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Le prix de l'électricité

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 228 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 19/04/2018
    • de STOFFELS Edmund
    • à CRUCKE Jean-Luc, Ministre du Budget, des Finances, de l'Energie, du Climat et des Aéroports

    Quels pourraient être les effets négatifs dus à la fermeture de toutes les centrales nucléaires belges (d’ici 2025) ?

    L’ancien directeur adjoint de l’Agence internationale de l’énergie atomique et responsable de la non-prolifération des armes nucléaires dans le monde :
    « Un effet négatif sur le coût de la production de l’électricité.
    Un sur notre balance des paiements (dû à l’importation de gaz, alors que le coût du combustible nucléaire importé est minime).
    Un sur notre sécurité d’approvisionnement (notre stock de combustibles nucléaires est de 2 ans de besoins alors que pour le gaz naturel il est de moins d’un mois de consommation belge).
    Un sur l’environnement en augmentant significativement nos émissions de gaz à effet de serre. Paradoxalement ce dernier point ne semble pas préoccuper Greenpeace qui ne s’intéresse qu’à prévoir le prix du gaz dans 10 ou 20 ans. Je doute que les nouvelles études qu’on nous annonce puissent remettre ces quatre effets en doute.
    Dans ces conditions, en sachant qu’en 2025, nos premières centrales (Doel 1 et 2, Tihange 1) auront fonctionné pendant 50 ans, pourquoi faudrait-il fermer nos centrales les plus modernes et les plus sûres (Doel 4 et Tihange 3) après 40 ans seulement, tant que nos autorités de sûreté ne s’opposent pas à leur fonctionnement pour des raisons objectives de sûreté ou de sécurité ? La raison serait qu’il y a la loi et la loi qu’on respecte. »

    Rappelons-nous le débat concernant le risque d’une hausse des prix du MWh au cas où les centrales nucléaires viendraient à fermer et devraient être remplacées par des alternatives (gaz, importation, renouvelable) ayant un impact sur les prix.

    Puis-je demander à Monsieur le Ministre où se place le curseur concernant une hausse de prix toujours acceptable tant pour le client résidentiel que pour l’entrepreneur ?
  • Réponse du 08/05/2018
    • de CRUCKE Jean-Luc
    Permettez-moi de rappeler un élément essentiel de la philosophie du pacte : « … Dans cette perspective, des politiques et mesures doivent être adoptées afin de permettre une transition ambitieuse et progressive, capable d’assurer, à tout instant, une capacité d’approvisionnement suffisante pour couvrir la totalité de la demande, et ce à un coût maîtrisé ».

    La maitrise du coût, tant pour l’industrie que pour le ménage est un élément central de la transition. Nous serons attentifs à ce que nos choix optimisent l’impact sur la facture à court, moyen et long terme. Or, au plus nous tardons à investir dans d’autres moyens de production, au plus le coût est susceptible d’augmenter.

    Par ailleurs, la sortie du nucléaire doit également être considérée à moyen et long terme, tout en intégrant l’ensemble des coûts, dont ceux portés par la société dans sa globalité. Nous avons déjà abordé cette question lors de précédentes interventions, mais laissez-moi prendre comme exemple l’absence d’assurance en cas d’accident nucléaire. Aucun assureur privé ne peut assumer le risque associé. C’est donc l’État, et partant le contribuable, qui assume celle-ci. Il est pour moi important d’avoir ces éléments à l’esprit lorsque nous parlons de coût lié à la sortie du nucléaire et je ne parle pas à l’honorable membre des dommages qu’un accident pourrait produire.

    Concernant les autres coûts liés à la sortie du nucléaire en 2025, deux études avaient été menées dans le cadre des réflexions autour du Pacte énergétique, à savoir l’étude du Bureau fédéral du Plan et l’étude du Professeur Albrecht. Ces études montraient notamment la forte sensibilité au prix du gaz et au prix de la tonne de CO2.

    Sur base de ces études, ma collègue Marie-Christine Marghem précisait en Commission de l'Économie, de la Politique scientifique, de l'Éducation, des Institutions scientifiques et culturelles nationales, des Classes moyennes et de l'Agriculture le 14/03/2018, qu’un surcoût de 5 euros par MWh a pu être évalué, qui aboutit, je la cite, à « un coût de 15 euros HTVA par ménage par an, pour le segment pur et circonscrit de la construction des centrales à gaz nécessaires pour la sortie du nucléaire ». Toujours selon elle, « Ce coût servait à montrer la direction et pour montrer que la sortie du nucléaire est tenable, qu'elle est supportable financièrement pour les ménages et qu'elle peut être envisagée sans difficulté pour pouvoir passer à notre transition énergétique ». Elle ajoute enfin, « En ce qui concerne le coût pour les entreprises, il est évidemment significatif puisqu'elles consomment beaucoup plus annuellement que le ménage moyen. Si vous multipliez cette évaluation par la consommation des entreprises, vous débouchez sur des chiffres auxquels elles devront consentir dans le cadre de la transition énergétique. Ce sera plus difficile pour celles dont la consommation en électricité est très élevée ou dont l'intensivité est très forte; ce qui relève de deux situations distinctes ».

    La prolongation du nucléaire entrainerait la nécessité de nouveaux investissements nucléaires qui seraient également répercutés sur la facture des consommateurs. Une hausse de prix serait par conséquent inévitable.

    Ensuite, à terme (en 2035 si une prolongation est envisagée pour 10 ans), les investissements dans des centrales au gaz seraient de toute façon nécessaires avec comme conséquence la hausse du coût de l’électricité. Un impact sur la facture énergétique sera inévitable à terme.

    Enfin, il y a lieu de considérer le cadre européen dans sa globalité. La plaque européenne est aujourd’hui en surcapacité, ce qui pousse les prix vers le bas. Or, nous savons tous que dans les 10 à 15 ans à venir, une bonne partie du parc électrique actuel devra être remplacé : le nucléaire allemand ; une partie du nucléaire français ; le charbon devrait être mis sous pression (du moins si l’Europe vise la neutralité carbone)... L’évolution du parc européen et des interconnexions sera déterminante sur la formation des prix sur les marchés, bien au-delà du seul maintien éventuel de 2GW de nucléaire sur sol belge. L’exercice d’estimation d’augmentation du prix en raison de la sortie du nucléaire doit donc être considéré comme indicatif et s’envisager dans un contexte global dont un nombre non négligeable de paramètres ne dépendent pas de nos propres choix.

    Une surveillance de l’évolution du prix est indispensable pour pouvoir accompagner les consommateurs les plus sensibles aux évolutions. Des mesures adéquates devront alors être prises, comme le précise d’ailleurs le pacte. Les consommateurs les plus sensibles visés en priorité sont les entreprises électro-intensives et les ménages précarisés. Nous veillerons à maitriser les fluctuations de prix par divers outils.