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L'impact de la réforme du Code des sociétés sur les intercommunales

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 173 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 11/03/2019
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Le Code des sociétés a fait l’objet de plusieurs modifications ces derniers mois, dont la dernière a été adoptée le jeudi 28 février à la Chambre.

    Quels impacts cette réforme a-t-elle sur le fonctionnement des intercommunales ?

    Des modifications du CDLD sont-elles envisagées notamment quant au choix de la forme juridique des intercommunales (société anonyme ou société à responsabilité limitée) ?

    Une information ou une formation aux intercommunales est-elle envisagée ?

    De même, quels sont les impacts de cette réforme sur les ASBL communales et provinciales ?
  • Réponse du 03/04/2019
    • de DE BUE Valérie
    Un groupe de travail concernant la réforme du Code des sociétés, des associations & fondations (ci-après CDSA) a été créé le 28 février 2019 au sein du Service public de Wallonie. Réunissant des représentants de chacune de ses Directions générales opérationnelles, celui-ci a précisément pour tâche d’analyser l’impact d’une telle réforme sur la législation wallonne dans son ensemble. Ce groupe de travail vient de débuter ses analyses et travaux. Par conséquent, à ce stade, je ne suis pas en mesure de détailler tous les impacts techniques que pourrait avoir le nouveau CDSA sur le fonctionnement des intercommunales et sur celui des ASBL communales et provinciales. J’attire l’attention de l’honorable membre sur le fait que les ASBL ont déjà été touchées par la réforme du droit de l’entreprise du 15 avril 2018 (modificative du Code de droit économique) qui, en supprimant la théorie de la commercialité, a fait entrer les associations dans le champ du droit économique, au même titre que les sociétés et d’autres entités visées par cette réforme.

    S’agissant des incidences possibles du CDSA pour les intercommunales, on peut, d’ores et déjà et sans préjudice d’autres aménagements techniques, épingler les aspects suivants :

    1. Le Code de la démocratie locale et de la décentralisation (CDLD) prévoit expressément que le régime qu’il organise est spécial par rapport au régime général du droit fédéral des sociétés et que celui-ci ne trouvera donc à s’appliquer que pour autant qu’il n’y soit pas dérogé dans le CDLD ou dans les statuts des intercommunales (voir notamment les articles L1512-3 et L1523-1, alinéa 2, du CDLD).

    2. La terminologie employée dans le CDLD devra être alignée sur celle du CDSA, tenant compte des dispositions propres à l’entrée en vigueur de ce dernier. Actuellement, le CDLD prévoit que les intercommunales peuvent adopter soit la forme d’une « société anonyme », soit celle d’une « société coopérative à responsabilité limitée ». Dans le nouveau Code, la forme de la « société coopérative à responsabilité limitée » disparaît au profit de celle de la « société coopérative » (comme c’est le cas pour la société privée à responsabilité limitée qui est remplacée par la notion de société à responsabilité limitée). S’agissant du statut de la nouvelle société coopérative, il n’y a pas d’énorme changement de fond par rapport au régime antérieur, si ce n’est ceci : une réglementation autonome est désormais prévue (même si ce régime distinct est très proche de celui de la SRL). Le nouveau régime est réservé aux « vraies coopératives » avec une définition ad hoc inspirée de la société coopérative européenne, dans l’objectif de « visibiliser » ces dernières et d’informer les tiers de l’esprit coopératif, qui préside à leur adoption. Le CDSA prévoit, en outre, un mécanisme d’agrément ouvert aux sociétés coopératives. S’agissant des règles relatives au capital, la coopérative du CDSA bénéficie des assouplissements prévus pour la SRL qui marque la suppression de la notion de capital pour la remplacer par l’obligation de disposer d’un patrimoine de départ suffisant.

    3. Un changement juridique important, touchant toutes les entités soumises au CDSA, concerne l’introduction d’une limitation de la responsabilité des administrateurs à des montants progressifs selon la taille de l’entité.

    4. Pour les nouvelles sociétés : le CDSA entrera en vigueur le 1er mai 2019 avec quelques petits bémols de droit transitoire comme le fait que certains articles relatifs aux comptes et aux agréments entreront en vigueur à une date fixée par le Roi et au plus tard le 1er janvier 2020 (AR d’exécution). Pour les sociétés existantes, le CDSA s’applique le 1er janvier2020. Mais, dès publication au MB, celles-ci pourront appliquer volontairement le CSA qui deviendra alors applicable à partir de la publication des modifications statutaires et au plus tôt le 1er mai 2019. Après le 1er janvier2020, les sociétés mettront leurs statuts en conformité (i) lors de la première modification statutaire et (ii) au plus tard le 1er janvier 2024. À partir du 1er janvier2020 (ou publication de modification statutaire si opt in) certaines dispositions impératives seront toutefois applicables (clauses contraires réputées non écrites). Par conséquent, il est recommandé aux intercommunales existantes d’adapter leurs statuts aux nouvelles dispositions du CDSA idéalement dès prochaine modification des statuts ou, au plus tard, avant le 1er janvier 2024.

    En ce qui concerne les ASBL, le CDLD ne règle spécialement que la composition de leurs organes. La réglementation des autres aspects, organisationnels et fonctionnels-relève d’autres normes, dont principalement le CDSA dès lors que la loi du 27 juin 1921 sur les associations sans but lucratif, les fondations, les partis politiques européens et les fondations politiques européennes est intégrée dans ce nouveau corpus.

    1. Comme évoqué précédemment, la réforme du droit de l’entreprise du 15 avril 2018 a déjà constitué un changement important. La distinction entre sociétés commerciales et sociétés civiles disparaît. Les associations se distinguent des sociétés, non plus sur la base d’un critère de but lucratif, mais sur une exigence pour les associations, d’absence de distribution de bénéfices. Partant, si, désormais, au même titre qu’une société, une association est pleinement autorisée à exploiter des activités économiques générant un bénéfice, elle ne pourra distribuer ni procurer un avantage patrimonial (in)directement à ses fondateurs, administrateurs et membres sauf si cela est nécessaire à la réalisation de son but désintéressé prévu dans les statuts.

    2. Les sociétés, comme les associations, sont qualifiées d’entreprises au sens du Code de droit économique et sont soumises, à ce titre et par exemple, au régime de l’insolvabilité et à la compétence du tribunal de l’entreprise.

    3. Les ASBL pourraient bénéficier d’aides d’État et des aides à l’investissement si elles justifient d’une activité économique.

    4. Les droits et obligations des membres adhérents à une ASBL devront dorénavant être repris dans ses statuts et plus dans un règlement d’ordre intérieur.

    5. Quant au droit transitoire, le CDSA entrera en vigueur dès le 1er mai 2019 pour les nouvelles associations, tandis qu’il s’appliquera aux ASBL existantes à partir du 1er janvier 2020 en principe, sauf modification statutaire qui retiendrait une date d’entrée en vigueur antérieure (opt-in). De surcroît, les ASBL existantes seront priées de mettre leurs statuts en conformité avec les dispositions du CDSA le 1er janvier 2024 au plus tard. Enfin, aussi longtemps qu’une ASBL existante n’a pas modifié son objet statutaire, elle ne pourra mener des activités économiques qu’à titre accessoire (dans les limites des articles 1er et 46 de l’ancienne loi du 27 juin 1921 précitée). L’interdiction de mener des activités économiques à titre principal à défaut d’adaptation de son objet statutaire aux nouvelles dispositions du CDSA ne prendra fin que le 1er janvier 2029.

    À l’heure actuelle, je n’ai pas connaissance de l’organisation prochaine d’une formation ad hoc sur l’impact, pour les entreprises publiques locales, des dernières réformes du droit économique et du droit des sociétés & des associations. Une telle initiative serait incontestablement utile. J’attire néanmoins l’attention de l’honorable membre sur le fait que, le 8 décembre 2017, s’est tenue à Gembloux et sous l’égide de l’Union des villes et communes de Wallonie une journée d’étude sur le sujet, à l’époque où le projet de code était en discussion (http://www.uvcw.be/no_index/articles-pdf/7441.pdf). Je l’invite à porter ce dossier à l’attention de l’Union des villes et communes de Wallonie qui gagnerait à organiser une journée de réflexions tenant compte des dernières mises à jour.