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La limitation du réchauffement climatique

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 268 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 02/05/2018
    • de STOFFELS Edmund
    • à CRUCKE Jean-Luc, Ministre du Budget, des Finances, de l'Energie, du Climat et des Aéroports
    On est loin de la trajectoire que l’on devrait atteindre pour arriver à l’objectif de limitation du réchauffement climatique à + 2 °C. Les émissions humaines devraient décliner à partir de 2025 et fortement diminuer ensuite pour être réduites de 50 % en 2040.

    À la faveur de la transition énergétique, on passe d’un modèle où les coûts variables sont importants à un modèle où les investissements de départ sont importants, mais sont regagnés ensuite par des coûts de fonctionnements réduits. (Installer des panneaux photovoltaïques, isoler sa maison, acheter une voiture électrique ça coûte de l’argent directement, mais ça réduit les factures futures).

    La transition va coûter cher de 19 à 21 milliards de dollars d’ici 2030. Le financement est un énorme problème.

    Les pays mettraient en place un coût du CO2 sur leur marché, 35 dollars la tonne demain, 50 ou 80 par la suite. Cette taxe dirigera les investissements vers des technologies propres.

    Ce qui est clair, c’est que ce que l’on peut payer aujourd’hui réduira fortement les dépenses de demain. D’où l’importance de ne pas postposer à demain ce que je peux réaliser aujourd’hui.

    C’est simple, mais cela ne correspond pas aux habitudes politiques qui ont tendance à reporter les efforts à demain. D’où l’intérêt de programmer les investissements sur base d’un calendrier à fixer dès à présent.

    Alors, peut-on connaître la programmation des travaux en la matière pour les années à venir ?
  • Réponse du 07/05/2018
    • de CRUCKE Jean-Luc
    Je vais tenter de répondre à la question de l’honorable membre sur les principes généraux évoqués. En effet, les sources de ses affirmations chiffrées ne sont pas mentionnées dans sa question.

    L’Accord de Paris indique que « les Parties cherchent à parvenir au plafonnement mondial des émissions de gaz à effet de serre dans les meilleurs délais (…) » afin d’atteindre « un équilibre entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre au cours de la deuxième moitié du siècle (…) ». En outre, l’Accord prévoit également un mécanisme de révision des engagements à la hausse des pays tous les cinq ans pour répondre à cet objectif. Finalement, nous attendons actuellement les conclusions du rapport spécial du GIECC sur les 1,5°C, notamment sur les budgets d’émissions, car c’est la science qui doit guider nos travaux.

    Dans le cadre de l’Accord de Paris, l’Union européenne s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre d’au moins -40 % d’ici 2030. Cet objectif est décliné par une série de véhicules et de législations européennes dont la majeure partie se trouve dans le « Clean Energy Package »de l’Union de l’Énergie, qui comprend au total huit directives et règlements (relatifs aux énergies renouvelables, à l’efficacité énergétique, à la performance du bâtiment, etc.). D’autres textes européens sont également concernés et traitent notamment du CO2 dans les voitures et les camionnettes, d’économie circulaire, etc.

    Plus précisément et comme j’ai eu l’occasion de le présenter à de nombreuses reprises au sein de notre commission, d’ici la fin de cette année, la Belgique doit soumettre un « Plan national énergie climat » à l’horizon 2030 (le PNEC). À ce titre, la Belgique doit réduire ses émissions de GES de -35 % en 2030 par rapport à 2005 dans le secteur non-ETS. Nos équipes au Gouvernement élaborent actuellement la programmation des politiques et mesures que nous adopterons. Elles viseront l’ensemble de nos activités consommatrices d’énergie : transport, bâtiment, industrie, production d’électricité.

    Plus spécifiquement sur la question du coût de la transition, je partage son constat qui est qu’il est moins coûteux pour la société d’investir sans attendre dans la transition vers une société bas carbone, que de le faire plus tard. C’est d’ailleurs également dans cette logique que je soutiens la sortie du nucléaire. En matière de développement durable, la question de savoir quelle génération supportera le coup de l’action ou de l’inaction politique se pose systématiquement. Si la transition a un coup à court terme, il nous revient également de chercher à atteindre une forme d’optimum économique sur base de notre connaissance actuelle. C’est l’exercice d’équilibriste que nous tentons de mener pour déterminer notre programmation à 2030.C’est pourquoi les mesures que nous adopterons seront équilibrées entre ambition et pragmatisme. Pour établir cette programmation au-delà de 2030, nous devrons prendre rendez-vous d’ici une dizaine d’années et repartir de la connaissance que nous aurons à ce moment-là, tout en gardant le cap de l’Accord de Paris et du Pacte énergétique à 2050.

    Le principe de pollueur payeur consiste à ce que les acteurs économiques responsables de dommages environnementaux et d’impacts sociétaux en supportent la charge. De plus en plus de voix, notamment dans les cénacles internationaux tels que l’OCDE, s’accordent à dire que le système économique actuel n’internalise pas justement les externalités entrainées par nos activités, ou, pour le dire autrement, les dommages causés par certaines activités (visons ici les émissions de GES) ne sont pas supportés par les responsables, mais par l’ensemble de la collectivité. Une manière d’internaliser celles-ci consiste à mettre en place un mécanisme de tarification carbone qui a pour conséquence que celui qui émet plus de GES paie plus que celui qui en émet moins, à service équivalent. Cette internalisation génère un double dividende puisqu’elle rend les options moins émettrices plus compétitives et permet d’avoir des recettes utiles à réaliser d’autres investissements moins émetteurs. On peut alors considérer que la discrimination due à cette non-internalisation donnait un avantage compétitif aux options plus émettrices. Le pacte mentionne cette tarification carbone et je soutiens moi-même l’idée que la transition, qui comporte en grande partie des changements de comportement de la part des acteurs économiques que nous sommes, doit pouvoir mettre en œuvre ce principe de pollueur payeur. Des acteurs du monde économique eux-mêmes nous y invitent, tels que la FEB.

    Rappelons juste qu’il y a lieu de faire la distinction entre le secteur ETS (Emission Trading Scheme, ou le mécanisme d’échange de quotas d’émissions européen) et le non-ETS qui couvre le bâtiment, le transport, la petite industrie (en dessous de 20MW thermique) et l’agriculture. Lorsque je parle de tarification carbone, je vise en particulier le non-ETS.