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Le CETA

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 93 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 18/04/2018
    • de STOFFELS Edmund
    • à BORSUS Willy, Ministre-Président du Gouvernement wallon

    L’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne sur les tribunaux d’arbitrage privé dans les traités commerciaux bilatéraux des États membres conclut que la clause d’arbitrage incluse dans l’accord entre la Slovaquie et les Pays-Bas sur la protection des investissements n’est pas compatible avec le droit de l’Union.

    Les partisans de la fronde wallonne de 2016 contre une partie des dispositions du CETA, ont salué cet avis. Le Président du Parlement de Wallonie s'en est même réjoui.

    Le syndicat chrétien (CNE) qui rappelle que « le principal acquis du combat wallon de 2016 a été d’obtenir que la Belgique introduise une demande d’avis à la CJUE sur le tribunal arbitral du CETA » estime qu’il est de plus en plus vraisemblable que le tribunal arbitral du CETA sera lui aussi recalé par la CJUE.

    Que signifie cet arrêt de la Cour européenne pour le CETA ?

    Monsieur le Ministre-Président partage-t-il l’enthousiasme du Président du Parlement de Wallonie à la lecture de l’arrêt ?

    En tire-t-il les mêmes conclusions ?
  • Réponse du 14/05/2018
    • de BORSUS Willy
    La Cour de Justice de l’Union européenne, saisie par le Bundesgerichtshof (la Cour fédérale de justice de la République fédérale d’Allemagne), s’est prononcée le 6 mars sur la compatibilité avec le droit européen de la clause d’arbitrage – en l’occurrence, un ISDS - incluse dans l’accord conclu entre les Pays-Bas et la Slovaquie sur la protection des investissements. La Cour a conclu que la clause d’arbitrage contenue dans ce traité bilatéral de protection des investissements (TBI) porte atteinte à l’autonomie du droit de l’Union et, partant, n’est pas compatible avec celui-ci. La Cour considère que cette clause soustrait au mécanisme juridictionnel du droit de l’Union des litiges pouvant porter sur l’application ou l’interprétation de ce droit.

    On relèvera également que la Cour n’a pas suivi les conclusions de l’Avocat général qui estimait que les articles 18, 267 et 344 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ne font pas obstacle à l’application d’un mécanisme de règlement des différends entre un investisseur et un État instauré au moyen d’un accord bilatéral d’investissement conclu avec l’adhésion de l’un des États contractants à l’Union européenne et prévoyant qu’un investisseur d’un État contractant peut, en cas de litige concernant des investissements dans l’autre État contractant, introduire une procédure contre ce dernier État devant un tribunal arbitral.

    Cet arrêt remet inévitablement en cause tous les mécanismes d’arbitrage contenus dans les traités de protection des investissements conclus entre États membres de l’Union européenne. On compte 196 traités de ce type en vigueur entre les États membres de l’Union européenne. La Belgique possède 13 traités de ce type conclus au titre de l’Union économique belgo-luxembourgeoise avec la Bulgarie, Chypre, la Croatie, l’Estonie, la Hongrie, la Lituanie, la Lettonie, Malte, la Pologne, la République tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie.

    Ce débat juridique s’inscrit, comme souvent, vraisemblablement au moins partiellement dans un contexte politique. La Commission européenne et bon nombre des pays d’Europe centrale et orientale sont favorables à la disparition des traités bilatéraux d’investissements au sein de l’Union européenne. La Belgique a une position plus pragmatique. Les traités bilatéraux d’investissements ont rendu et rendent encore service à nos entreprises au sein de l’Union européenne également.

    Le Ministre des Affaires étrangères et son administration sont en train d’analyser les conséquences de cet arrêt. Il convient de rappeler que celui-ci ne concerne que les traités d’investissement bilatéraux entre États membres de l’Union européenne et n’a pas de lien évident avec les accords commerciaux entre l’Union européenne et les pays tiers, donc pas davantage avec le mécanisme d’arbitrage ICS prévu dans le CETA et pour lequel un avis de la Cour de Justice relatif à sa compatibilité avec les Traités a été demandé par la Belgique. Nous devrions disposer de cet avis au début de 2019.