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La grille indicative des loyers

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 88 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 07/01/2019
    • de STOFFELS Edmund
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Madame la Ministre a débloqué 150 000 euros pour mener une enquête sur le marché locatif (enquête qui devrait être menée chaque année), afin de servir de base objective à la fixation des loyers indicatifs.

    On attend les premiers résultats ce mois-ci et on devrait nous présenter en septembre une nouvelle grille indicative des loyers, plus précise, avec plus de critères et plus fiable.

    Le Centre d’études en habitat durable présentera une nouvelle liste de critères, même si le type d’habitat, le nombre de pièces principales, la superficie habitable et l’époque de construction resteront des critères incontournables.

    Et Madame la Ministre de préciser : « Suivant l’évaluation, de nouveaux critères comme la performance énergétique, la deuxième salle de bain, les espaces récréatifs (balcon, terrasse, jardin), le garage, les espaces de stockage (grenier, cave) devraient être pris en compte ».

    Et une nouvelle carte des secteurs géographiques délimitant des zones homogènes en termes de niveaux de loyers constatés sur le marché locatif sera adoptée.

    Selon mes informations, une nouvelle proposition existe. Elle a pu être développée avec le concours du CEHD. Il me semble qu’il s’agit avant tout d’une méthode et pas encore d’une grille toute faite ? Confirme-t-elle ?

    Endéans quel délai les différentes grilles devraient-elles exister ?

    Procédera-t-elle par interview avec des experts immobiliers ou par un enregistrement systématique des baux à loyer (ce qui permet un traitement statistique) ?
  • Réponse du 28/01/2019
    • de DE BUE Valérie
    À mon initiative, le Législateur a effectivement prévu le recours à une méthode résolument scientifique d’élaboration de la grille indicative des loyers.
    L’article 89, §3 du décret du 14 mars 2018 relatif au bail d’habitation stipule ainsi que « la grille indicative des loyers est adaptée annuellement à l’évolution du marché locatif sur la base d’un échantillon représentatif d’habitations mis en location sur l’ensemble de la Wallonie.
    Sont exclus de l’échantillon : les logements d’utilité publique ; les habitations atypiques ou dites insolites par rapport au parc immobilier résidentiel ; les habitations disposant d’un bail de colocation en vertu du chapitre 4 dudit décret ; les habitations disposant d’un bail étudiant en vertu du chapitre 5 ; les habitations dont la durée effective d’occupation dans les lieux loués par les preneurs est supérieure à neuf ans ».

    Je confirme à l’honorable membre que la grille a bel et bien été confectionnée grâce au premier échantillon réalisé sur le marché locatif wallon, après une période de collecte de plusieurs mois, de manière représentative sur l’ensemble du territoire régional et comportant environ 4 000 logements loués.
    Cet échantillon ne comporte effectivement pas les types « habitations spécifiques » cités dans le décret parce qu’elles relèvent de segments trop distinctifs du marché locatif ou qui ne servent pas directement à l’habitation principale (ex. : les kots).

    Il rappelle à juste titre les précisions que j’avais anticipativement communiquées au Parlement en 2018.
    Je peux lui confirmer à nouveau que la nouvelle grille inclut les critères incontournables (type du logement, époque de construction, superficie habitable et nombre de chambres), d’autres critères plus précis ont effectivement été rajoutés. La nouvelle grille est d’abord et avant tout fondée sur une observation objective et représentative du marché locatif wallon.

    Des développements informatiques restent à réaliser pour que la grille indicative puisse être mise à la disposition du public via un site Internet. Elle le sera effectivement dans le courant de ce mois, comme le prévoit le planning.

    En ce qui concerne l’enregistrement des baux comme source de données, la récente étude de l’IWEPS (décembre 2018) règle définitivement la question en soulignant les nombreuses limites de ces données en raison de leur incomplétude et du manque d’informations détaillées sur les logements.
    Même si cette étude a permis de calculer des indicateurs importants, elle conclut : « Cette recherche a certes permis d’améliorer quelque peu la connaissance du marché locatif, mais sans enregistrement plus systématique, un véritable cadastre locatif n’est pas possible. C’est pourquoi il est nécessaire de recourir à des estimations approximatives à partir d’enquêtes ad hoc, des données d’acteurs privés (ex. : Immoweb) ou des données publiques elles aussi partielles (l’enregistrement) » (IWEPS, Regards statistiques, n°21 - Page 70)
    Ces limites avaient déjà été épinglées en 2013 par le Centre d’Études en Habitat durable de Wallonie dans son rapport préfigurant l’observatoire des loyers.
    Je cite : « Les données de l’enregistrement ne sont pas suffisamment descriptives, ni vérifiées sur le terrain. Elles ne donnent aucune indication sur le type de bien loué, ses équipements, son niveau de confort et ses surfaces. Il serait donc impossible de calculer les coefficients des critères de la grille indicative.
    Les données de l’enregistrement ne concernent pour l’instant qu’une partie du parc locatif, puisque l’obligation d’enregistrement ne date que de 2007-2008 et qu’il n’y a pas un contrôle strict des défauts d’enregistrement.
    Sans surprise, l’IWEPS a alimenté en décembre ce constat du CEHD, estimant le taux d’enregistrement à 50 %.
    L’IWEPS constate que la représentativité des baux enregistrés est moins bonne dans les communes avec les populations plus pauvres, plutôt urbaines. En particulier, des taux d’enregistrement des baux sont plus faibles à Mons, Charleroi, Liège et leurs périphéries industrielles. »
    Dans ces conditions, ces données biaisées peuvent difficilement constituer une base statistiquement solide pour calculer la grille indicative des loyers.
    • Les données ne sont malheureusement pas structurées sur le plan technique. De nombreux problèmes d’extraction de la base de données utilisée pour la gestion du dispositif par le SPF Finances demeurent, notamment pour les plus anciens (l’étude de l’IWEPS n’a d’ailleurs pu travailler que sur les baux de 2011 à 2015), ce qui est insuffisant pour constituer une base de données pour l’élaboration de la grille. Une nouvelle démarche d’extraction est entamée, mais n’aboutira pas avant plusieurs années.
    • Enfin les données de l’enregistrement ne tiennent pas compte des flux des entrées et sorties des baux. En effet, les fins ou ruptures de bail ne sont pas déclarées. Autrement dit, il n’y a pas de comptabilisation du nombre « net » de baux effectivement en cours. La base des données contient des baux donc qui ne sont pas « actifs » depuis longtemps et ont cessé d’être représentatifs du marché locatif en cours. Les inclure constituerait un biais manifeste dans l’élaboration de la grille des loyers.

    Pour l’instant, la seule méthode fiable et statistiquement valide est de conduire une enquête représentative sur l’ensemble du territoire qui effectue des relevés statistiques précis et objectifs par des professionnels de la recherche en économie immobilière. C’est le choix que nous avons fait avec le concours des services du CEHD comme l’honorable membre le rappelle.

    Enfin, la proposition de recourir à des experts immobiliers fait référence à ce qui existe déjà. Les agences immobilières font leurs estimations depuis des décennies. Dans ce cas-là, on ne voit pas très bien ce que viendrait faire une grille indicative des loyers - dont l’intérêt est d’objectiver - si elle recopiait les informations qualitatives des experts immobiliers.
    Il faut rappeler que la grille est indicative, ce qui laisse la marge nécessaire aux experts pour affiner leurs estimations au cas par cas. La grille ne pourra jamais prétendre à une précision absolue. Elle aide à l’estimation du loyer ; le rôle des experts et des différentes parties au contrat reste entier.