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Les conséquences de l’augmentation des coûts des matériaux de construction sur la politique du logement

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 109 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 17/01/2019
    • de STOFFELS Edmund
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    L’union flamande des PME du secteur de la construction, Bouwunie, a prévenu que les matériaux de construction seront encore plus chers au 1er janvier 2019.

    En effet, les fournisseurs ont annoncé des hausses de prix pour tous les matériaux. Pour certains, comme le béton, l’asphalte ou la peinture, l’augmentation pourrait être comprise entre 8 et 15 %.

    D’après les calculs de Bouwunie, on peut s’attendre à une hausse du prix de la construction de 4,54 % autrement plus du double de l’inflation. Cela représente un supplément de 15 600 euros sur le prix moyen d’une habitation.

    Chaque année, le prix des matériaux de construction augmente de 3 à 6 %. Cette année, cette hausse sera beaucoup plus importante.

    Nous voilà devant une problématique qui constitue à faire exploser le coût de la vie et il s’agit d’une question à caractère existentiel. Si l’on ne parvient pas à maîtriser l’évolution des prix de la construction, le logement sera pour de plus en plus de ménages un véritable luxe, alors que c’est un droit élémentaire.

    Le Gouvernement wallon fait-il de la maîtrise du coût de la construction de logement une priorité politique ? Ou est-ce une question qu’on laisse aux règles d’un marché dérégulé ?

    Dans quelle mesure les charges d’urbanisme contribuent-elles à faire exploser le coût ?

    Peut-on mettre ces charges à l’ordre du jour de la politique du logement ?

    Ne doit-on pas préparer un pacte entre les régions et l’autorité fédérale afin de réduire la pression fiscale qui règne sur toute nouvelle construction (IPP, TVA, PI, et cetera) ?

    Madame la Ministre partage-t-elle l’analyse suivant laquelle environ la moitié du coût de la construction est générée par les différentes taxes : celles sur les salaires de la main d’œuvre, celle sur la valeur ajoutée, et cetera ?
  • Réponse du 07/02/2019 | Annexe [PDF]
    • de DE BUE Valérie
    La question de l’honorable membre s’appuie sur les chiffres d’une étude de « Bouwunie », groupe d’intérêt représentant les PME du secteur de la construction en Flandre.

    Sans interroger l’impartialité de cet organisme professionnel, il faut observer que la méthodologie utilisée n’est pas mentionnée. De plus, le calcul n’a pas été réalisé chaque année ; ce qui eut permis une comparaison sereine.

    Je lui recommande donc de se référer plutôt aux statistiques officielles de « l’indice des prix à la production dans la construction résidentielle » du SPF Économie qui procède selon les règles européennes strictement fixées par Eurostat. (Voir annexe)

    Depuis 2005, cet indice est calculé de manière objective et stable à partir d’une enquête auprès des entreprises de construction comme substitut des indices de coûts. Il reflète les prix effectivement payés par le client.

    Concrètement, il ressort de l’observation de cet indice officiel que les chiffres sont sensiblement différents et moins alarmistes que ceux avancés par « Bouwunie ».

    Certes depuis la crise de 2008-2010, l’indice des prix à la production dans la construction résidentielle augmente chaque année. Il a ainsi atteint 105,1 en 2018 (2015 = 100).

    Cependant, en Belgique, l’augmentation annuelle a été de 1,56 % entre 2013 et 2018 (soit entre 0,2 et 2,2 selon l’année considérée, voir graphique en annexe). On est loin des 3 % à 6 % qu’évoque « Bouwunie » dans son dernier communiqué de presse !

    « Bouwunie » affirme aussi que l’augmentation des coûts de la construction évolue deux fois plus fortement que l’inflation des prix à la consommation en général.

    Une analyse objective nous oblige à constater que les chiffres officiels pour la Wallonie livrent un tout autre résultat.

    En effet, en Wallonie, pendant les cinq dernières années (entre Q1 2013 et Q3 2018), l’indice des prix à la production dans la construction a augmenté de 7,8 points tandis que de l’inflation a augmenté de 7,4 %. Les deux évolutions sont donc très similaires.

    Il n’est pas question pour moi de sous-estimer l’impact de la hausse des prix de la construction, mais de s’appuyer sur des statistiques officielles et fiables en la matière. Je me refuse toutefois à céder aux discours inutilement alarmistes.

    Eu égard à la sous-question de l’honorable membre relative à l’impact éventuel des charges d’urbanisme sur les coûts de la construction, je tiens à rappeler que celles-ci sont imposées, dans certains cas spécifiques, en vue de compenser l’impact que le projet immobilier fait peser sur la collectivité au niveau communal.

    Au lieu de supposer un effet inflationniste des charges d’urbanisme sur les prix immobiliers, il conviendrait davantage de considérer les charges d’urbanisme comme le moyen de rétablir le « coût-vérité » des nouveaux logements.
    Elles permettent en fait d’internaliser toute une série de coûts, qui autrement seraient payés par la collectivité et les citoyens, ce qui représenterait une réelle injustice.

    Ceci étant rappelé, les charges d’urbanisme ne doivent pas être abusives.
    Elles deviennent une menace grave pour la politique du logement en général lorsque certaines communes sont tentées de faire supporter aux porteurs de projets immobiliers privés des investissements incombant légitimement à la collectivité.

    Le CoDT est d’ailleurs clair sur ce point en ne fixant pas de « tarifs obligatoires » quant au montant des charges. Celui-ci doit respecter les principes d’égalité et de proportionnalité.
    Ainsi, il doit être proportionnel, d’une part, au « coût financier que l’exécution du projet est susceptible de faire peser sur la collectivité » et, d’autre part, à « l’objet du permis sollicité ». Les communes sont toutefois autorisées à établir un tarif général pour plus de transparence.

    En ce qui concerne sa sous-question relative à l’impact des multiples facteurs, dont les diverses taxes (TVA, charges sociales, et cetera), sur les coûts de construction et les prix des logements, je voudrais rappeler les conclusions d’une étude universitaire publiée dans la revue « Études foncières » (Revue Études Foncières, n°165, « Ainsi vont les prix », Paris, 2013, pages 35-62. Voir l’article de Christian TUTIN (Université de Paris-Est), « Volatilité, exubérance et stabilité. Trois modèles de marchés du logement en Europe »), qui fait référence dans le secteur, et portant sur l’évolution de long terme des prix immobiliers résidentiels dans 13 pays européens.

    Cette étude récente aboutit à classer les pays en trois groupes, avec des niveaux de risques hauts, modérés et stables.

    Les pays subissant des hausses et des baisses violentes de prix, avec toutes les conséquences associées pour les ménages, sont aux marges de l’UE (Espagne, Grèce, Chypre, Irlande, Islande, et cetera).

    À l’opposé se trouvent les pays « germaniques » dont les prix évoluent de manière stable (Autriche, Allemagne, Suisse, et cetera).

    Notre pays - avec la France, les Pays-Bas, le Grand-Duché ou les pays scandinaves - se situe dans le groupe des pays « modérés » qui - je cite les conclusions - « malgré des hausses importantes des prix du logement, n’ont enregistré après 2007 ni effondrement des prix ni fragilisation financière des ménages ou des promoteurs ».

    Il paraît important de rappeler que notre système de logement supporte certes une pression fiscale qui ne doit pas dépasser un certain seuil, mais présente une relative résilience avérée pour garantir l’accès au logement.