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La décision du collège communal de Frasnes-lez-Anvaing concernant le retrait des billes de caoutchouc sur un terrain de rugby

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2018
  • N° : 38 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 19/11/2018
    • de PREVOT Patrick
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Le 9 novembre dernier, le collège communal de Frasnes-lez-Anvaing a pris la décision de retirer les billes de caoutchouc éparpillées sur son nouveau terrain de rugby par mesure de précaution. Pourtant, deux semaines plus tôt, Madame la Ministre avait affirmé, sur ce même terrain, que ce terrain, tests scientifiques à l’appui, était sans danger pour la pratique du sport.

    De plus, un reportage consacré aux terrains synthétiques, diffusé dans le cadre de l’émission de la RTBF « Questions à la Une », soulignait qu’en Région wallonne, le document qui réglemente les terrains synthétiques et publié par Infrasports est rédigé par le laboratoire français Labosport. Or, ce laboratoire fait partie de l’organisation européenne des terrains synthétiques ESTO. Ce reportage a eu l’effet d’une bombe chez les parents de jeunes sportifs qui sont de plus en plus nombreux à s’inquiéter sur les risques qu’encourent leurs enfants.

    Enfin, le lundi 12 novembre, nous apprenions que la DGO3, du côté de l’Environnement, allait enquêter sur le danger de ces produits pour notre sol et notre eau.

    Que compte faire Madame la Ministre après la décision du collège communal de Frasnes-lez-Anvaing de retirer les billes de caoutchouc de son nouveau terrain de rugby ?

    Compte-t-elle prendre contact avec les autres communes concernées par ce même type de terrain afin d’évoquer d’éventuels remplacements de terrains ?

    Quelles suites compte-t-elle donner à cette polémique ?

    Compte-t-elle commander une nouvelle étude ?
  • Réponse du 10/12/2018
    • de DE BUE Valérie
    Je précise en premier lieu que ce n’est pas Labosport qui a instauré le cadre normatif pour les terrains synthétiques.  

    L’initiative de mettre en place un tel document, unique en son genre, n’émane pas de Labosport, mais de mon administration, Infrasports.

    Le « cadre normatif des revêtements de sols sportifs » est ainsi issu d’une démarche volontariste de la Région wallonne initiée en 2004, en vue de disposer d’un document technique de référence, relatif à la mise en œuvre des revêtements de sols sportifs de qualité, qu’ils soient intérieurs ou extérieurs.

    Ouvrage de référence, il compile les normes (européennes pour beaucoup) existantes applicables, ainsi que les prescriptions techniques en termes de conception, réalisation et contrôle des surfaces sportives. Le cadre normatif s’adresse plus particulièrement aux professionnels en charge de la conception et de la construction des revêtements de sols sportifs, qu’ils soient auteurs de projets pour la rédaction des cahiers de charges ou entreprises chargées de la réalisation des travaux.

    Tous les dossiers subsidiés sur lesquels j’exerce la tutelle doivent répondre aux prescriptions du cadre pour l’obtention d’un subside. Lors de l’examen du dossier, mes services vérifient systématiquement la conformité des clauses techniques du marché de construction d’un terrain au cadre normatif préétabli. Seuls les dossiers qui respectent les exigences techniques de ce cadre font ainsi l’objet d’un avis favorable de l’administration et d’une proposition de promesse ferme de subside.

    La dernière version du cadre datant de 2013, une mise à jour a été initiée en juillet 2017 par les services de mon administration via le lancement d’un marché public de services.

    Après analyse des offres par mon administration, celle-ci a classé Labosport premier au regard de l’ensemble des critères établis dans le cadre marché public. Comme expliqué ci-avant, la mission du laboratoire n’était pas d’établir des normes pour la Wallonie, mais bien de compiler les normes existantes, européennes pour la plupart, afin d’actualiser le document de 2013.

    S’agissant de l’indépendance du laboratoire, je précise que Labosports est reconnu ISO/IEC 17025/2005 soit la norme relative aux exigences générales concernant la compétence des laboratoires d'étalonnages et d'essais. L’indépendance d’un laboratoire est un critère de base de l’accréditation ISO 17025, elle fait l’objet d’un audit annuel.

    Labosport est également laboratoire accrédité par la Fédération française de football, la FIFA en vue  de vérifier la qualité de la réalisation des terrains, soit par rapport à une compétition (ex : FIFA, UEFA), soit par rapport à des subventions que ces fédérations octroient.

    Les prestations de service de Labosport ne sont pas limitées aux gazons synthétiques et se rattachent à de nombreux autres domaines d’activité  soit :
    - piste ;
    - gymnase ;
    - tennis ;
    - gazon naturel ;
    - sol stabilisé ;
    - aire de jeux ;
    - infrastructure (fonds de forme, couches de fondations, bétons bitumineux, inspections des réseaux de drainages) ;
    - sol équestre ;
    - équipements sportifs et récréatifs.

    Je précise également que par rapport à la Région wallonne, Labosport n’est pas repris dans la liste des laboratoires agréés par la Région wallonne en vue de procéder aux tests des matériaux de remplissage, qui sont désormais exigés avant d’accorder la réception provisoire des travaux.

    De manière générale, s’agissant de la toxicité éventuelle du matériau de remplissage de type SBR, mon administration se réfère à l’étude réalisée par l’Agence européenne des produits chimiques relative à cette problématique. En 2016-2017, l’Agence européenne des produits chimiques a en effet réalisé, à la demande de la Commission européenne et suite aux rumeurs de toxicité du SBR, une étude d’évaluation des risques sanitaires potentiels des granulés de caoutchouc recyclé « SBR » utilisés pour le remplissage des terrains de sport en gazon synthétique.

    S’agissant plus spécifiquement des HAP, l’étude a conclu que la préoccupation était très faible de risque de cancer sur toute la vie chez les joueurs et les travailleurs.

    Dans le cadre de cette étude, plusieurs centaines d’échantillons ont été prélevés sur des terrains synthétiques en Europe. Au niveau des concentrations en HAP observées, le risque pour la santé a été reconnu comme très faible (inférieur à 1 sur 1 million). Dans les faits, les analyses effectuées révèlent des concentrations inférieures à 50 mg/kg, alors même que la norme européenne (REACH) impose aux fabricants une concentration inférieure à 6 200 mg/kg pour les 8 HAP UE dits « cancérogènes ».

    L’Agence européenne des produits chimiques recommande d’ailleurs de revoir les normes à la baisse. Selon elle, le seuil de concentration maximale devrait être fixé à 20 mg/kg. Au travers de son cadre normatif, la Région wallonne a procédé à l’application de ces recommandations en fixant d’emblée le seuil admissible à 20 mg/kg.

    Depuis mars 2018, tous les chantiers subsidiés en Wallonie doivent faire l’objet d’une analyse des matériaux mis en œuvre afin de s’assurer que ceux-ci rencontrent bien ces seuils. Les résultats de ces analyses conditionnent depuis lors la liquidation des subsides.

    Pour ce qui concerne les terrains existants, bien qu’aucune preuve de toxicité avérée des granulés SBR ne soit formellement établie à ce jour, je recommande, aux propriétaires et gestionnaires de terrains en gazon synthétique remplis de SBR, de s’assurer de la conformité du matériau aux dispositions du cadre normatif, via des tests ad hoc que je subventionne à concurrence de 50 %, le subside étant plafonné à 1 000 euros.

    Si ces analyses devaient révéler des taux de concentration en HAP supérieurs aux seuils recommandés par l’ECHA et notre cadre normatif, un soutien financier pourra être accordé par la Région wallonne afin de remplacer les matériaux concernés.

    En outre, conformément aux recommandations de l’Agence européenne des produits chimiques, je me permets de rappeler que, pour l’usage du terrain, il y a lieu de respecter certaines règles élémentaires de bonne pratique :
    - restreindre l’accès au terrain aux personnes autorisées (sportifs, entraîneurs, staff technique, personnel d’entretien), mais certainement pas au public qui doit rester à l’extérieur de la zone neutre ;
    - ne pas mettre volontairement les granulés de SBR en bouche, les oreilles, … (il existe un risque limité d’ingestion des granulés lors des contacts avec le sol (gardiens, chutes) ;
    - après l’activité sportive, enlever directement les vêtements et chaussures souillés, prendre directement une douche sur place afin d’éviter le transport des granulés vers le domicile ;
    - se laver les mains après avoir été en contact avec les granulés ;
    - nettoyer et désinfecter rapidement toute plaie ou éraflure.

    Tous les gestionnaires d’un terrain synthétique composé de SBR répertoriés par mon administration ont reçu un courrier synthétisant les mesures évoquées ci-avant.

    J’ai par ailleurs sensibilisé les fédérations sportives concernées afin qu’elles puissent relayer ces informations auprès de leurs membres respectifs.