Les loyers impayés au sein des sociétés de service public (SLSP)
Session : 2017-2018
Année : 2018
N° : 359 (2017-2018) 1
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Question écrite du 06/06/2018
de TZANETATOS Nicolas
à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
Entre 2014 et 2015, le nombre d’expulsions prononcées de ménages bénéficiant de logements sociaux a quadruplé pour La Sambrienne atteignant le chiffre de 191 familles expulsées.
Ce chiffre alarmant concernant la plus grande société de logement de service public (SLSP) de la Région wallonne tend à démontrer que le système actuel ne protège pas suffisamment l’allocataire social et le met dans des situations d’extrême précarité lorsqu’il faut en arriver à l’expulsion exécutée.
En province de Hainaut et de Liège, le nombre d’expulsions prononcées a doublé entre 2014 et 2015 portants à 315 le nombre de ménages qui se sont vus signifier une décision d’expulsion par la justice. Au-delà de ces expulsions signifiées, plus de 3 000 dossiers étaient également en cours en 2015 devant les tribunaux pour une demande d’expulsion.
En outre, il faut également ajouter à ces expulsions, un arriéré de paiement considérable pour les SLSP. En effet, selon les chiffres de la Société wallonne du Logement (SWL), le montant total des arriérés s’élève à 12 millions d’euros, ce qui représente 7,4 % du chiffre d’affaires annuel. Elle estime par ailleurs que 25 % des locataires sont concernés par des retards de paiement. Cela empêche les SLSP d’entretenir correctement le parc existant, coûte énormément d’énergie en travail administratif et judiciaire, et de surcroit, n’incite pas bon nombre de partenaires privés à mettre leur bien en location pour des personnes en situation de précarité.
Quelles sont les statistiques actuelles pour l’ensemble de la Wallonie ?
Quelles démarches ont été mises en place au niveau wallon pour éviter d’en arriver à des situations extrêmes d’expulsion ?
Les arriérés de loyers dans les sociétés de logement de service public font l’objet de fréquentes questions. Ils constituent en effet, un réel problème pour le bon fonctionnement des sociétés et sont un reflet des difficultés sociales vécues par leurs locataires. Préalablement à toute analyse détaillée, il convient de rappeler que les données concernant les arriérés, comme la plupart des informations à caractère économique ou financier relatives aux SLSP sont issues de la comptabilité de celles-ci. Les comptes étant approuvés lors des assemblées générales prévues avant la fin du premier semestre suivant l’exercice comptable, il est normal que les données ne soient disponibles qu’avec un décalage dans le temps. Voici les chiffres validés les plus récents dont dispose la Société wallonne du Logement (SWL) ; ils sont arrêtés au 31 Dec 2016 : voir graphique n°1, en annexe.
La comptabilité des SLSP vise avant tout à dresser un tableau fidèle de leur situation économique. Les montants cités reflètent donc autant le comportement comptable des SLSP – en particulier leurs modalités de gestion des créances irrécouvrables – que les difficultés de paiement vécues par leurs locataires. Il est donc particulièrement délicat de tirer de ces données de gestion comptable, des conclusions d’une valeur sociologique indubitable.
Après une période de hausse constante entre 2005 et 2009, le total des arriérés locatifs enregistrés dans la comptabilité des SLSP a diminué entre 2010 et 2012 avant de connaître une recrudescence jusqu’en 2014. Les années 2015 et 2016 voient cependant ce montant diminuer à nouveau de manière significative (voir graphique n°1 en annexe).
On observera néanmoins que le montant d’arriérés des locataires en place décroît de façon constante depuis 2009, tandis que l’arriéré total des locataires partis est, quant à lui, en hausse depuis 2010. Cette évolution s’explique notamment par une gestion plus rigoureuse de la part des SLSP, tant en matière de résiliation des baux pour non-paiement, qu’en termes de recouvrement des montants qui restent dus par les locataires après leur départ. Les efforts consentis, en cette matière, par les sociétés de logement semblent donc porter leurs fruits. Le nombre de locataires en place en retard de paiement a stagné entre 2009 et 2013, est reparti à la hausse en 2014 pour diminuer à nouveau depuis 2015. On comptait 20.660 de locataires dans cette situation au 31 Dec 2016, soit 22 % d’entre eux (voir graphique n°2 en annexe).
En 2016, les arriérés représentaient 6,57 % du chiffre d’affaires des SLSP.
Afin de réduire les arriérés locatifs, ou du moins d’en limiter la croissance, tout en restant attentif à la situation du public en difficulté de paiement, les SLSP ont développé une gestion proactive, tant en matière d’accompagnement social (contentieux amiable) que de résiliation des baux pour non-paiement (contentieux judiciaire), qu’en termes de recouvrement des montants qui restent dus par les locataires après leur départ. Concomitamment, les SLSP mettent de plus en plus l’accent sur une approche préventive de la « lutte contre les impayés », dès le premier retard locatif (loyer, charges…). L’approche développée par les référents sociaux et autres collaborateurs des SLSP considère la personne dans sa globalité et travaille sur des pistes de solution adaptées à long terme au vu des problématiques spécifiques et du cumul des difficultés rencontrées par le public : * Organisation de rencontres (entretiens personnalisés, visites à domicile…) afin de cerner l’ensemble des difficultés avec l’implication active des personnes ; * Orientation vers les services adaptés en fonction des problématiques identifiées (médiation de dettes, règlement collectif, administration provisoire…) ; * Renforcement des coordinations entre services internes et partenaires externes autour des situations problématiques avec le consentement des personnes…
Le nombre d’expulsions, qui avait connu un pic en 2015, tant en nombre de jugements prononcés qu’en nombre de jugements exécutés, a retrouvé, en 2016, un niveau moindre. Comme l’indiquent le tableau et le graphique n°3 en annexe, 993 jugements d’expulsions ont été prononcés en 2016 à l’encontre de locataires de logements apparentant à des SLSP ; 377 de ces jugements ont dû être exécutés.
L’expulsion effective d’un plus grand nombre de locataires en retard de paiement ne constitue pas une solution satisfaisante à la problématique. Le recours systématique à ce moyen serait contraire à l’objectif social visé par les sociétés, mais aussi peu efficient en termes de recouvrement. Sur un plan strictement pratique, il est en effet bien plus difficile de récupérer une créance auprès d’un ex-locataire avec qui tous les contacts sont rompus que d’assurer la bonne exécution d’un plan d’apurement par un locataire motivé par le souhait de conserver son logement.
Ceci explique que beaucoup de jugements prononcés ne sont pas exécutés ; le locataire ayant entretemps soldé sa dette ou entamé le remboursement de celle-ci dans le respect du plan d’apurement proposé.
Sur base de ces constats et analyses, il paraît donc essentiel de poursuivre le soutien aux SLSP et à leurs référents sociaux pour prolonger une politique proactive et intégrée d’accompagnement dans et par le logement, au sein de chaque territoire, pour plus de cohésion sociale et moins de précarité.