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La demande de permis pour le stockage des combustibles usagés sur le site de la centrale nucléaire de Tihange

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2019
  • N° : 8 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 25/09/2019
    • de DEMEUSE Rodrigue
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    En janvier dernier, Engie-Electrabel a introduit une demande d’autorisation auprès de l’Agence fédérale de contrôle nucléaire (AFCN) pour la construction d’un ensemble de trois bâtiments sur le site de la centrale nucléaire de Tihange, visant à stocker les combustibles usés après leur passage en piscine de refroidissement.

    Ce projet suscite de nombreuses inquiétudes dans la population, mais aussi parmi les communes voisines de Tihange. Cinq d’entre elles ont ainsi émis un avis négatif à propos de cette demande de permis. Plus récemment, le Gouvernement hollandais s’est lui aussi inquiété du projet.

    Parmi les inquiétudes relevées, notons notamment la durée bien trop longue de ce stockage prévu jusqu’en 2100, sans aucune garantie de conservation et de contrôle durant 80 ans, l’absence de résistance aux chutes d’avions gros porteurs, ou encore le surdimensionnement manifeste du bâtiment envisagé.

    Suite à cette mobilisation du terrain, l’administration de l’aménagement du territoire aurait également transmis un premier rapport très négatif aux autorités fédérales en charge du contrôle nucléaire.

    Monsieur le Ministre pourrait-il m’indiquer si cette information est exacte et, le cas échéant, le contenu du rapport transmis par l’administration ?

    Par ailleurs, selon la presse, des questions procédurales semblent se poser quant à la compétence des autorités chargées d’octroyer le permis.

    Pourrait-il me dire quelle autorité prendra la décision définitive d’octroyer ou non le permis sollicité ?
  • Réponse du 17/10/2019
    • de BORSUS Willy
    ELECTRABEL SA - Centrale nucléaire de Tihange a introduit le 9 mai 2019 une demande de permis d’urbanisme, relative à un bien sis à l’avenue de l'Industrie, 1, 4500 Huy cadastré Huy 4e Division, Section A, N°20 N 2,20 P 2,309 D 4,309 V 4,315 W et ayant pour objet la construction de trois bâtiments destinés à la manutention et à l'entreposage temporaire d'emballages contenant du combustible nucléaire usé.

    La demande complète a fait l’objet, en application de l’article D.IV.33 du Code, d’un accusé de réception envoyé en date du 24 mai 2019.

    La demande de permis comprend une étude d’incidences sur l'environnement réalisée pour le motif suivant : projet repris dans la liste des projets soumis à EIE de l'arrêté du 4 juillet 2002 relatif aux activités classées et projets soumis à EIE.

    Le bien est situé en zone d'activité économique industrielle au plan de secteur de Huy–Waremme approuvé par A.R. du 20 novembre 1981 et dans le périmètre du schéma d’orientation local (PCA n° 1 de Tihange approuvé par A.M. du 10 juin 1992) qui n'a pas cessé de produire ses effets pour le bien précité.

    Le projet se rapporte à une ou des parcelles pour laquelle (ou lesquelles) des démarches de gestion des sols ont été réalisées ou sont à prévoir – couleur pêche (art 12 §2 et §3 du décret du 1er mars 2018).

    Il se situe également dans un zoning de la S.P.I. : A.E. du 10 février 1967, le long d'une route régionale (n° 90), dans un périmètre ERRUISSOL de type faible, le long d'un cours d'eau navigable et d'un cours d'eau non navigable (catégorie 3).

    De plus, les actes et travaux concernent une entreprise SEVESO.

    L’enquête publique a eu lieu conformément aux articles D.VIII.7 et suivants du Code et a été réalisée du 12 juin 2019 au 12 juillet 2019 ; 259 lettres de réclamations ont été introduites dans les neuf communes concernées situées dans le rayon de 5 km.

    Les instances consultées se sont exprimées de la façon suivante :

    L’avis de l’AFCN est libellé comme suit :
    « Dans votre courrier du 23 mai 2019, vous demandiez à l'AFCN de transmettre dans un délai de 30 jours son avis sur la demande de permis d'urbanisme pour le projet « Construction de trois bâtiments destinés à la manutention et à l’entreposage temporaire d'emballages contenant du combustible nucléaire use » d'Electrabel S.A. Pour ce même projet, le 2 mai 2018, l'AFCN a reçu de son côté une demande d'autorisation sur base de l'article 6 de l'arrêté royal du 20 juillet 2001 portant règlement général de la protection de la population, des travailleurs et de l'environnement contre le danger des rayonnements ionisants.
    En retour à votre courrier, le 19 juin 2019, l'AFCN vous a informé que, compte tenu de la durée de l'enquête publique, du temps nécessaire pour la formulation des avis des collèges échevinaux, de la demande d'avis à prévoir ensuite auprès de la Députation permanente, l'AFCN n’était pas en mesure de donner son avis dans les 30 jours.
    L'ensemble des avis des collèges échevinaux et les résultats de l'enquête publique sont disponibles à l'AFCN depuis le 22 août 2019. Conformément à la procédure, l'AFCN a alors demandé, le 3 septembre 2019, l'avis de la Députation permanente, à remettre dans un délai de 30 jours.
    Actuellement, le dossier n'est donc pas complet. En conséquence, l'AFCN ne peut pas encore émettre un avis sur la demande d'autorisations sur base de l’article 6 de l'arrêté royal du 20 juillet 2001.
    Concernant votre demande d'avis pour le permis d'urbanisme, l'AFCN considère que les travaux planifiés n'entraînent pas de risques particuliers pour les installations nucléaires existantes de la centrale nucléaire de Tihange. L'AFCN n'a donc pas de remarque sur cette demande de permis d'urbanisme.
    Comme expliqué ci-dessus, l'AFCN se prononcera ultérieurement sur les aspects concernant la sûreté nucléaire et la radioprotection de ce projet, et ce dans le cadre de la procédure d'autorisation, en conformité avec l'article 6 de l'arrêté royal du 20 juillet 2001. »

    Pour ce qui concerne les autorités communales, neuf communes sont situées dans un rayon de 5 km.

    Quatre communes voisines sont défavorables au projet.

    La commune voisine d’Andenne, hors périmètre d’étude, s’est également manifestée en défaveur du projet.

    Pour ce qui concerne les CCATM, trois CCATM de communes concernées sont défavorables au projet.

    L’avis rendu à l’AFCN reprend en plus des informations ci-dessus :
    - la description urbanistique du projet et les motivations relatives à la conformité du projet à la zone au plan de secteur à savoir :

    Considérant que les bâtiments sont de type industriel ; que la finition des parois, concernant les bâtiments ASB et AUX, est en bardage métallique vertical de couleur gris clair.

    Considérant que la finition des parois du bâtiment SFB consiste en une peinture sur béton de couleur gris clair.

    Considérant que ce bâtiment SFB est conçu afin de refroidir l'espace intérieur via une ventilation naturelle et passive ; que l'air extérieur pénètre dans le bâtiment par des ouvertures aménagées dans les parois latérales extérieures et traverse les plénums (halls de surveillance) avant de pénétrer dans le hall d'entreposage via des ouvertures pratiquées au niveau du sol dans le mur intérieur.

    Considérant que l'air réchauffé par contact avec les emballages est évacué via les ouvertures du toit.

    Considérant que les bâtiments sont conformes à la destination de la zone ;

    Considérant en effet que l’article D.II.30 du CoDT prévoit :

    Art. D.II.30. De la zone d’activité économique industrielle.

    La zone d’activité économique industrielle est destinée aux activités à caractère industriel liées à un processus de transformation de matières premières ou semi-finies, de conditionnement, de stockage, de logistique ou de distribution. Elles peuvent s’exercer sur plusieurs sites d’activité.
    Y sont admises les entreprises de services qui leur sont auxiliaires ainsi que les activités économiques qui ne sont pas à caractère industriel et qui doivent être isolées pour des raisons d’intégration urbanistique, de mobilité, de sécurité ou de protection environnementale. La vente au détail y est exclue sauf lorsqu’elle constitue l’accessoire d’une activité économique visée aux alinéas 1er et 2.
    Peuvent être autorisés pour une durée limitée :
    1° dans les zones d’activité économique industrielle, les dépôts de déchets inertes ;
    2° dans les zones d’activité économique industrielle situées le long des voies d’eau navigables, les dépôts de boue de dragage.

    Considérant que du point de vue architectural, le projet proposé est de nature à s’intégrer au site bâti composé d’un nombre important de bâtiments à caractère industriel ; qu’en cela il ne compromet pas le caractère architectural du bâti existant ;

    Les alternatives suivantes, étudiées dans l’EI, n’ont pas été retenues.
    Alternative zéro : (maintien situation existante) : postposition du démantèlement.
    Alternatives techniques : autre type d’entreposage (canister ou DPC, piscine, bâtiment hors-sol ou enterré, bunkérisé ou non).
    Alternative de localisation : sur le même site ou autre site (mais nécessite transport) ;

    En vertu de l’article D.IV.22 du Code, le fonctionnaire délégué est en principe compétent puisque le permis concerne, en tout ou en partie, des actes et travaux :
    - 2° d’utilité publique inscrits sur la liste arrêtée par le Gouvernement ;
    - 6° situés dans le périmètre visé à l’article 1er 1°, du décret du 2 février 2017 relatif au développement des parcs d’activités économiques.

    Cependant, l’article D.IV.25 du Code prévoit que :

    Le permis est délivré par le Gouvernement lorsqu’il concerne les demandes de permis relatifs aux actes et travaux pour lesquels il existe des motifs impérieux d’intérêt général.

    Vu l'enjeu régional du projet, le fonctionnaire délégué a estimé dans le cadre de l’avis rendu à l’Agence Fédérale de Contrôle Nucléaire en date du 26 septembre 2019 que la décision s'avérait stratégique notamment au regard de la Déclaration de politique régionale et du Schéma de développement régional et donc devrait relever de la compétence du Gouvernement wallon par souci de garantir également un parallélisme des formes par rapport à la législation fédérale.

    Celle-ci précise en effet :
    Arrêté royal du 20 juillet 2001 portant règlement général de la protection de la population, des travailleurs et de l'environnement contre le danger des rayonnements ionisants.
    Chapitre 2, section2, Article 6 : Régime d'autorisation des établissements de classe I.
    6.1 Autorité compétente pour délivrer l'autorisation :
    Les établissements de classe I doivent être en possession d'une autorisation de création et d'exploitation accordée et confirmée par le Roi.
    6.7 Décision :
    Notre décision prise sous forme d'arrêté est contresignée par le Ministre qui a l'intérieur dans ses attributions.
    L'autorisation de création et d'exploitation est refusée quand l'avis du Conseil scientifique est défavorable. Lorsque l'avis est favorable et que, néanmoins, l'autorisation est refusée, l'arrêté de refus mentionne les raisons pour lesquelles l'avis n'a pas été suivi. L'avis du Conseil scientifique est annexé à l'arrêté visé au premier alinéa. La décision favorable peut être assortie de conditions ; celles-ci fixent, entre autres, le contenu du rapport de sûreté.

    Je puis indiquer à l’honorable membre que la décision du fonctionnaire délégué doit être prise au plus tard le 31 octobre 2019.

    En ce qui concerne la suite de la procédure, un recours est toujours possible auprès du Gouvernement wallon, en application du CoDT. Cette compétence m’a été déléguée par l’arrêté de délégation de compétences.

    Un recours est donc possible en application du CoDT auprès du Gouvernement wallon si le demandeur de permis le souhaite.