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La décision du groupe Zalando

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 379 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 26/03/2018
    • de STOFFELS Edmund
    • à JEHOLET Pierre-Yves, Ministre de l'Economie, de l’Industrie, de la Recherche, de l’Innovation, du Numérique, de l’Emploi et de la Formation

    Concernant le coût du travail évoqué par Zalando, l’AWEx et le Ministre de l’Emploi pointe la problématique des travailleurs détachés qui aurait pu fausser la donne en ce qui concerne les comparaisons salariales entre les Pays-Bas et la Belgique.

    Si on parle de personnel local, les salaires sont identiques. Pour Pascale Delcomminette, par rapport à ce qui a été transmis à Zalando la Wallonie est compétitive !

    Monsieur le Ministre n’hésite pas à poser la question des travailleurs détachés :
    « Il faut pousser la flexibilité du travail dans l’e-commerce mais avec de l’emploi local. Je ne suis pas sûr que l’on ne retrouve aux Pays-Bas que des travailleurs néerlandais. Il y a de plus en plus de travailleurs détachés, des Polonais, qui coûtent moins cher que l’emploi local et si c’est comme ça, je ne me battrai pas pour attirer ce type d’emplois ! »
    L’AWEx parle, quant à elle, d’agences de recrutement aux Pays-Bas spécialisées pour ce type d’emplois.

    Les propos avancés constituent une accusation grave. D’où la question, Monsieur le Ministre a-t-il des preuves qu’aux Pays-Bas, on recourt systématiquement à des travailleurs détachés ?

    Pour le reste, a-t-il des contacts avec l’Union européenne pour qu’elle vérifie s’il y a effectivement une concurrence déloyale, voire même frauduleuse ?

    Et qu'en est-il des initiatives wallonnes pour exiger de l’Union européenne qu’on se penche sur les règles du détachement afin de rétablir une concurrence équitable ?
  • Réponse du 19/04/2018
    • de JEHOLET Pierre-Yves

    Alors qu’avec près de 89 dossiers concrétisés, 683 millions d’euros d’investissements et la création annoncée de 2.009 emplois directs qui confirment que l’année 2017 a été un très bon cru en termes d’attraction des investissements étrangers, nous avons appris que le groupe Zalando avait décidé de ne pas s’implanter en Belgique en disqualifiant le site de Dour et le site de Gand qui étaient dans la course avec les Pays-Bas.

    Le constat du recours aux travailleurs détachés aux Pays-Bas ne constitue pas une accusation gratuite. C’est un fait avéré, notamment au regard de la pénurie de main-d’œuvre que connaissent certaines régions des Pays-Bas et spécialement dans le domaine de la logistique, que le pays utilise la règlementation européenne autorisant le détachement de travailleurs. Après étude sur le terrain, la presse a récemment reporté que de nombreuses entreprises néerlandaises profitaient de cette législation dans le cadre d’engagement de travailleurs « blue-collars ».

    Ces faits ont largement été révélés par le journal l’ÉCHO dans un article du 10 mars 2018 intitulé « Les Pays-Bas, un eldorado pour les logisticiens ».

    Cet article constatait que, comparativement à d’autres pays européens, dont la Belgique, une plus grande flexibilité dans les contrats de travail était sans aucun doute un élément qui jouait en faveur des Pays-Bas dans le choix de localisation des groupes logistiques ou d’E-commerce. En effet, près de 20 % des Néerlandais travaillent à temps partiel, contre 9 % chez nous.

    Par ailleurs, le recours à des travailleurs détachés est corroboré par une lettre d’information du plus important syndicat néerlandais, le FNV Bondgenoten. Le syndicat soulignait « qu’un argument largement utilisé par les employeurs pour justifier l’engagement d’intérimaires d’Europe de l’Est, c’est la demande trop forte par rapport à la main-d’œuvre disponible ». Aux Pays-Bas, ces travailleurs porteraient le nom de « fleximigrants ». Au total, ils seraient environ 120.000 dans le pays.

    Contrairement à la Belgique, où c'est essentiellement le secteur du bâtiment qui subit les effets de la directive détachement de personnel, ce recours à de la main-d’œuvre venue d'Europe de l'Est concerne aux Pays-Bas une large palette de secteurs : construction, horticulture, mais aussi la boucherie et la logistique, notamment les centres de distribution.

    Selon des statistiques récemment publiées dans l’ÉCHO, dans le secteur de l'e-commerce, le recours aux travailleurs « flexibles », essentiellement d'Europe de l'Est, a fortement augmenté ces dernières années aux Pays-Bas.

    Toujours selon le FNV Bondgenote, alors que jadis les entreprises y recouraient uniquement afin de pallier des absences pour cause de maladie. Aujourd'hui, près de 70 % des travailleurs de nuit dans les centres de distribution hollandais sont des « travailleurs flexibles », autrement dit des intérimaires. Parmi ceux-ci, entre 30 et 70 %, selon les entreprises, sont des travailleurs amenés d'Europe de l'Est.

    Au niveau européen, plusieurs initiatives ont été développées pour lutter contre la concurrence déloyale. Dans le cadre du « Paquet mobilité », l’actuelle Commission Juncker a proposé une révision des règles de la directive détachement de 1996 (96/71), avec l’ambition fondamentale de consacrer le principe de salaire égal pour travail égal sur le même lieu de travail. Par ces modifications, la proposition de la Commission entend lutter contre le dumping social. Après un accord au Conseil des ministres Emploi et Affaire sociale du 23 octobre 2017, le processus de négociation s’est poursuivi entre Conseil et Parlement européen. Il est actuellement en voie de finalisation. Cette directive permettra, nous l’espérons, d’œuvrer à un « fair level playing field » au sein du marché intérieur.

    Plus récemment, la Commission a lancé le 13 mars dernier des nouvelles initiatives dans le cadre du « Social Fairness Package », visant à renforcer convergence sociale vers le haut. Elle a ainsi proposé, via un règlement, la création d’une nouvelle Autorité européenne du travail. Les négociations sur cette nouvelle proposition législative n’ont pas encore débuté au niveau du Conseil de l’Union européenne. Notons toutefois déjà que cette agence aurait parmi ses missions :
    - la facilitation de l’accès à l’information aux citoyens et employeurs sur les droits et obligations dans les situations transfrontalières et accès à des services compétents en matière de mobilité du travail transfrontalier ;
    - la facilitation de la coopération et l’échange d’information entre les autorités nationales ;
    - la coordination et le soutien des inspections concertées et conjointes ;
    - la production d’analyses et évaluations des risques sur les questions de mobilité du travail transfrontière ;
    - le soutien aux États membres dans leur capacité en matière d’application effective du droit européen ;
    - la médiation dans les différends entre les autorités des États membres sur l’application du droit de l’Union ;
    - la facilitation de la coopération entre les parties prenantes pertinentes en cas de perturbations du marché du travail transfrontière (par ex. en cas de restructuration d’entreprise).