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Le désherbage électrique

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 171 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 23/01/2019
    • de DENIS Jean-Pierre
    • à COLLIN René, Ministre de l'Agriculture, de la Nature, de la Forêt, de la Ruralité, du Tourisme, du Patrimoine et délégué à la Grande Région
    On le sait, le monde agricole est toujours en quête d’innovation et d’alternative aux dangereux et coûteux pesticides chimiques. Une technologie en particulier a suscité notre intérêt, celle de l’herbicide électrique. L’entreprise Case IH a ainsi mis en vente un système de désherbage des adventices en utilisant de l’électricité à haute fréquence et à haute tension. Cette technologie nous paraît particulièrement prometteuse dans notre combat contre la dépendance aux pesticides chimiques.

    Existe-t-il à l’heure actuelle d’autres techniques similaires ou est-ce une première en Région wallonne ?

    Dans quelles conditions et dans quelles mesures ces herbicides électriques sont-ils utilisés dans l’agriculture wallonne ?

    Par ailleurs, cette technique aux impacts environnementaux réduits jouit-elle d’incitants pour favoriser sa pratique (investissements, formations, et cetera) ?

    Le respect de l’environnement de cette pratique vantée par le constructeur est-il avéré ?

    Monsieur y a-t-il porté attention dans le cadre des projets « Générations Terre » ou compte-t-il le faire ?
  • Réponse du 08/02/2019
    • de COLLIN René
    La technologie de désherbage électrique XPower (technologie Zasso) que propose la firme Case IH est déjà en application au Brésil, et a commencé à être testée en Europe depuis août 2017. Ces machines envoient une décharge électrique (de faible intensité, mais de haute tension) qui provoque un éclatement des vaisseaux des plantes, ce qui a pour effet de les dessécher. Avant de promouvoir cette nouvelle technique, cet outil prometteur devrait encore pouvoir bénéficier d’améliorations telles que :
    - la largeur de travail actuellement limitée à environ 3 mètres. Plusieurs passages supplémentaires sont donc nécessaires dans la parcelle, et cela se traduit par un tassement accru du sol encore plus accentué en conditions humides ;
    - l’empreinte carbone d’un tel outil pourrait encore être améliorée, car chaque passage nécessite actuellement 5 à 20 litres de carburant par hectare, et dans les cas extrêmes jusqu'à 30 litres de carburant par hectare ;
    - la vitesse de travail est actuellement limitée entre 3 et 5 km/h. Le développeur vise entre 5 et 10 km/h.

    Selon le Centre wallon de Recherches agronomiques (CRA-W), cette technologie alternative de désherbage total semble prometteuse en remplacement de l’utilisation du glyphosate, mais doit encore être évaluée, de manière indépendante, dans nos conditions selon différents paramètres (type de sol, adventices, réglages de la machine) et en ce qui concerne les risques encourus par la faune (carabes, vers de terre, nématodes…) et les micro-organismes du sol. La Fibl (Institut de recherche de l'agriculture biologique suisse) a réalisé des essais et mesuré les effets du désherbage par électrocution sur la vie du sol. Pour le moment, ils disent n'avoir rien constaté de négatif, mais émettent une réserve, car les études sont récentes et encore peu nombreuses. Un autre effet indésirable pourrait être le transfert du courant électrique dans le sol en conditions humides et l’éventuelle destruction de la culture en place.

    Cette technologie n’est pour l’instant pas commercialisée en Région wallonne. Elle est en phase finale d’adaptation et de démonstration. D’après le constructeur (firme Zasso), il n’y aurait aucune condition particulière d’utilisation ou mesure de sécurité pour l’utilisateur hormis le respect d’une distance minimale avec la machine allumée. Une aide à l’investissement pourrait être obtenue, comme pour tout autre investissement agricole, via les aides au Développement et aux investissements sans le secteur agricole (ADISA) du Plan wallon de Développement Rural (PwDR).

    Avant d’inciter les acteurs du projet « Générations Terre » à avoir recours à ce système, il y a lieu de s’assurer de l’adéquation de cette technique aux différentes situations culturales en Wallonie. Dans ce contexte, le CRA-W a d’ailleurs déposé un projet lors du dernier appel à projets de la DGARNE, qui vise notamment à valider cette technologie, que ce soit en termes d’efficacité du désherbage, d’impact sur l’environnement et de coût d’utilisation. Il s’agit du projet « AltHerbi » (Évaluation de nouvelles techniques de désherbage non chimique sur des rotations de grandes cultures et de maraîchage).

    Pour conclure, le désherbage électrique n’est probablement pas la solution à tous les problèmes, mais cette technique peut s’avérer très intéressante pour réduire l’utilisation d’herbicides (notamment le glyphosate) et pour lutter contre les plantes résistantes.

    L’intérêt est considérable, essentiellement en agriculture biologique et en production de légumes, mais aussi en défanage des pommes de terre et dans le secteur urbain. En effet, cette technologie pourrait être également une solution de désherbage dans les espaces publics ou encore le long des voies ferrées.