La toxicité des produits d'entretien utilisés au sein de l'administration wallonne
Session : 2017-2018
Année : 2018
N° : 430 (2017-2018) 1
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Question écrite du 12/06/2018
de MAROY Olivier
à GREOLI Alda, Ministre de l’Action sociale, de la Santé, de l’Egalité des chances, de la Fonction publique et de la Simplification administrative
Une étude publiée en février 2018 dans The American Journal of Respiratory and Critical Care Medicine conclut que les professionnels du nettoyage courent un véritable danger, dans la mesure où la mortalité liée aux cancers du poumon serait 54 % plus élevée dans ce secteur.
La cause est liée directement aux produits utilisés. Une exposition répétée à ces produits génère toute une série de problèmes de santé plus ou moins graves : difficultés respiratoires, problèmes dermatologiques, asthme, bronchite chronique, douleurs dorsales, tendinites, inflammation du canal carpien…
Pire, ceux qui ont utilisé régulièrement des sprays nettoyants pendant 20 ans voient leur fonction pulmonaire diminuée comme s’ils fumaient un paquet de cigarettes par jour.
Le Professeur Jan Tytgat, toxicologue à la KUL, a listé les composants suspects présents dans les produits d’entretien : l’acide chlorhydrique, l’acide sulfamique, l’acide formique, l’hydroxyde de sodium ou encore de l’hydroxyde d’ammonium. Ces substances peuvent provoquer des irritations et même de graves brûlures au niveau de la peau, des yeux et des voies respiratoires si elles sont inhalées.
Les solvants et détergents employés notamment pour récurer les sols contiennent de l’acétone, des hydrocarbures aromatiques et de l’alcool. Ils sont susceptibles de provoquer des irritations de la peau et des voies respiratoires et ont un effet toxique sur le système nerveux, le cerveau, les reins et le foie.
Les parfums et colorants, présents dans la plupart des produits ménagers, peuvent causer des réactions allergiques.
À cela, il faut encore ajouter les phénols, phtalates et autres perturbateurs endocriniens qui affectent le fonctionnement du système endocrinien et dont on ne mesure pas encore précisément la nocivité sur la santé.
Certains flacons et sprays contiennent pas moins de 275 ingrédients considérés comme des pesticides par l’agence de protection de l’environnement américaine (EPA). L’effet biocumulatif de ces produits toxiques est particulièrement préoccupant selon l’EPA.
Le toxicologue Alfred Bernard s’interroge sur ces nouveaux produits par rapport au savon de Marseille et au bicarbonate de soude qui sont, selon lui, d’excellents dégraissants et ne présentent aucun risque pour la santé et l’environnement.
Pour lui, dans le domaine des produits d’entretien, on trouve sur le marché des tas de produits qui coûtent cher et ne sont pas nécessaires.
Au Canada, l’Institut de recherche RobertSauvé en santé et sécurité du travail s’est intéressé, en 2014, aux nettoyants à base d’enzymes utilisés dans les milieux de soins. Cette étude pointe le manque de transparence sur la composition de ces produits et rapporte quelques cas de sensibilisation respiratoire chez des travailleurs manipulant des produits à base d’une enzyme appelée subtilisine.
Ces recherches scientifiques et ces déclarations de la part de spécialistes m’invitent à interroger Madame la Ministre : en tant que ministre, elle gère non seulement son cabinet ministériel, mais également indirectement toutes les administrations qui dépendent de son autorité. Cela fait beaucoup de monde travaillant dans des bureaux qui sont nettoyés chaque jour.
Comme expliqué dans mon développement, cela impacte directement et plus fortement les professionnels qui viennent faire le nettoyage, mais cela impacte également tous les travailleurs qui vivent 8 heures par jour dans leur milieu professionnel. Je rappelle que l’air de nos bureaux est de deux à cinq fois plus pollué que notre environnement extérieur.
Il me semble donc important de s’interroger sur les produits utilisés.
A-t-elle connaissance des produits utilisés par les nettoyeurs dans les locaux qui dépendent directement et indirectement de son autorité ?
Les produits que j’ai cités ci-dessus s’y retrouvent-ils ?
Quelles sont les mesures de prévention prévues ?
Une réflexion est-elle menée pour limiter les produits toxiques et préférer les produits naturels et sains, tels que le savon de Marseille ou le bicarbonate de soude ?
Où en est cette réflexion ?
Réponse du 29/06/2018
de GREOLI Alda
Le personnel de nettoyage des locaux dépend du Département de la gestion mobilière, celui-ci dépendant fonctionnellement de mon éminent collègue, Monsieur le Ministre Crucke.
Néanmoins, en tant que Ministre de la Fonction publique et étant particulièrement attentive aux différents impacts de l’environnement de travail sur la santé des fonctionnaires wallons, les renseignements utiles ont été pris. Ainsi, je puis préciser à l’honorable membre que le personnel de nettoyage utilise des produits Eco labélisés depuis 2010. Depuis 2016, les produits sont exempts de composant superflu n’ayant aucune action sur la propreté (par exemple, le parfum, le colorant ou d’autres dérivés synthétiques).
Pour compenser la diminution du critère nettoyant, le critère mécanique a été augmenté. Ainsi, la qualité de friction en solution uniquement aqueuse des franges de nettoyage de sol, de mobilier, de sanitaire s’est améliorée, notamment en utilisant du matériel Eco labélisé « Nordic Swan ». Des centrales de dilution ont également été mises en place sur tous les sites. Les traitements de sol et autres décapages ont été abolis et des formations ont été données pour mieux maîtriser l’usage des désinfectants. L’usage de vaporisateurs « en tête mousse » (sans aucune diffusion de fines particules de type aérosol dans l’atmosphère) a été généralisé.
Le Département de la gestion mobilière participe à l’évolution du métier dans le respect de la santé du travailleur tout en gardant le critère qualité de propreté.
Enfin, dans le nouveau marché relatif à la fourniture de produits de nettoyage, d’hygiène, de petits matériels d’entretien et machines d’entretien, une attention particulière est apportée : - pour intensifier les critères environnementaux ; - à la qualité des franges ; - à la qualité ergonomique et solidité du matériel ; - à l’introduction du matériel « vapeur pro » ; - au recours à des disques pour monobrosses ne nécessitant pas l’usage de produits ; - mais aussi au coaching du personnel de nettoyage sur site.