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La gestion de l'électricité

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2018
  • N° : 4 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 14/09/2018
    • de STOFFELS Edmund
    • à CRUCKE Jean-Luc, Ministre du Budget, des Finances, de l'Energie, du Climat et des Aéroports
    Le gestionnaire du réseau haute-tension Elia se lance dans un projet pilote visant à étudier les possibilités offertes par la technologie blockchain dans le secteur de l’énergie.

    Ce projet s’inscrit dans un contexte de développement des sources d’énergie décentralisées et de disparition progressive des sources de flexibilité tradionnelle. Si demander à une centrale au gaz de produire plus ou moins peut se régler par un simple coup de fil, interagir avec plusieurs producteurs décentralisés est nettement moins facile.

    Cette technologie permet de flexibiliser l’offre dans le sens d’envoyer un signal aux microcogénérations (domestiques pour le bâtiment à plusieurs appartements) s’il y a une pénurie d’électricité dans le réseau.

    Monsieur le Ministre serait-il intéressé à développer, par des aides régionales, la filière des microcogénérations (domestiques) de façon à ce qu’un opérateur comme Elia puisse y faire appel en cas de besoin ?

    À supposer que l’on parvienne à mettre en réseau un nombre suffisant de micros-cogénérations d’une puissance électrique (par exemple de 0.5 MW), on pourrait imaginer que cette méthode soit capable de remplacer une « unité gaz » indispensable dans un scénario de transition énergétique.
  • Réponse du 02/10/2018
    • de CRUCKE Jean-Luc
    Suite à la question de l’honorable membre sur « la gestion de l’électricité », voici certaines informations susceptibles de préciser la situation.

    Il fait référence à une étude lancée cet été par le gestionnaire du réseau de transport sur l’influence que pourrait jouer la technologie dite de la « blockchain » sur la gestion future des énergies d’origine renouvelable sur le réseau, pointant les opportunités liées à la gestion décentralisée de microcogénérations.

    Le travail mené par Elia relève bien d’une étude d’opportunité de la « blockchain » dans la gestion énergétique dans laquelle les microcogénérations sont un des éléments à prendre en considération.

    La mise en commun d’unités de microcogénérations et leur gestion centralisée sont parfois appelées par le terme allemand « schwarmstrom » ou « centrale électrique virtuelle » (ou Virtual Power Plant, VPP). Un tel mode de gestion offre un réel potentiel, mais, comme il l’avait été signalé à l’honorable membre, il fait face à un triple défi : économique, technique et humain.

    Du point de vue économique, il sera probablement difficile de compenser l’aléa de la production éolienne ou photovoltaïque par un ensemble conséquent de microcogénérations commandées à distance. En Allemagne, une estimation a montré qu’une mise en réseau de 100 000 unités de microcogénération serait nécessaire pour atteindre une puissance de production de 2 GW (l’équivalent de deux réacteurs nucléaires). Cette estimation induit l’installation d’unités individuelles d’une puissance de 20 kW électrique. En partant des caractéristiques d’une micro génération classique actuelle, nous pouvons considérer qu’un investissement individuel de 10 000 à 15 000 euros (hors placement et mise en service) serait nécessaire, soit un investissement minimum de 1 à 1,5 milliard d’euros. Ces coûts ne tiennent en outre pas compte du service de gestion du système interconnecté. Par contre, il semble que des VPP combinant diverses technologies ont du sens. C’est la diversité des portefeuilles qui permettra d’assurer une certaine résilience et une souplesse d’utilisation de ces VPP. Par la diversité des technologies, nous entendons des unités de cogénération de taille moyenne (dans le tertiaire par exemple), du déplacement de charge en résidentiel et tertiaire (on parle bien de virtuel), des outils de stockage locaux et résidentiels, voire le pilotage d’installations PV, … bref, la combinaison de moyens de génération et de flexibilité.

    Au niveau technique, même si la solution semble attractive, il convient de rappeler qu’il s’agit ici d’unités de microcogénération et que même si de l’électricité est produite, de la chaleur est également produite (de l’ordre de 2 kW par kW électrique pour les moteurs et turbines et de 8 kW par kW électrique pour les moteurs Stirling). Même si cette chaleur peut être intéressante, il conviendra de pouvoir la gérer efficacement, surtout durant les mois d’été.

    C’est souvent la gestion de la chaleur qui est la plus complexe à mettre en œuvre et à valoriser pour les plus grosses installations. Le corollaire est également que les unités de cogénération sur généralement pilotée par le besoin en chaleur (et moins par celui en électricité), ce qui ne laisse pas toujours la souplesse nécessaire. Par exemple, il fait très froid, la maison a besoin de chauffage, par conséquent on produit au maximum en thermique (avec la production électrique y associée). La marge de manœuvre pour produire plus d’électricité est alors réduite.
    Par ailleurs le retour d’expérience des microcogénérations n’a pas toujours été convaincant. Cette technologie a certainement du sens, mais devrait être déployée avec une certaine prudence (certainement pas de manière massive comme l’honorable membre l’entend par sa question).

    En ce qui concerne le niveau humain, une grande faiblesse existe actuellement dans le fait que les particuliers qui disposeront d’une telle installation n’en auront pas la pleine maiîrise. Un renforcement du cadre contractuel et des compétences des opérateurs sera nécessaire, avec la protection du consommateur qui est, a priori, non compétent, mais devrait pouvoir garder une certaine liberté d’action. .

    L’année dernière, j’ai approuvé un projet de recherche et innovation porté par l’entreprise Green Propulsion Engineering de Liège visant à développer une cogénération flexible de plus grosse puissance (150 à 400 kW) et fonctionnant au gaz naturel comprimé afin d’en atténuer l’impact environnemental. Ce projet intégrera la question de la décentralisation de la gestion en visant à une optimisation de la gestion de la chaleur. En effet, les puissances développées dans le cadre de ce projet permettraient une intégration dans des bâtiments gros consommateurs tant d’électricité que de chaleur (hôpitaux, piscines,…).

    Nous tenons par ailleurs à rappeler que les mécanismes de soutien via les certificats verts et les aides UDE, ainsi que les déductions fiscales majorées pour les personnes morales, permettent déjà de soutenir relativement efficacement le placement de systèmes de cogénération de qualité.