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L’impact des pratiques culturales sur les coulées de boue

  • Session : 2017-2018
  • Année : 2018
  • N° : 528 (2017-2018) 1

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  • Question écrite du 05/06/2018
    • de PREVOT Patrick
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région
    On a parfois l’impression qu’aujourd’hui, le monde agricole est devenu une espèce de coupable universel, responsable de tous les maux de l’environnement.

    Ainsi, la semaine dernière, nous avons connu de nombreux orages et de fortes pluies qui ont entraîné des inondations et des coulées de boue importantes, un peu partout en Wallonie.

    Certains riverains ont alors accusé les agriculteurs comme étant responsables de ces coulées de boue, leur reprochant de ne pas avoir pris les mesures adéquates pour retenir ces eaux qui dévalent de leurs terres. Des agriculteurs, qui rappelons le toutefois, sont eux-mêmes victimes de ce climat peu favorable pour leur culture et pour qui la terre est un outil de travail.

    Selon l'analyse de Monsieur le Ministre, quel est l’impact des pratiques culturales sur les coulées de boue ? Le cas échéant, comme le limiter ?

    L’utilisation des engins modernes tassent les premières couches du sol, les rendant plus compact. Quand elles se détachent, c’est par blocs entiers.

    Y a-t-il un moyen de lutter contre ce phénomène ?

    Peut-on déjà quantifier l’impact de ces pluies sur les rendements ?
  • Réponse du 07/06/2018
    • de COLLIN René
    Les évènements pluvieux et orageux de ce mois de mai ont en effet cette année encore fait les unes des journaux en raison des coulées boueuses qui en résultent.

    Ces dernières se produisent préférentiellement en présence des facteurs suivants : une pluie intense, un sol pauvre en matière organique, une pente forte ou longue, une faible couverture du sol, une taille de parcelles importante. Les orages sont particulièrement problématiques dans le cas des cultures de printemps à large écartement tels que les pommes de terre, le maïs,… En effet, vu leur implantation récente, ces cultures sont encore peu couvrantes : l’effet érosif de la pluie sur le sol est donc maximal.

    Localement, certaines pratiques peuvent également conduire à une augmentation du risque d’érosion, comme la suppression des petits éléments du paysage (haies, talus herbeux, fossés, et cetera) ou le non-respect des bords de champs ainsi que la conversion de prairies en terre de culture suite à la crise de l’élevage. Il existe certaines pratiques spécifiques qui permettent de retenir les eaux et de réduire leur force érosive de l’eau : la création de diguettes dans le creux des buttes en culture de pommes de terre et la création de rugosité dans les interrangs en maïs.

    Les importantes quantités de terre transportées par les coulées boueuses proviennent de phénomènes localisés et sont dues à une érosion par ravinement. La perméabilité des sols peut également être réduite par leur compaction due à la lourdeur des engins de travail du sol ou de récolte, à du travail en conditions trop humides ou à l’apparition d’une croûte de battance à la surface du sol suite à un manque de couverture végétale ou à une mauvaise structure du sol.

    Le Gouvernement wallon soutient depuis plus de 10 ans la recherche et l’encadrement dans le domaine de l’érosion des sols et des risques d’inondation par coulées boueuses. Une réflexion est en cours afin de développer des outils d’aide à la décision, indispensables pour assurer l’opérationnalité de l’encadrement fourni par la Direction générale opérationnelle de l'agriculture, des ressources naturelles et de l'environnement (DGO3) et la cellule GISER (gestion intégrée sol-érosion-ruissellement) aux communes et aux agriculteurs.

    En cinq ans, la cellule GISER a accompagné 120 communes et a étudié plus de 700 sites problématiques sur 26 000 hectares. D’après l’enquête de satisfaction réalisée en 2015, les conseils et l’encadrement fournis semblent satisfaire les « bénéficiaires ».

    De plus, un vade-mecum rédigé par mon administration sera bientôt disponible afin d’orienter les communes au travers des différents services du Service public de Wallonie en charge de la gestion des inondations et des coulées boueuses. Par ailleurs, des séances de formation et d’information sont régulièrement organisées pour les communes, les conseillers en environnement ou les Comités techniques par sous-bassin hydrographique.

    En termes de prévention, depuis l’entrée en vigueur du Code du développement territorial (CoDT) en juin 2017, mon administration (Département de la ruralité et des cours d’eau) remet un avis sur toute demande de permis d’urbanisme soumis à un risque d’inondation et peut recommander l’adaptation du projet pour réduire ce risque d’inondation.

    La cellule GISER conseille également les agriculteurs sur les diverses pratiques culturales permettant de diminuer le risque érosif en favorisant un maintien permanent d’un couvert végétal comme l’installation de cultures intercalaires, le maintien des prairies sur les parcelles à risque et sur les axes de concentration des écoulements, l’installation de bandes enherbées en bordure de parcelles, les techniques de travail du sol sans labour, l’apport de matière organique, …

    L’ASBL Greenotec, active depuis plusieurs années, encadre les agriculteurs soucieux de s’investir dans des techniques de travail du sol dites « simplifiées », limitant de fait le risque d’érosion.

    L’aménagement foncier rural intègre désormais, dans tout périmètre de réorganisation du parcellaire agricole, la gestion du risque d’inondation, notamment par la conservation de zones enherbées aux endroits stratégiques et intervient également sur l’emprise publique (digues de rétention, zones d’immersion temporaire).

    Il n’est pas encore possible d’estimer les pertes sur les cultures qui peuvent être liées aux grêlons, aux coulées de boue ou à des stagnations d’eau (destructrices pour les pommes de terre par exemple). Ces pertes dépendent du type de cultures et de leurs stades de développement et ne sont pas visibles immédiatement. Jusqu’à présent, huit communes ont sollicité leur commission agricole de constat de dégâts pour une évaluation.