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L’impact des politiques protectionnistes américaines sur la Wallonie

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2018
  • N° : 10 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 17/10/2018
    • de ZRIHEN Olga
    • à BORSUS Willy, Ministre-Président du Gouvernement wallon
    La politique commerciale américaine suit une logique bien établie que d’aucuns critiquent pour son manque de réflexivité et son pur idéologisme. Depuis plusieurs mois, les États-Unis appliquent des tarifs douaniers importants sur l’importation de nombreux produits, contrés par des mesures similaires de la part de ses partenaires commerciaux.

    Nous apprenions dans un article de l’Écho datant du 5 octobre 2018 que la BNB estimait que les mesures protectionnistes américaines, ainsi que les représailles adverses n’avaient qu’un impact limité sur l’économie belge. Toutefois, il ne faudrait pas que la situation actuelle se transforme en véritable guerre commerciale qui serait hautement plus préjudiciable pour la Belgique. Je cite : « La mise à exécution des menaces pesant sur l'ensemble des exportations chinoises et sur le secteur automobile, et l'éventuelle escalade protectionniste qui s'ensuivrait, seraient autrement plus dommageables pour l'économie mondiale et donc pour la Belgique. »

    L’article faisait également part des inquiétudes de la BNB quant à la vulnérabilité de plusieurs arrondissements par rapport à l’incidence négative sur les filières concernées, comme sur les chaînes de fournisseurs, des mesures de l’administration américaine.

    Le Gouvernement wallon dispose-t-il d’informations plus précises quant à l’impact potentiel sur l’économie wallonne d’une augmentation de ces mesures protectionnistes ?

    Quels seraient les secteurs économiques wallons les plus durement touchés ?

    Combien d’emplois représentent-ils ?

    Le Gouvernement wallon a-t-il eu accès aux simulations de la BNB ?
    Si oui, Monsieur le Ministre-Président peut-il nous en dire plus à ce sujet ?
  • Réponse du 23/10/2018
    • de BORSUS Willy
    L’élection de Donald Trump à la fonction de Président des États-Unis d’Amérique en janvier 2017 a bouleversé la vision américaine du commerce international. Trois objectifs principaux découlent de cette vision du monde :
    – imposer un plus grand respect des accords commerciaux existants et sanctionner les pratiques déloyales présumées, notamment de la Chine ;
    – mettre fin ou renégocier certains accords pour privilégier la production américaine et favoriser les exportations américaines (« America First ») ;
    – réformer le fonctionnement de l’OMC dans un sens plus favorable aux intérêts américains.

    C’est dans ce cadre que des tarifs douaniers additionnels de respectivement 25 % pour l’acier, et 10 % pour l’aluminium ont été imposés aux États membres de l’Union européenne à partir du 1er juin 2018. Pour la Région wallonne, ces secteurs représentent respectivement 0,8 % et 0,1 % de nos exportations vers les USA.

    Dans son étude sur « Le nouveau protectionnisme américain et ses effets sur l’économie belge » publiée en septembre 2018 sur son site Internet, la BNB a mesuré l’impact sur l’économie belge de la nouvelle politique commerciale des USA. Pour ce faire, un modèle a été utilisé qui prend en compte les effets directs sur les firmes en relation commerciale avec les USA, mais également les effets indirects sur leur chaîne de fournisseurs ou de clients belges.

    Concernant l’instauration des nouveaux tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium, la BNB estime que leur effet macroéconomique est très limité pour la Belgique, puisque la moitié des exportations belges de métaux vers les USA englobe également le cuivre, le nickel, le zinc, etc. Par conséquent, le degré d’exposition spécifique à l’acier et à l’aluminium de la Belgique est limité. Certaines zones géographiques sont plus sensibles à ces nouveaux tarifs douaniers, comme Ath, Charleroi, Dinant, Huy, Liège, Mons et Philippeville, mais les effets calculés par la BNB sont de l’ordre du dixième, voire du centième (de - 0,007 % à – 0,05 %).

    Concernant le commerce sino-américain, la BNB identifie une implication indirecte de la Belgique dans les échanges entre ces deux pays. L’implication belge dans les exportations américaines vers la Chine est globalement faible (0,03 % PIB).

    Concernant les importations américaines de véhicules automobiles, la Belgique n’est qu’indirectement impliquée.

    En guise de conclusion, la BNB estime que l’impact des mesures américaines sur l’économie belge est limité. C’est d’autant plus le cas, puisque l’étude ne prend pas en compte les mesures de rééquilibrage adoptées par l’Union européenne.

    En effet, pour protéger l’économie européenne, en ce compris les entreprises wallonnes impactées, l’Union européenne a opté pour des mesures de rééquilibrage en imposant des taxes d’importation supplémentaires sur certains produits américains iconiques (motos Harley-Davidson, jeans, bourbon, beurre de cacahuète, etc.). Elles sont en vigueur depuis le début du mois de juillet.

    En parallèle, l’Union européenne a lancé le 1er juin 2018 une procédure à l’encontre des USA auprès de l’OMC, pour contester la justification des tarifs douaniers. Elle a également indiqué qu’elle se réservait le droit d’un rééquilibrage additionnel sur 3,6 milliards d'euros d’importations américaines d’ici 3 ans ou dès que l’OMC ait fait droit à sa demande.

    Globalement, ces réactions ont été proportionnées et ont ciblé des produits d’exportations politiquement sensibles. La perspective d’une guerre commerciale s’est, à ce stade, éloignée et les tensions sont actuellement retombées avec l’adoption d’une déclaration conjointe (Joint Statement) par le Président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker et le Président des USA Donald Trump. Cette déclaration est mise en œuvre par la Commissaire européenne au commerce Cecilia Malmström et l’US Trade Representative Robert Lighthizer, qui se réunissent dans le cadre de groupes de travail réguliers. Par ailleurs, les efforts de l’Union européenne et de ses États membres sont continus pour engager les USA et trouver des solutions aux problèmes soulevés dans plusieurs forums (OMC, G20, etc.).