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Les conséquences potentielles du Brexit pour la Wallonie

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 84 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 20/03/2018
    • de TROTTA Graziana
    • à BORSUS Willy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    Fin septembre 2017, j'interrogeais Monsieur le Ministre-Président sur les effets du Brexit sur la Wallonie, dans la mesure où, selon une étude réalisée par des économistes de la KUL (Hylke Vandenbussche, William Connell et Wouter Simons), notre pays pourrait perdre entre 10.060 et 42.390 emplois selon un Brexit « soft » ou « hard ».

    A l'annonce du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, il a été décidé que la Délégation Wallonie-Bruxelles auprès de l'Union européenne dresse un état des lieux des conséquences potentielles pour les domaines de compétences de la Wallonie.

    Par ailleurs, l'AWEx a réalisé une enquête auprès des entreprises, sur base de laquelle elle devait procéder à l'identification précise des enjeux du Brexit pour ces dernières. Parallèlement, l'Agence a travaillé sur une étude d'impact basée sur les statistiques de la Banque nationale belge et l'IWEPS.

    Aujourd'hui, où en sont ces états des lieux et ces études ? Monsieur le Ministre-Président peut-il faire le point précisément sur les conséquences potentielles du Brexit pour notre Région, compte tenu des analyses effectuées à ce jour ?

    Conformément à ce qui était prévu, notamment dans le cadre de l'état des lieux de la Délégation Wallonie-Bruxelles auprès de l'Union européenne, des recommandations ont-elles été formulées pour les secteurs concernés par le Brexit et, si oui, quelles sont-elles ?
  • Réponse du 17/04/2018
    • de BORSUS Willy

    Je confirme qu’à notre demande, les administrations et UAP wallonnes ont réalisé un exercice d’évaluation de l’impact du Brexit dans leur champ de compétence. Sur cette base, nous avons défini des positions du Gouvernement wallon qui ont été communiquées au Ministre des Affaires étrangères fin 2017 et qui servent de balises dans le positionnement des représentants wallons au sein des instances de coordination intrabelges sur le sujet.

    Les points principaux qui ont été identifiés sont les suivants : nécessité d’assurer une transition fluide, à la fois pour nos concitoyens résidant au Royaume-Uni (RU), nos entreprises, nos chercheurs ou encore nos aéroports. Dans le même temps, le retrait britannique ne doit pas porter atteinte à la pérennité des programmes et politiques structurantes de l’UE comme la cohésion, la PAC, les programmes de soutien à la recherche et l’innovation ou encore les programmes en faveur des PME ou de l’environnement. De plus, il sera important de veiller à éviter toute concurrence déloyale du Royaume-Uni via un désalignement réglementaire à la baisse.

    D’un point de vue strictement économique, en 2016, le RU était le 5e « client » de la Wallonie avec 2,57 milliards d'euros d’exportations (6,6 % du total des exportations wallonnes). Les derniers chiffres disponibles couvrent 9 mois 2017. Nos exportations vers le RU pour cette période s’élèvent à 1,97 milliard d'euros, et enregistrent une croissance de 3,9 % par rapport aux 9 mois 2016.

    Les principaux produits wallons exportés vers le Royaume-Uni (2016) sont :
    1. les produits chimiques et pharmaceutiques (31,6 % du total) ;
    2. les instruments d’optique et de précision (10,9 %) ;
    3. les matières plastiques et caoutchoucs et ouvrages en ces matières (10,3 %) ;
    4. les machines et équipements mécaniques, électriques et électroniques (10,2 %) ;
    5. les métaux communs et les ouvrages en ces métaux (7,9 %) ;
    6. les produits alimentaires, boissons, tabacs (7,8 %) ;
    7. le matériel de transport (5,2 %).

    Ces 7 secteurs représentent 83,9 % de nos exportations vers le Royaume-Uni.

    On pourrait penser que les « produits pharmaceutiques », qui constituent le premier secteur à l’exportation de la Wallonie, sont le plus exposés au BREXIT. En effet, pour la période de référence 2011-2016, ce secteur représente 17,6 % des exportations wallonnes vers le R.U. Toutefois, le R.U n’absorbe que 5,6 % du total des exportations de ce secteur.

    Par contre, la catégorie « Instruments et appareils d'optique, de photographie ou de cinématographie, de mesure, de contrôle ou de précision » ne représente « que » 8,9 % des exportations wallonnes vers le RU mais le RU absorbe 12,4 % du total des exportations du secteur. Il serait donc potentiellement plus touché que le secteur des produits pharmaceutiques, mais l’impact sur le montant total des exportations wallonnes serait moindre.

    Si l’on ne considère que le poids du R.U dans le total des exportations des différents secteurs, le secteur le plus touché serait celui de la navigation aérienne ou spatiale dont 17,6 % des exportations ont pour destination le RU.

    Le premier septembre 2017, l’AWEx faisait par ailleurs parvenir un questionnaire aux 5480 entreprises wallonnes inscrites dans sa base de données. Ce questionnaire visait notamment à interroger les entreprises sur les stratégies potentielles mises en œuvre en vue de limiter les pertes éventuelles. L’AWEx interrogeait également les entreprises sur les mesures qu’elles souhaitaient voir prendre par les autorités régionales en matière d'exportation vers le Royaume-Uni.

    De manière générale, les entreprises ne semblaient pas trop s’inquiéter de l’impact du BREXIT sur leur chiffre d’affaires au RU puisque 41 % d’entre elles s’attendaient à une augmentation de celui-ci et 39 % à un statu quo !

    Les commentaires témoignaient de leur volonté de continuer à travailler le marché britannique, et même à le développer ; pour certaines, d’une confiance dans le caractère spécifique de leur produit qui, d’après elle, devrait continuer à se vendre.

    Les difficultés plus précises auxquelles nos entreprises craignaient d’être confrontées étaient surtout liées, en ordre décroissant, aux formalités et tarifs douaniers, aux risques de change, aux réglementations différentes, à une éventuelle perte de compétitivité des produits, aux barrières non tarifaires. Venait ensuite la concurrence locale et extraeuropéenne accrue.

    À ce stade, il est impossible d’évaluer l’impact précis du BREXIT tant que les négociations ne seront pas terminées et la forme de la relation future avec le Royaume-Uni connue.

    Un groupe de travail BREXIT a été mis en place au niveau fédéral, auquel l’AWEx et les principales fédérations professionnelles ont été associées.

    Au niveau régional, un groupe de travail BREXIT « AWEx - Conseil wallon de l’industrie » a été mis en place, et en novembre dernier l’AWEx a transmis au gouvernement un rapport sur l’Impact potentiel du BREXIT sur l’économie wallonne, son analyse et ses recommandations.

    L’AWEx a également mis en place un helpdesk Brexit et un point d’information BREXIT sur son site Internet.

    Son objectif est d’aider les entreprises wallonnes à s’adapter aux conséquences éventuelles du BREXIT sur l’environnement commercial, économique, juridique et fiscal qui caractérisera l’accès au marché britannique dans le futur. Une collaboration a d’ores et déjà été mise en place avec l’Administration fédérale des douanes et Accises afin de préparer au mieux nos entreprises aux formalités inévitables qui seront liées aux échanges commerciaux avec le Royaume-Uni après sa sortie de l’UE. Une lettre de cette Administration est relayée auprès de nos entreprises, ainsi que des conseils utiles.

    Ainsi l’AWEx recommande aux entreprises :
    - d’évaluer leurs relations commerciales avec le Royaume-Uni et les frais supplémentaires engendrés par le BREXIT, afin de prévoir les moyens financiers permettant d’y faire face ;
    - d’estimer le montant des droits de douane qui s’appliqueraient à leurs produits si les règles de l’OMC entraient en application après le BREXIT (en cas de « no deal ») ;
    - d’évaluer la nécessité de couvrir leurs exportations contre les risques de change, vu la fluctuation des taux impliquant la livre sterling ;
    - d’être attentives aux normes et réglementations afférentes à leurs produits, le Royaume-Uni étant susceptible d’en établir de nouvelles après le BREXIT ;
    - d’évaluer l’importance que revêt pour elles le marché britannique et d’envisager de diversifier leurs marchés à l’exportation en profitant au maximum des conditions favorables qui leur sont proposées par l’AWEx pour leur prospection.

    C’est dans cet ordre d’idées que l’AWEx organisera un séminaire sur le BREXIT le 5 juin 2018 lors des Wallonia Export Days à Louvain-La-Neuve. Son objectif : donner, entre autres, des informations pratiques sur les formalités douanières, les aspects liés à la logistique ou encore la couverture du risque de change.