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L'augmentation du prix des logements en Wallonie

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 174 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 12/03/2019
    • de STOFFELS Edmund
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Le prix des maisons a augmenté plus que l’inflation, une première en cinq ans.

    En effet, le baromètre des notaires montre quelques fortes augmentations par rapport à 2017 (+4,7 % pour les maisons).

    En Wallonie, le prix moyen frôle les 190 000 euros (+ 3,7 %), ± 90 000 euros de moins qu’en Flandre.

    Concernant les appartements, les hausses sont moins fortes et moins généralisées.

    De plus, une troisième chambre coûte bien plus cher qu’une deuxième.

    Un appartement comprenant trois chambres est plus cher qu’un appartement deux chambres, qui lui est plus cher qu’un appartement une chambre. Une évidence que les notaires mesurent cash.

    Globalement, il faut compter un tiers de plus pour passer d’une à deux chambres (de 170 000 à 220 000 euros) et de nouveau un tiers de plus pour passer de deux chambres à trois chambres (de 220 000 à 295 000 euros).

    Madame la Ministre a-t-elle procédé à un examen approfondi des effets pervers que peuvent engendrer des aides et avantages accordés aux particuliers quand ils sont candidats-acquéreurs d’un logement ?

    Peut-on exclure que les aides provoquent une explosion des prix, ce qui est de nature à produire des effets contraires à l’objectif visé ?
  • Réponse du 28/03/2019 | Annexe [PDF]
    • de DE BUE Valérie
    La question de l’honorable membre porte sur le constat de l’augmentation en 2018 des prix immobiliers et, plus largement, sur les causes de ces augmentations. Sur ce dernier point, il semble craindre que les aides publiques au logement en fassent partie.

    En ce qui concerne l’augmentation des prix immobiliers, celle-ci n’est pas un phénomène propre à l’année 2018.
    En effet, selon les chiffres annuels des notaires et du SPF-Économie (Statbel), qui divergent entre eux, les prix des maisons ordinaires ont augmenté entre 2015 et 2018 de 0,3 % minimum (Statbel, 2015) à 3,7 % (Notaires, 2018) maximum (voir tableau 1 et tableau 2 en annexe).

    Pour les appartements, on note comme chaque année des augmentations, qui varient elles aussi selon les sources, de 0,4 % (Statbel, 2016) à 3,9 % (Notaires, 2017).

    Dans le même temps, l’inflation (Indice des prix à la consommation) a été de 0,6 % en 2015, 2,0 % en 2016, 2,1 % en 2017 et 2,1 % en 2018 ; soit une moyenne annuelle de 1,7 % sur la période 2015-2018.
    L’année 2018 n’est donc pas exceptionnelle quant à la hausse des prix immobiliers (selon les données notariales) par rapport à l’inflation.

    En outre, il semble que l’écart de prix entre les différentes tailles d’appartements ou de maisons soit resté stable au cours des quatre dernières années, contrairement à ce qu’il affirme.
    En d’autres termes, il n’y a pas eu de renchérissement supplémentaire des prix cette année sur le segment des grands appartements et des grandes maisons par rapport au segment des petits et moyens appartements.

    En Wallonie, selon le Baromètre des notaires, l’écart de prix entre un appartement deux chambres et un appartement une chambre en 2018 est 31,5 % contre 31,7 % en 2014.
    L’écart de prix moyen entre un appartement de trois chambres et un appartement de deux chambres est 32,0 % en 2018 contre 30,3 % en 2014.
    Ces proportions apparaissent très stables dans le temps. Il apparaît que l’augmentation des prix touche donc tous les types de biens, sans distinction du nombre de chambres.
    De plus, entre 2014 et 2018, l’évolution des prix atteignait 10,5 % pour les appartements une chambre et 11,8 % pour les appartements trois chambres en Wallonie. Entre l’année 2014 et l’année 2018, l’inflation était de 6,9 % à titre de comparaison.

    Répondre à la question de l’honorable membre sur les raisons de l’augmentation des prix requerrait un très vaste débat, qui n’a du reste jamais été tranché jusqu’ici de manière univoque et définitive par les experts.

    Face à cette hausse des prix, il faut rappeler l’importance du crédit hypothécaire comme moteur de financement du logement en Belgique et en Wallonie.
    Contrairement à ce qui a été observé dans la plupart des autres pays de la zone euro, la dette hypothécaire des ménages a poursuivi sa progression en Belgique après la crise financière de 2008, pour atteindre plus de 60 % du PIB à la fin de 2017.
    Selon le mécanisme classique de l’offre et de la demande, les prix immobiliers s’établissent donc à leurs niveaux actuels selon les capacités d’emprunt des ménages.

    Dans l’étude de la Banque Nationale de Belgique de juin dernier intitulée « Un nouvel éclairage sur la dette hypothécaire des ménages en Belgique »(Ph. DU CAJU, M. EMIRIS, Ch. PIETTE, M.-D. ZACHARY (2018), « Un nouvel éclairage sur la dette hypothécaire des ménages en Belgique », Revue économique, Banque Nationale de Belgique, pp. 101-119.), l’évolution des revenus des ménages est clairement mise en avant pour expliquer la hausse de l’endettement et donc des prix.

    L’étude, je cite, « fait clairement état d’une relation étroite et positive entre l’accroissement de la dette hypothécaire et l’évolution des revenus des habitants, mais qui varie toutefois selon les groupes d’âge. En particulier, la relation entre dette et revenus est la plus forte pour les personnes âgées de 25 à 44 ans, mais elle tend à s’estomper pour les tranches d’âge supérieures. Cela s’explique notamment par le fait que les plus âgés disposent d’un patrimoine réel et financier plus élevé, qui peut leur servir à réaliser l’investissement ou à limiter les besoins de financement bancaire » (extrait page 117).
    En retour, la hausse des prix entraîne des besoins de financement qui sont satisfaits tant que le système bancaire trouve les garanties suffisantes dans les revenus des ménages.

    De ce point de vue, il est important de rappeler les mises en garde récentes de la Banque Nationale de Belgique dans le cadre des mesures macroprudentielles.
    Au-delà de l’augmentation des prix, le principal problème rencontré actuellement est, toujours selon la Banque Nationale de Belgique, l’existence de « poches de risque sur le marché hypothécaire belge, concentrées au sein de groupes de ménages qui consacrent une large part de leurs revenus au remboursement de dettes et dont les réserves financières pour pallier une éventuelle perte de revenus sont maigres » (extrait page 118).

    En résumé, les aides publiques au logement sont effectivement, en théorie, l’un des nombreux facteurs susceptibles d’influencer la hausse des prix, au même titre que les stratégies d’offre commerciale par les banques de crédit hypothécaire, les déterminants démographiques ou encore les politiques monétaires.
    Je voudrais toutefois rappeler que les aides octroyées par la Région visent à favoriser l'accès à un premier logement (prêts hypothécaires sociaux, chèque habitat, exonération des droits d'enregistrement, assurance contre la perte de revenus, et cetera) et sont tellement ciblées sur les ménages à revenus modestes ou moyens qu’elles permettent surtout d’éviter le décrochage de certaines catégories de ménages dans l’accession à la propriété.
    Constater un potentiel effet pervers à ces aides doit nous encourager à corriger celui-ci, pas à remettre en cause le principe même de solidarité qui fonde ces actions.