De troisième part, l’on constate que les pays qui ont une pratique plus étendue des PPP sont passés du recours systématique à un public sector comparator à des évaluations plus génériques de l’intérêt comparé entre les marchés publics et les PPP. La France a ainsi mené une étude dont il ressort que si, lors de la conclusion, les PPP sont plus chers, ils subissent beaucoup moins de renchérissement en cours d’exécution pour être, au final, moins coûteux que les marchés publics classiques ;
    * En conclusion, la question du coût comparé entre les marchés publics et les PPP est une question récurrente qui reçoit des réponses diversifiées. Les outils d’évaluation ont leur limite et l’on ne dispose pas d’études pertinentes sur la réalité des surcoûts (et des allongements de délais d’exécution) en marchés publics en Wallonie. Sans doute ne peut-on considérer que les PPP sont nécessairement plus chers. Surtout, il convient également de tenir compte de l’intérêt de telles formules en terme qualitatif qui peuvent conforter des PPP.



    3) Quelles évolutions permettant de faciliter le recours aux PPP

    Les difficultés et défis d’une politique d’investissement sous la forme de PPP ont déjà été évoqués ci-dessus. L’on peut y ajouter les éléments suivants relatifs aux conditions permettant, si tel est l’objectif, de faciliter le recours aux PPP, y compris le cas échéant, par les pouvoirs locaux. La finalité globale des mesures envisageables peut être de réduire la difficulté (avérée ou ressentie) de tels contrats et de s’assurer d’une harmonisation suffisante pour réduire les coûts de transaction et garantir l’intérêt du secteur privé pour ces investissements.

    Tout d’abord, il est certain que la standardisation des procédures et des clauses récurrentes peut être de nature à simplifier l’emploi de ces contrats. Elle permet à l’autorité publique de se concentrer sur les aspects singuliers de son investissement. Et le secteur privé peut retrouver d’un contrat à l’autre des exigences comparables. Cela peut être de nature à réduire le coût de transaction de telles opérations. L’établissement de guides, la diffusion de bonnes pratiques et de standards sont autant d’éléments permettant, le cas échéant, de développer la pratique des PPP.

    Ensuite, il peut être opportun de raisonner en termes de programme plus que d’opération isolée. L’on peut concevoir que le PPP (dans une version harmonisée) constitue l’une des solutions à envisager soit à partir d’un montant donné, soit dans un secteur donné. La qualité des contrats peut alors bénéficier de l’expérience progressivement acquise, sous la réserve bien entendu d’organiser cette capitalisation d’expérience et de permettre de la traduire dans les opérations successives.

    Enfin, en complément aux éléments précédents, l’on peut également s’interroger sur le cadre juridique et financier gouvernant actuellement les PPP, particulièrement au plan local. Tel peut par exemple être le cas en ce qui concerne les régimes de subsides : lorsqu’ils sont conditionnés par une maîtrise d’ouvrage publique, une appropriation publique, etc., leur bénéfice est exclu en cas de PPP. Cela n’est bien entendu pas favorable au développement de tels types de contrats.



    4) Les pistes étudiées pour l’application des PPP

    Concrètement, dans le cadre du nouveau Plan d’investissement wallon annoncé en janvier 2018, outre un comité d’accompagnement, il est également prévu la mise en place de comités financiers et techniques chargés d’étudier pour chaque projet les possibilités de recours aux PPP afin de soulager au maximum l’impact des nouveaux investissements sur le solde SEC wallon.