/

L'annonce d'un dispositif d'aide à la location d'un kot pour certains étudiants

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 145 (2018-2019) 1

2 élément(s) trouvé(s).

  • Question écrite du 12/02/2019
    • de HAZEE Stéphane
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Le Gouvernement a annoncé l’adoption d’un arrêté relatif à l’aide à la location d’un kot pour les étudiants éloignés de leur lieu d’études.

    Cette annonce a été questionnée sous trois angles :
    - d’une part, le cadrage du dispositif sur le plan territorial ;
    - d’autre part, la non-limitation du dispositif en termes de revenus ;
    - enfin, le critère de mesure de la distance entre domicile et établissement.

    Madame la Ministre peut-elle expliquer la décision prise par le Gouvernement quant aux établissements éligibles ?
    Le dispositif est-il limité aux étudiants wallons qui étudient en Wallonie ? Il a été question de viser également les étudiants fréquentant un site bruxellois d’un établissement dont le siège principal est situé en Wallonie. Qu’en est-il ?
    Pourquoi discriminer les étudiants wallons qui étudient à Bruxelles ?
    Qu’en est-il des étudiants fréquentant un établissement au-delà des frontières ?
    Qu’en est-il également des étudiants issus de la Communauté germanophone ?

    La FEF s’est interrogée sur l’absence de plafond de revenus.
    Peut-elle expliquer la décision du Gouvernement ?
    Une telle approche risque de générer un effet d’aubaine. Le Gouvernement l’a-t-il chiffré ?

    L’UNECOF a exprimé son incompréhension quant au critère retenu pour mesurer la distance, à savoir le temps de trajet en voiture.
    Madame la Ministre peut-elle expliquer la décision du Gouvernement ?
    Elle a annoncé la détermination d’une carte, qu’en est-il ?

    Plus largement, elle a annoncé avoir cherché à établir un tel dispositif de soutien au niveau de la Fédération Wallonie-Bruxelles, sans que cela soit possible. Cette démarche apparaît opportune et de nature à répondre à certaines des difficultés soulevées.
    Qui a bloqué le dossier ?
  • Réponse du 08/03/2019 | Annexe [PDF]
    • de DE BUE Valérie
    Cette question de l’octroi d’une aide aux étudiants éloignée de leur domicile est débattue dans de nombreuses enceintes parlementaires depuis près de 20 ans, à l’initiative des Députés Arens et Lecomte.

    La problématique de l’accès aux études supérieures est essentielle tant pour nos étudiants que pour l’avenir de notre Région. Le texte que j’ai déposé au Gouvernement a permis de mettre cette problématique au-devant de la scène médiatique. Je m’en réjouis.

    De quoi est-il question ?

    Comme l’honorable membre le sait, le Gouvernement wallon réuni le 31 janvier dernier a décidé en première lecture d’octroyer une prime annuelle de 1 000 euros aux étudiants preneurs d’un kot situé en Région wallonne en raison de l’éloignement de leur domicile. Un temps de parcours supérieur à une heure de voiture le jeudi à 8 h du matin a été retenu pour rendre éligible l’étudiant concerné à l’aide.

    Ce texte est le premier déposé en la matière. Le budget nécessaire pour en assurer la bonne application est inscrit au budget régional qui a été voté fin d’année passée. Il est tout de même question de 10 millions d’euros mis sur la table pour aider près de 10 000 étudiants.

    Est-ce une mesure électoraliste ou impréparée ?

    Cette mesure est inscrite dans notre DPR depuis juillet 2017. Je ne fais que l’exécuter.

    J’ai été interrogée 24 fois depuis le début de la législature tant en interpellations, en questions orales, qu’en questions écrites. Cette aide aux étudiants a en outre fait l’objet de questions à l’occasion des quatre débats budgétaires et des deux notes d’orientation politique que nous avons eus lors de cette courte législature.

    À ces nombreuses occasions, j’ai pu expliquer pas à pas, en toute transparence, les pistes successives envisagées par le Gouvernement :
    - la piste fiscale : inscrite en tant que telle dans la DPR , mais assez vite abandonnée à la suite d’une étude de la cellule fiscale de la Région wallonne, raison pour laquelle ce dossier est revenu dans le giron de ma compétence logement ;
    - la piste des allocations familiales que mon cabinet a proposée au cabinet de la Ministre Greoli : les circuits de paiement étant préexistants, une allocation d’étude majorée en août ou septembre pour les étudiants éloignés de leur domicile aurait pu s’ajouter aux dispositifs existants.

    Les allocations étant une matière personnalisable dont l’exercice a été transféré de la Communauté à la Région, cette piste aurait permis une aide aux étudiants wallons où qu’ils étudient que ce soit en Belgique, en Europe ou même dans le monde.

    Cette piste s’est malheureusement heurtée au coût de gestion des caisses d’allocation familiale et au manque de temps pour réaliser les développements informatiques nécessaires eu égard à ceux déjà en cours pour assurer le succès de la réforme des allocations familiales qui a été adoptée dans cette Assemblée.

    Restait donc la piste d’une aide au Logement. Comme l’honorable membre le sait, à cette fin, une habilitation décrétale a été inscrite dans le Code wallon du Logement et de l’Habitat durable en juillet 2018.

    Pour préparer ce cheminement et le texte qui a été soumis en première lecture, de nombreux contacts ont été pris tant avec l’ARES, qu’avec l’IWEPS et un consultant juridique. Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est donnée de remercier l’ensemble de nos interlocuteurs pour leur professionnalisme.

    Cette piste de la compétence logement a l’avantage d’être réalisable dans le timing imparti et moyennant des frais de gestion proportionnés au budget disponible.

    Cette piste a, à l’inverse, comme désavantage d’être limitée, par essence, au territoire régional. À cet égard, je suis étonnée des réactions de certains qui font mine de découvrir que la Belgique est un État fédéral…

    Est-ce que la Fédération Wallonie-Bruxelles n’aurait pas un meilleur lieu pour ce genre d’aide ?

    Peut-être, mais force m’est de constater que rien n’a jamais été fait en la matière… Je comprends aisément que les Ministres Demotte et Marcourt, depuis le temps qu’ils sont aux affaires, soient gênés que leur inaction en la matière soit ainsi pointée du doigt.

    Oui, la Région wallonne est une Région plus rurale que Bruxelles, insuffisamment desservie en transport en commun (hormis les grandes villes) et a fortiori pour rejoindre un lieu d’étude.

    Oui, de nombreux étudiants sont dès lors contraints de koter ou de prendre la voiture pour rejoindre leurs lieux d’étude.

    Non, ces derniers ne sont pas tous riches. Nombreux travaillent pour assumer leurs frais d’étude (y compris l’achat d’une voiture). C’est une réalité pointée par ma collègue Isabelle Simonis (24 janvier 2018) « il est vrai que les études parlent de la grande précarité des étudiants. Mais cette précarité ne se vit pas uniquement en termes du coût de l'enseignement supérieur. Je crois que la précarité des étudiants aujourd'hui est bien plus large. Elle concerne les politiques du logement. Le prix d'un kot aujourd'hui est terrible, les transports, l'alimentation… il y a une vraie urgence politique à traiter cette question de la précarité des étudiants ».

    Cette proposition n’ambitionne pas de régler l’ensemble des problèmes rencontrés par les étudiants (je ne suis pas Ministre de l’Enseignement supérieur), elle se veut complémentaire aux dispositifs existants (Bourses, tarifs transport en commun préférentiel, kots sociaux ou universitaires (qui prennent d’ailleurs en compte le critère d’éloignement pour la sélection des étudiants), et cetera.

    Il n’empêche que nous ne demandons pas mieux que de collaborer avec Bruxelles et la Flandre, avec la Fédération Wallonie-Bruxelles, voire avec d’autres Régions ou Pays pour étendre cette aide et en assurer une réciprocité. Des contacts sont pris pour ce faire, que ce soit via un accord de coopération ou tout autre moyen. Je fais confiance à la capacité d’innovation en termes institutionnels dont la Belgique a si souvent fait preuve… Mon cabinet se réuni en ce moment même avec les cabinets du Ministre-Président bruxellois et de sa Ministre en charge du Logement afin débattre d’un accord de coopération. Une invitation vers ma collègue au Gouvernement flamand a également été lancée. Des étudiants flamands étudient également en Wallonie.

    Si un accord peut-être trouvé afin d’assurer la réciprocité de la mesure dans les autres régions, nous ne nous en plaindrons pas , ais venir critiquer la prise d’une mesure au prétexte que les autres ne font rien relève à tout le moins de l’hypocrisie.

    Est une mesure améliorable ?

    Comme toute mesure adoptée en première lecture, elle est soumise à l’avis de nombreuses instances. Nous attendons les avis du Pôle logement, de l’Union des villes et communes, des fédérations estudiantines et du syndicat des propriétaires.

    Les concertations avec Bruxelles et la Flandre ont été sollicitées ou sont prévues.

    À la lumière de ces avis, nous ne manquerons pas d’enrichir le texte, comme nous l’avons fait pour chaque réforme que j’ai portée.

    Fallait-il prévoir un niveau de revenu ?

    L’intégration d’un critère de revenu dans ce dispositif serait encore une fois de nature à exclure la classe moyenne de ce dispositif d’aide. Comme il le sait, les ménages aux revenus les plus faibles ne sont pas laissés en reste : des allocations d’études (bourses) leur sont déjà réservées, pour 35 000 ménages, d’une moyenne annuelle de 1 126 euros pour un budget de 40 millions d’euros (chiffres 2016-2017). Mais les revenus maxima pour pouvoir y prétendre sont vite atteints : (voir tableau 1 en annexe).

    La classe moyenne est encore une fois exclue et c’est bien la politique menée par le parti socialiste en Communauté française. Les allocations d’études sont réservées à une partie des plus pauvres. La classe moyenne qui contribue le plus aux recettes de l’état n’a droit à rien.

    La mesure wallonne n’exclut pas les ménages à faible revenu , ais nous intégrons aussi, une fois n’est pas coutume, les ménages de la classe moyenne qui paient beaucoup et ne reçoivent rien...nous y consacrons 10 millions d’euros.

    Rappelons enfin que le système des allocations d’études prévoit également des conditions liées au cursus éducatif, à la nationalité , ais aussi à un revenu minima, qui a pour résultat d’en exclure, en priorité, les petits indépendants… (voir tableau 2 en annexe).

    Est-ce une mesure discriminatoire ?

    D’aucuns ont jugé cette mesure discriminatoire en ce qu’elle ne profitera qu’aux étudiants wallons et pour la prise d’un kot situé sur le territoire régional.

    S’agissant d’une aide au logement, politique régionale de compétence territoriale, je suis au regret de l’informer que l’aide ne peut être étendue à la prise d’un logement étudiant situé en dehors des frontières régionales en vertu du principe d’exclusivité des compétences. C’est le Gouvernement bruxellois qui est seul compétent pour octroyer à ses étudiants une aide similaire sur son territoire. Je l’ai dit plus haut.

    À ce titre et sous l’angle de la politique régionale du logement, cette mesure n’est en rien discriminatoire. Les étudiants domiciliés en Région wallonne, quelle que soit leur origine, sont éligibles pour l’obtention de cette prime pour autant que la prise du logement étudiant réponde au critère de distance et bien entendu pour la prise d’un logement situé en Région wallonne en vertu du principe évoqué ci-avant.

    L’honorable membre prétend que le choix de l’établissement d’enseignement devant être situé en Région wallonne discriminerait les étudiants étudiant sur le territoire bruxellois. Je prétends que cette restriction découle tout simplement du fait que le logement doit être situé en Région wallonne et qu’elle permet d’éviter les effets d’aubaine. Qui prendrait un kot situé en Région wallonne pour suivre ses cours dans une autre région ? Est-ce que la prise d’un kot ne se justifie que dès lors que ledit kot est situé près du lieu d’étude ? Je pense que oui et c’est la raison pour laquelle tant le lieu d’étude que le logement étudiant ont été limités au territoire de la Région.

    Cette mesure influence-t-elle le choix de l’étudiant ?

    Il prétend que la mesure pourrait influencer le choix d’une université ou haute école pour obtenir la prime ? C’est considérer qu’un ménage s’exposerait à une nouvelle dépense, des frais de kot que l’on peut estimer à au moins 4 000 euros par an, en vue d’obtenir une prime de 1 000 euros. Pense-t-il réellement que les ménages wallons sont idiots ? Qu’il sache que selon l’enquête réalisée par l’Université de Namur, 85 % des étudiants qui ne prennent pas de kot sont à moins d’une heure de trajet de leur haute école ou Université. La mesure est donc surtout destinée à ces 15 % de non-koteurs qui n’ont d’autres choix que de réaliser des déplacements journaliers de plus de deux heures en raison des coûts d’un kot. Peut-être cette prime sera pour eux significative d’une économie de temps de plus de deux heures de trajets par jour. Trente-six pour cent des étudiants qui ne kotent pas font ce choix pour des raisons de coût.

    Pourquoi une distance calculée sur base d’un trajet en voiture ?

    Concernant la détermination du critère de temps/distance, j’ai bien reçu les remarques de l’UNECOF préalablement à la prise de décision. On prétend que la voiture n’est pas un mode de transport largement utilisé par les étudiants. Cette assertion doit être nuancée. Force est de constater que l’usage de la voiture en milieu rural et pour rejoindre les sites décentrés reste un moyen de déplacement privilégié par les étudiants du supérieur. Je pense - mais mon analyse est personnelle à ce stade - que cette prépondérance de l’usage de la voiture découle de l’insuffisance de l’offre de transports en commun en zone rurale, principalement. Selon l’enquête sur le logement étudiant à Namur réalisée par l’Université de Namur, 11 % des étudiants koteurs disposent d’un véhicule. Le mode de déplacement privilégié reste le train pour 36 % des déplacements, mais la voiture représente tout de même 25 % de l’usage tandis que le bus représente seulement 15 % des trajets. Pour les sites décentrés des hautes écoles situées à Champion et Malonne, la voiture reste privilégiée pour respectivement 46 et 62 % des déplacements.

    L’honorable membre compare mon projet à une usine à gaz en évoquant la méthode de détermination des communes éligibles. Il n’est manifestement pas pleinement informé du contenu de la mesure où il l’a, semble-t-il, mal comprise.

    Nous avons effectivement utilisé des cartes d’isochrones pour mettre ce dossier au point sur le plan technique et avoir une vision cartographique des temps de trajets. Le calcul des isochrones autour de chaque implantation d’étude, c’est-à-dire des zones géographiques correspondant à un temps de trajet identique, a été calculé au départ des données de géolocalisation des implantations fournies par l’ARES.

    C’est donc au départ de ces isochrones cartographiques que l’annexe 2 à la décision du Gouvernement wallon a été rédigée. Avec l’aide de l’IWEPS, nous avons donc listé toutes les implantations d’études situées sur le territoire régional et déterminé au départ des cartes d’isochrones toutes les communes situées totalement ou partiellement à plus d’une heure de voiture pour chaque implantation.

    Le demandeur ne devra pas chercher à établir et démontrer un temps de trajet. Il sait directement s’il est ou non éligible à l’aide sur base de ce critère de distance sans avoir à le contrôler puisque le contrôle est automatique sur base de communes éligibles.

    Cette méthode constitue aussi une simplification importante dans le cadre de la vérification des dossiers par l’Administration, l’éligibilité du critère de distance étant automatique : le demandeur est ou n’est pas domicilié dans une commune éligible pour l’implantation de son choix. Cette méthode est développée pour éviter un coût de contrôle des dossiers administratif qui viendrait consommer la plus grosse partie des crédits si les agents de l’administration devaient vérifier le critère de distance.

    Le jeudi à 8 h a été retenu pour prendre en compte la situation la plus problématique et donc la durée de parcours la plus longue : les lundis, mercredis et vendredis sont moins chargés sur les routes eu égard notamment au travail à temps partiel, au télétravail ou aux congés le plus souvent pris ces jours-là.

    Aussi, j’ai entendu de nombreuses critiques sur ce choix de temps de parcours effectué en voiture : pas représentatif ? C’est faux comme expliqué ci-avant. Pas écologique ? Au contraire, on remplace des trajets en voiture (polluant donc) par la prise d’un logement proche de l’établissement d’enseignement.

    In fine, ce critère n’est qu’un benchmark pour déterminer une difficulté relative pour rejoindre un lieu d’étude en fonction d’un éloignement.

    Quant aux étudiants de la Communauté germanophone, je puis rassurer quant à leur sort. Ils sont également domiciliés sur le territoire de la Région et donc éligibles à l’aide tant que la Communauté germanophone n’aura pas pris son propre dispositif.

    Ma Collègue au Gouvernement en charge de l’action sociale est également Ministre de la Fédération. Je l’invite à lui poser la question de savoir qui à la Fédération a bloqué le dossier.

    J’ai d’ailleurs très bon espoir quant à la volonté affichée par chacun, tous partis confondus, en tous cas au travers des déclarations que j’ai pu lire dans la presse, de vouloir défendre notre préoccupation spécifique.