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Les violences à l'égard des personnes handicapées

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 309 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 28/03/2018
    • de BONNI Véronique
    • à GREOLI Alda, Ministre de l’Action sociale, de la Santé, de l’Egalité des chances, de la Fonction publique et de la Simplification administrative

    Le 23 février dernier, un journal télévisé ouvrait son édition avec une histoire interpellante. Celle de Ionela, une jeune femme avec un handicap intellectuel dont la famille vient de déposer plainte pour agression sexuelle contre un éducateur du centre de jour qu'elle fréquente.

    Suite à cette plainte, la direction du service de jour a décidé d'exclure sa résidente. Motif : rupture de confiance et atteinte à la réputation de l'institution.

    Pour la victime présumée, c'est une double peine. Sur le fond, il reviendra à la justice de se prononcer, mais le traitement réservé à cette situation soulève de nombreuses questions.

    Des résidents ou des parents qui expriment des plaintes, pour des faits plus ou moins graves et qui se voient exclus d'une institution du jour au lendemain, malheureusement c'est fréquent. Au vu du manque de places et d'alternatives pour accueillir la personne, les familles réfléchissent à deux fois avant de dénoncer des situations problématiques. C'est donc souvent la loi du silence qui prévaut.

    Pourtant la parole des personnes handicapées, mais aussi de leur famille doit être entendue, même, et peut-être surtout, si elle dérange. Elles semblent aujourd'hui trop vite, et trop facilement exclues si elles expriment un mécontentement ou critiquent le service qu'elles fréquentent. Selon les professionnels du secteur, l'AViQ semble désarmée face à ces situations et manque de moyens de sanctions adéquats. Si l'agence estime une situation abusive, elle peut éventuellement suspendre l'agrément du service ou, en dernier recours, le retirer.

    Mais ces mesures manquent le plus souvent leur but ou de proportionnalité : la suspension n'a pas réellement d'impact puisqu'il s'agit simplement de retarder l'octroi du subside alors que le retrait d'agrément signifie la fermeture du service, avec des conséquences directes pour tous ses usagers.

    Que peut faire l'AViQ face à de telles situations jugées abusives ?

    N'est-il pas envisageable, comme cela se fait en Flandre, d'inverser le rapport de force en attribuant directement le montant à la personne et non au service ?

    Enfin, des initiatives sont-elles prises afin d'encourager les personnes handicapées et leurs familles rencontrant un problème à en parler ?
  • Réponse du 05/04/2018
    • de GREOLI Alda

    Le cas de Ionela a défrayé la chronique au début de cette année et à raison. Cette jeune femme en situation de handicap s’était plainte auprès de ses parents d’attouchements sexuels de la part d’un éducateur.

    Les parents avaient ensuite déposé plainte au Parquet et à l’AViQ. Les gestionnaires ont alors décidé de son exclusion invoquant une rupture de confiance.
    Comme le souligne l'honorable membre, il s’agissait là pour la victime, d’une double peine.
    Je me suis personnellement impliquée dans ce dossier.

    Des sanctions ont été prises. L’agrément de cet établissement a été limité à un an et un plan d’actions a été imposé. L’agrément ne sera reconduit que si les gestionnaires démontrent qu’il a été mené à bien. Concrètement il s’agira pour cet établissement de régulariser le contenu de ses conventions d’accueil notamment quant aux modalités de préavis, d’organiser des supervisions d’équipes autour de cet événement traumatisant, d’organiser des formations à l’intention de son staff de direction sur les thématiques relatives à la gestion de crise et des incidents en intégrant les notions de neutralité, de confiance, d’écoute et d’empathie. Des procédures de gestion des cas d’abus ou de suspicion d’abus sexuels, inspirées de ces concepts, devront ensuite être mises au point. Le personnel devra y être sensibilisé.

    Ceci étant dit, l’arsenal des sanctions reste effectivement limité puisqu’outre la limitation dans le temps de l’agrément, il restait sa suspension ou son retrait immédiat. L’un et l’autre auraient eu des conséquences injustement dommageables pour les autres bénéficiaires ainsi que pour le personnel de cette association.

    J’ai donc choisi d’opter pour une solution intermédiaire de manière à laisser une possibilité pour ce service de recadrer son organisation et ses valeurs.

    J’ai en même temps demandé à l’AViQ de préparer des propositions allant dans le sens de sanctions réparatrices et proportionnées aux infractions constatées. Ce travail est complexe. Il devra prendre en compte la notion de pertinence de telle ou telle sanction, à savoir si elle atteint efficacement son objectif. Mais cela demande également une étude juridique particulière dans la mesure où un système d’amendes administratives devra probablement être exploré. Un tel système répressif spécifique implique que doivent être soigneusement étudiés les droits et pouvoirs des fonctionnaires qui infligent ces amendes, les droits de la défense, les éléments de faits et de droit qui interviennent dans la détermination de la hauteur de la sanction, les délais de prescriptions ainsi que les possibilités de recours, etc.

    Par ailleurs, j’ai également demandé qu’un groupe de travail se constitue pour se pencher sur des recommandations concernant les pratiques à mettre en œuvre pour prévenir et traiter la question des suspicions d’abus sexuels. Ces recommandations seront construites avec le soutien des associations représentatives des personnes en situation de handicap. Elles seront par la suite diffusées à l’ensemble des établissements.

    Enfin, pour répondre à une autre des questions, des mesures sont en cours afin de faciliter la prise de parole des personnes et de leurs proches lorsqu’un problème se pose. Un projet d’arrêté prévoit l’organisation, en première ligne, du traitement des réclamations par la désignation d’un référent au sein même de l’établissement. Ce référent doit être identifié et connu de toutes les familles. L’existence même de ce dispositif, inspiré des normes internationales iso 10002 du Management de la qualité, dédramatise la démarche et vise à encourager les bénéficiaires à exprimer leurs insatisfactions. La réclamation étant perçue comme une opportunité de s’améliorer.