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La précision de l'identité du preneur dans la réforme du bail à ferme

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2018
  • N° : 44 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 26/10/2018
    • de COURARD Philippe
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région
    Dernièrement, Monsieur le Ministre a manifesté sa volonté de procéder à une réforme du bail à ferme. Il s’agit d’une étape nécessaire dont l’esprit est de rééquilibrer les intérêts à la fois des agriculteurs et des propriétaires mais également de maintenir avec force et détermination l’agriculture familiale en Région wallonne.

    En outre, une série de mesures sont mises en place pour favoriser l’accès des jeunes à la profession d’agriculteur via des incitants fiscaux. Tout comme le renforcement de la possibilité de donner congé à un locataire de terres pensionné.

    Ce projet est dans le processus législatif, en phase de première lecture. Cependant et à ce titre, il me semble important de souligner que l’effectivité et l’efficacité de ces mesures ne peuvent avoir leur raison d’être sans une définition précise de la qualité professionnelle du preneur.

    En effet, de nombreuses difficultés se posent pour les aspirants qualifiés au noble métier d’agriculteur.

    Premièrement, il n’est pas rare que le jeune agriculteur qualifié soit confronté à des sociétés de gestion de taille honorable dont la volonté majeure est la recherche de lucre. Par conséquent, cette observation interroge sur le rapport de force entre une société de gestion et un agriculteur quant à la conception que le Gouvernement souhaite donner à l’agriculture familiale. Pour information, le bail à ferme concerne 70 % des terres agricoles wallonnes et est donc un élément juridique majeur de la profession.

    Deuxièmement, il me revient de la profession que seule une petite partie des terrains libres de preneurs s’échange dans les faits. Dans d’autres pays européens, le bail à ferme a une durée plus courte et est renouvelable au maximum deux fois. Cette mesure est censée mieux renforcer le brassage parmi les preneurs. Ce constat n’est pas sans poser une réflexion d’ordre plus général sur le renouvellement des générations en agriculture.

    Enfin, le bail à ferme étant un droit réel, il entre dans la masse d’une succession en cas de décès du preneur originel. Ainsi les descendants du défunt « héritent » de droits et d’usages de biens ruraux alors que souvent ils n’ont aucune expertise professionnelle. Ils perçoivent les aides européennes et sous-louent les biens hérités, frustrant ainsi les propriétaires et les éventuels preneurs qualifiés.

    Au vu des manquements de son projet de réforme, que compte faire le Gouvernement pour mieux prendre en compte l’agriculture familiale, les intérêts des jeunes agriculteurs et le respect des propriétaires ?
  • Réponse du 14/11/2018
    • de COLLIN René
    La proposition de réforme de la législation relative au bail à ferme s’inscrit dans une négociation avec toutes les parties prenantes.
    Elle veut porter un rééquilibrage des droits et obligations des propriétaires et des preneurs. Le texte a par ailleurs été rédigé en corrélation avec les objectifs portés par l’article D.1er du Code wallon de l’agriculture, et entend protéger l’agriculture wallonne en tant que ressource économique et sociale de la Région.

    Dans cette optique, l’agriculture familiale est encouragée par plusieurs dispositifs intégrés dans la réforme. Ainsi, le calcul de superficies maximales de rentabilité veut assurer le maintien d’une taille raisonnable des exploitations et donc favoriser un type d’agriculture familiale.

    De plus, l’insertion d’un mécanisme de baux de courte durée permettra par exemple au repreneur de l’exploitation familiale de terminer ses études, ou lui laissera la possibilité de sortir d’une situation d’indivision.
    Enfin, l’intégration du cohabitant légal dont la relation avec le preneur est déjà pérenne poursuit également cet objectif.

    La réforme est également attentive aux jeunes agriculteurs souhaitant s’installer ou lancer des projets innovants.
    En premier lieu, les mesures fiscales proposées offrent des avantages importants à la conclusion d’un bail à ferme de longue durée ou de carrière avec un preneur jeune.
    Ensuite, le renforcement du mécanisme de congé au preneur en âge d’être pensionné est lui aussi une protection des jeunes et encourage le renouvellement des preneurs.
    En dernier lieu, les baux de carrière ou de fin de carrière rendent la date de fin du bail certaine, ce qui permet une récupération de la terre par les propriétaires et leur offre aussi la possibilité de relouer à des preneurs plus jeunes.

    Parmi les autres mesures mises en place, certaines d’entre elles orientées « propriétaire », doivent redonner confiance à ces derniers dans l’outil bail à ferme et ainsi contribuer à son utilisation au bénéfice de l’agriculture familiale.

    On peut citer la généralisation de l’écrit pour tous les baux. L’écrit permet une date certaine de début et de fin de bail, ce qui sécurise les bailleurs.
    Le mécanisme du congé pour vendre a également été renforcé afin d’assurer une sécurité au propriétaire qui devrait faire face à un accident de vie.

    Une série de mesures anti-abus a été intégrée dans la réforme. La cession a été mieux encadrée, et l’interdiction de la sous-location renforcée. Cela évitera aux propriétaires de se retrouver parties à un contrat dont ils ne connaissent pas le cocontractant.

    Pour finir, la mise en place d’un état des lieux contradictoire en début de bail permettra un meilleur respect des terres du propriétaire.