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L'obligation de réalisation d'un audit énergétique dans le cadre des primes "énergie et rénovation"

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 121 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 25/01/2019
    • de STOFFELS Edmund
    • à CRUCKE Jean-Luc, Ministre du Budget, des Finances, de l'Energie, du Climat et des Aéroports
    Le Gouvernement wallon précédent, lors de sa réforme des aides et des primes énergétiques et à la rénovation, avait abandonné l’obligation de réaliser un audit énergétique au préalable estimant que le passage d’un estimateur gratuit était suffisant.

    Le Gouvernement wallon MR-cdH réinstaure l’obligation de l’audit et propose que ces audits fassent l’objet d’une prime pouvant aller de 110 euros pour les revenus annuels supérieurs à 97 700 euros à 660 euros pour ceux qui gagnent moins de 23 000 euros par an.

    Monsieur le Ministre a expliqué : « L’absence d’audit supprime tout contrôle sur la pertinence des travaux énergétiques et écarte la possibilité d’une planification raisonnée des dépenses faites en matière de prime énergie ».

    Faut-il vraiment un auditeur que l’on doit payer pour savoir que l’isolation de la toiture figure parmi les premiers travaux PEB à réaliser ?

    Faut-il vraiment un auditeur que l’on doit payer pour savoir qu’une fenêtre simple vitrage ou double vitrage (mais ancienne) mérite d’être remplacée par une nouvelle à double/triple vitrage ?

    Faut-il vraiment un auditeur que l’on doit payer pour comprendre qu’une chaudière de 40 ans ne peut pas être aussi performante qu’une nouvelle ?

    Il y a des évidences pour lesquelles on n’a pas besoin d’un auditeur, mais bien d’un estimateur qui vérifie si les travaux ont bien été exécutés.

    Alors, l’obligation de recourir à un auditeur payant ne traduit-elle pas, dans certains cas, l’efficacité d’un lobbying de la part de personnes intéressées ?

    Pour d’autres travaux, certes, le recours à un auditeur peut être utile, pour autant que l’auditeur laisse la possibilité aux particuliers de programmer ses travaux proportionnellement à ses moyens ou à sa capacité d’emprunt.
  • Réponse du 31/01/2019
    • de CRUCKE Jean-Luc
    Rappelons une fois encore d’autres évidences :

    1/ Les estimateurs publics ne sont formés et compétents que pour les aspects rénovation/réhabilitation – et n’ont aucune connaissance en matière énergétique ;
    2/ Les estimateurs publics effectuent un contrôle à priori et non un contrôle a posteriori ;
    3/ Les estimateurs publics ne sont pas assez nombreux pour gérer les dossiers de rénovation/réhabilitation (délai allant de 4 mois à 6 mois pour leur passage). Qu’en serait-il si on leur confiait en plus les aspects énergétiques ?

    J’aimerais croire que dès le moment où des évidences s’imposent à la raison, elles sont celles qui guident l’action. Pour ma part, dans le cadre de la réforme des primes « énergie », je peux affirmer que mon action est guidée par l’évidence.

    Néanmoins, force est de constater que ce n’est pas parce que la toiture n’est pas isolée que c’est cette priorité qui sera suivie lors de travaux d’isolation.

    Combien de fois doit-on déplorer qu’une prime pour le remplacement des châssis soit accordée alors que ni la toiture ni les murs ne sont isolés ? Bien trop souvent.

    En annexe, le schéma de la priorité qui doit être donnée.

    A-t-on la garantie, dans le système actuel, que la prime pour l’isolation des murs est bien sollicitée en présence d’une toiture qui est déjà correctement isolée ? Et ainsi de suite.
    La réponse est non.

    La Wallonie a-t-elle les moyens de galvauder l’argent public pour subsidier des travaux qui ne garantiront pas le meilleur retour sur investissement – tant l’investissement économique que climatique ?
    La réponse est encore non.

    Par contre la Wallonie a l’obligation morale de mettre tout en œuvre pour que chaque euro public investi garantisse la plus grande économie de CO².

    Enfin, l’évidence de la moindre performance d’une chaudière vétuste réduit grossièrement l’analyse.
    En effet, l’approche globale d’un bâtiment doit se faire sous l’angle du trias energetica (voir annexe).

    On voit donc que le remplacement d’une chaudière peu performante par une chaudière efficiente intervient au temps 2 de la rénovation, lorsque l’isolation du bâtiment aura permis de réduire le besoin de chauffage – et donc la puissance de la nouvelle chaudière.

    Dans ce contexte, l’auditeur pourra conseiller le demandeur sur tout le panel des solutions qui s’offrent à lui en alternative éventuelle à sa chaudière (pompe à chaleur, chaudière biomasse, solaire thermique, etc.).

    Tant à la lumière d’une affectation optimale des deniers publics qu’en regard de la valeur ajoutée en termes de conseils indépendants de l’auditeur, la réalisation d’un audit démontre, en toutes circonstances, sa pleine pertinence.

    Le dernier élément, s’il en fallait encore un, qui assoit la nécessité de réaliser un audit dans le contexte des primes est la dernière directive en matière PEB : directive 2018/844/UE du 30 mai 2018.

    Celle-ci remplace l’art. 10 § 6 de la Directive 2010/31/UE par ce dispositif :

    « 6. Les États membres subordonnent leurs mesures financières pour l’amélioration de l’efficacité énergétique dans le cadre de la rénovation des bâtiments aux économies d’énergie visées ou réalisées, telles qu’elles sont déterminées par l’un ou plusieurs des critères suivants :
    …/…
    d) les résultats d’un audit énergétique ; »


    Je me permets de douter de l’impact du lobbying des auditeurs énergétiques wallons sur les décisions de la Commission européenne.