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Les craintes de certaines instances à l'égard du projet d’absorption de la Société wallonne du logement (SWL) et du Centre d'études en habitat durable (CEHD) par la Société wallonne du crédit social (SWCS)

  • Session : 2018-2019
  • Année : 2019
  • N° : 188 (2018-2019) 1

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  • Question écrite du 25/03/2019
    • de HAZEE Stéphane
    • à DE BUE Valérie, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives
    Le Gouvernement a annoncé sa volonté de fusionner la SWL, la SWCS et le CEHD pour créer l’Agence wallonne de l'habitation durable (AWHD).

    L’avis de certaines instances est incisif.

    Le Pôle Logement du CESEW regrette ainsi que le Gouvernement n’ait pas opéré une analyse globale du secteur du logement pour déterminer une charpente de l’ensemble, en concertation avec tous les acteurs.

    Il s’est aussi inquiété du calendrier qui crée une incertitude sur les modalités d’application.

    L’UVCW n’a pas dit autre chose dans son avis d’initiative. Les objectifs poursuivis par la réforme sont louables et doivent pouvoir guider une réforme globale du secteur public du logement. Toutefois, la réforme envisagée suscite d’importantes interrogations quant à sa cohérence. L’UVCW déplore l’absence d’analyse globale et concertée avec les acteurs publics du logement permettant d’asseoir les fondements et orientations indispensables à toute réforme d’envergure.

    Quelle est l’analyse du Gouvernement par rapport à ces avis ?
  • Réponse du 24/04/2019
    • de DE BUE Valérie
    Comme l’honorable membre le sait, j’ai souhaité déposer un projet visant le rapprochement des trois UAP faîtiers du Logement (la Société wallonne du Logement, la Société wallonne du Crédit social, le Fonds du Logement des familles nombreuses) et le Centre d’Étude en Habitat durable.

    J’ai déjà eu l’occasion de m’exprimer à de nombreuses reprises à ce sujet.

    Faut-il regretter l’absence du FLW ? Qu’en est-il de sa viabilité financière ? De ses relations avec la nouvelle Agence ?

    Cette question de la fusion du FLW et de la SWCS n’est pas neuve.

    Au-delà de la lisibilité plus grande de l’action régionale en matière de prêts hypothécaires acquisitifs ou à la rénovation, je considère qu’il n’est plus souhaitable que la Région conserve deux organismes de prêts hypothécaires pour 4 700 prêts hypothécaires sociaux.

    Le Fonds du Logement n’a pas pu, à ce stade, être intégré dans l’Agence en gestation. Je le déplore et ceci me permet de rebondir directement sur sa question relative à la viabilité du FLW.

    Un prêt octroyé par le FLW coûte à la Région près de 4,5 fois plus cher qu’un prêt réalisé par la SWCS. Si je peux comprendre que les familles nombreuses occupent, de facto, un logement en moyenne plus grand, qu’une aide plus importante doit dès lors leur être adressée, une telle différence me paraît disproportionnée.

    Des travaux sont d’ailleurs en cours pour identifier les raisons précises de cette différence. Les budgets ainsi épargnés pourraient être orientés vers les 25 % de familles nombreuses les plus précarisées qui n’ont accès à aucune aide régionale tel que l’a identifié la récente étude du CEHD sur le sujet.

    Les organismes de prêts régionaux ne sont pas là pour concurrencer le secteur bancaire privé classique, mais pour offrir une solution quand elle n’existe pas ailleurs.

    Leur plus-value majeure réside dans la qualité de l’accompagnement social qu’ils prodiguent. Sans être exhaustif, cet accompagnement social se matérialise de différentes manières :
    1) a priori, tant en termes d’information, de pédagogie sur les implications de la souscription d’un prêt, les conséquences du fait de devenir propriétaire… ;
    2) quant à la nécessité, les raisons qui justifient d’imposer des travaux pour respecter les critères minima de salubrité/sécurité régionaux, qu’en termes de suivi des travaux, d’aide et de conseil pour le suivi de ces travaux ;
    3) enfin en termes de remboursement des prêts, un suivi rapproché des défaillances de remboursement est organisé (contact rapide dès les premiers constats, plan d’apurement, et cetera).

    Les organismes présentent d’ailleurs des taux de défaillance des crédits souscrits très faibles, a fortiori au regard de la relative faiblesse des revenus moyens de leur public cible. Je me permets d’ailleurs de profiter de l’occasion qui m’est offerte pour souligner l’implication et le professionnalisme des agents de ces organismes en la matière.

    Pour finir sur cet aspect, comme nous avons pu en débattre lors de l’examen du budget 2019, nous n’avons pas pu réserver plus que 50 millions en termes de garantie régionale pour les emprunts qu’ils doivent contracter afin de mener leur politique. En 2019, cela ne posera pas de problème au FLW au regard de l’importance des liquidités dont il dispose, mais elle n’est pas durable. Comme l’honorable membre le sait, la pression sur la Région quant à l’importance de l’augmentation de ses garanties d’emprunt, de sa dette directe et indirecte n’augure pas des lendemains qui chantent en la matière. Le secteur du logement à lui seul représente plus de 6 milliards sur les 21 milliards d’endettement de la Région…

    Quelles sont les plus-values de la réforme ?

    Elle vise à mettre en place un outil permettant une réflexion commune sur la définition et l’application sur le terrain d’une politique intégrée du logement. Comme il a pu le constater, bien que nos trois UAP s’entendent bien, bien que le Ministre Nollet ait essayé d’instituer un « pôle logement » rassemblant ces trois UAP, la collaboration reste insuffisante.

    Une tendance au cloisonnement des politiques est clairement présente. Rassembler ces organismes permettra la définition de cette politique intégrée du logement au départ de l’usager, du bénéficiaire : songeons notamment à :
    - la mise en place d’un parcours de logement du citoyen passant du sans-abrisme au locatif accompagné (bail glissant, association de promotion du logement, housing first…) ou du locatif social au locatif privé (conventionné, accompagné ou non), à l’acquisitif social ou privé ;
    - la mise en place de guichet unique à l’échelle locale permettant de proposer une solution intégrée au problème de logement de chacun ;
    - on peut songer à des passerelles entre le secteur locatif social vendant une partie de son patrimoine grâce aux prêts sociaux ou à la prise en gestion par des sociétés de logement social de biens saisis par l’Agence, faute de remboursement et en dépit de l’accompagnement social mis en place ; à la mise en place de produit de leasing immobilier (mise à disposition de logement et financement par l’Agence)…
    - on peut ajouter la création de produits à destination des copropriétés (conception, étude de dossier, appui technique, financier et administratif, et cetera en vue de la rénovation du parc).
    - et cetera…

    Enfin, l’apport du CEHD se révélera au niveau du saut qualitatif en termes d’approche scientifique de la politique du logement :
    - que ce soit en termes de prospective : le schéma de développement régional du logement identifiant les zones où il est prioritairement souhaité d’implanter du logement public au regard de la demande, de l’offre d’emploi dans la zone, d’offre de formation, d’offre de mobilité ou de présence de service public ou de commerce… ;
    - en termes de supervision scientifique du cadastre du logement ; d’observatoire du logement (locatif via la grille indicative et acquisitif via l’observatoire des prix), et cetera ;
    - en termes d’observatoire des loyers et de la qualité des logements.

    Ne fallait-il pas inclure cette réforme dans le cadre d’une réforme plus globale, concertée très largement (CESE, UVCW) ?

    Je la rejoins d’autant plus que je l’ai moi-même indiqué. Eu égard à la durée de cette législature particulière et au temps nécessaire pour réaliser cette concertation et pour la concrétiser sur le terrain, je me suis concentré sur la première étape. Le rapprochement des UAP constitue un beau et nécessaire début à une réforme de plus vaste ampleur à travers tout le secteur. Elle se devra, à mon sens, de placer les usagers au centre de celle-ci, comme j’ai pu le dire à plusieurs reprises, au-delà des réflexes de cloisonnement, de type « corporatistes ».

    La présente réforme n’a d’autre ambition que d’entamer ces travaux de remise en ordre de marche du secteur du logement, en commençant par les faîtières et en espérant que le FLW rejoigne très rapidement l’Agence.

    Le timing de cette réforme est-il trop serré ?

    Le Gouvernement a choisi de lancer cette réforme début novembre 2018, partant de divers constats. Il est clair que le timing est court. Il est tout aussi clair qu’il convient que cette fusion ne traîne pas en longueur non plus. L’implication du personnel via le Comité de pilotage, le groupe d’appui et les différents groupes de travail participe de la volonté de coconstruire avec le personnel la nouvelle Agence. Dépassant les inquiétudes ou certaines frictions bien naturelles dans un processus de fusion, je salue une implication très forte du personnel dans ces différents groupes : près de 300 membres du personnel impliqués dans l’ensemble des groupes de travail soit quasi l’ensemble du personnel des entités concernées. Je profite d’ailleurs de l’occasion qui m’est ici donnée pour les remercier chaleureusement pour leur implication, la qualité et la rapidité de leur travail au sein des différents groupes mis en place. Je suis positivement surprise par l’état d’avancement des travaux. En voyant cela, en voyant la compétence que nous avons dans ces organismes, j’ai hâte de voir le bébé une fois l’accouchement réalisé.

    Une telle implication a nécessairement des effets sur le travail au quotidien des agents. Les Conseils d’administration respectifs en sont bien conscients, une priorisation des projets est en cours d’élaboration.

    Quelles sont les garanties en matière d’emploi ?

    Comme je l’ai déjà indiqué dans la question de l’honorable membre du 30 octobre 2018, l’intégration de trois structures au sein d’une seule et même entité n’impactera en rien les emplois en place actuellement au sein des différentes institutions, y compris dans les services « support » dupliqués dans les entités concernées. Actuellement, le Comité de pilotage de la fusion a mis en place, en parallèle, un groupe de travail RH et une cellule d’experts RH. L’objectif actuel étant de faire un état détaillé de chacune des situations particulières des travailleurs.

    À ce stade, nous pouvons assurer que les agents et membres du personnel des trois organismes rassemblés seront soumis au Code de la fonction publique avec la particularité pour les travailleurs du CEHD d’être transférés comme membres du personnel scientifiques. Les arrêtés du Gouvernement relatifs au transfert du personnel seront présentés au Gouvernement en même temps que la troisième lecture de l’avant-projet de décret créant l’Agence.

    Qu’en est-il de la présence des syndicats dans le comité de pilotage de l’Agence en gestation ?

    Il n’a pas effectivement pas été possible d’intégrer les organisations syndicales au Comité de pilotage : outre le fait que le Gouvernement n’en avait pas décidé ainsi lors de la première lecture en novembre dernier, seules deux organisations syndicales sur les trois ont exprimé cette demande. La troisième refusant expressément de s’y retrouver pour conserver un droit à la critique. Il n’est donc matériellement possible de contenter tout le monde.

    Partant de ce constat, le Comité de pilotage a proposé la création d’un espace intermédiaire de discussions entre le Comité de pilotage et les groupes de travail permettant un échange mutuel des avancées d’une part et des inquiétudes ou questions du personnel d’autre part. Cette proposition a été refusée par l’ensemble des organisations syndicales.

    Une communication systématique des avancées de la fusion est réalisée à destination de l’ensemble du personnel concerné à l’issue de chaque réunion du Comité de pilotage. Un espace électronique est prévu pour que le personnel puisse exprimer, le cas échéant anonymement, ses questions, souhaits ou craintes. Des agents « de confiance » ont également été désignés à cette fin.

    Qu’en est-il de la tutelle sur les OFS ?

    Aucun changement n’est envisagé pour le moment, et ces organismes n’ont aucune inquiétude à avoir. Que du contraire, nous avons passé, le 7 février 2019, en deuxième lecture la modification de l’arrêté du Gouvernement wallon du 13 décembre 2013 qui les réglementent. Cette modification porte d’une part, sur un changement de procédures qui permettra à l’avenir d’objectiver les nouvelles demandes d’agrément (actuellement, premier arrivé, premier servi, et ce, jusqu’à épuisement des crédits budgétaires), d’autre part, sur une revalorisation des financements pour les régies de quartier et pour les associations de promotion du logement. Elle est actuellement à l’examen du Conseil d’État.