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Les "maisons pirates"

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2019
  • N° : 5 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 18/10/2019
    • de CLERSY Christophe
    • à MORREALE Christie, Ministre de l'Emploi, de la Formation, de la Santé, de l'Action sociale, de l'Egalité des chances et des Droits des femmes
    En 2018, on dénombrait une cinquantaine de structures d’hébergements non agréés (SHNA) en Belgique francophone.

    Ces structures, parfois qualifiées de « maisons pirates », sont souvent le dernier refuge pour des personnes qui cumulent plusieurs problématiques : sans-abrisme, santé mentale, polytoxicomanie, passé carcéral, handicap, et cetera. Celles-ci comblent un vide face au manque flagrant de places dans les structures subventionnées et donc contrôlées par les pouvoirs publics.

    Dans ce cadre, Madame la Ministre peut-elle me préciser quelles sont les mesures qu’elle a prises pour combler ce manque de places dans les structures officielles ?

    Quelles sont les mesures prises pour améliorer la qualité et la sécurité dans ce type d’hébergement ?

    Connaissant les impératifs budgétaires liés à cette mise aux normes, le maintien de l’ensemble des structures est-il assuré ?

    Pourrait-elle me communiquer le détail pour chacune des structures des mesures envisagées ?

    Plus globalement, quelles sont les pistes prises pour améliorer la qualité et la sécurité dans ces établissements ?

    D'autre part, il y a quelques mois, en lien direct avec ces SHNA, le Médiateur de la Wallonie et de la Fédération Wallonie-Bruxelles énonçait une série de recommandations :
    - la mise en place d'un état des lieux exhaustif de ces structures afin d'harmoniser le traitement de la demande et de l'offre et d'objectiver les carences de type ainsi que le nombre de places ;
    - l'étude des conditions d'un véritable travail en réseau d'établissement de partenariat et de convention avec les SHRNA.

    Madame la Ministre pourrait-elle me faire connaître les mesures que ses services ont prises afin de rencontrer ces recommandations et m’en fournir le détail ?

    Par ailleurs, et à mon sens, c'est le point le plus important, les « maisons pirates » avec leur public « mixte » entrent difficilement dans les cases législatives qui régissent les différents secteurs. Un décret a été voté le 28 mars 2018 au Parlement wallon à cet effet. Celui-ci devait rentrer en vigueur au plus tard dans les six mois suivants le vote.

    Dès lors, Madame la Ministre peut-elle me faire un état des lieux relatif à la mise en application de ce décret ?

    En conclusion, j’aimerais également connaître plus globalement son analyse politique de ce dossier.
  • Réponse du 29/11/2019
    • de MORREALE Christie
    Le décret du 28 mars 2018 insérant dans le Code wallon de l’action sociale et de la santé des dispositions relatives à l’hébergement collectif de personnes en difficultés prolongées est entré en vigueur six mois après sa publication au Moniteur belge le 30 avril 2018, soit le 30 octobre 2018. L’arrêté d’exécution a été adopté par le Gouvernement sortant, mais n’est pas encore publié au Moniteur belge. Il doit notamment fixer la manière d’évaluer le dispositif, conformément à l’article 694/39 introduit dans le Code décrétal.

    Le Parlement de Wallonie a procédé à des auditions dans le cadre de l’adoption de la proposition de décret, le texte n’a été soumis à aucun organe consultatif, ni à l’avis du Conseil d’État ou encore à celui de l’Inspection des Finances.

    En revanche, même si d’aucuns trouvent louable que l’on construise des solutions pour mieux réguler « les maisons d’hébergement collectif de personnes en difficultés prolongées, les instances de l’AVIQ tels le comité de branche Bien-être et Santé, la Commission wallonne de la santé ou encore la Fédération des CPAS, ont émis des remarques importantes par rapport au dispositif et à sa mise en œuvre.

    La Commission wallonne de la Santé a, en outre, estimé que le projet ouvrait une voie royale à la dérégulation du secteur de l’hébergement (tous sous-secteurs confondus : handicap, toxicomanie, santé mentale, personnes âgées,) en permettant à des institutions d’être agréées et éventuellement financées tout en respectant des normes moins contraignantes que ce qui existe actuellement dans différents secteurs.

    C’est la raison pour laquelle, cette Commission, à l’unanimité des membres a remis un avis négatif sur le projet d’arrêté estimant que ce texte présentait, au contraire plus de dangers que de solutions à la situation telle qu’elle existe sur le terrain.
    En effet, le décret répond de manière minimaliste aux situations visées et aux besoins de publics fragiles, voire précarisés. Il met les secteurs en concurrence avec un risque accru de marchandisation des problématiques sociales. Rappelons que les situations rencontrées sont multiples et complexes.

    Le décret actuel n’assure pas que ces structures soient en capacité de répondre aux besoins spécifiques mettant en danger les personnes si aucun soin spécifique ne leur est prodigué.

    À titre d’exemples, ont été relevés des points aussi fondamentaux que l’absence de définition de « personnes en difficultés sociales prolongées », l’acceptation de toute demande sans pouvoir veiller à l’équilibre collectif de l’établissement, la tenue d’un dossier individuel qui ressemble plus à un dossier médico-social sans respect de la vie privée ou du secret médical, et ce, sans encadrement qualifié. Pire encore, la possibilité pour les structures de refuser l’hébergement de personnes ayant de faibles moyens.

    Face à ces critiques, il n’était pas pensable de mettre en place le dispositif sans mettre en danger les gestionnaires qui s’y engageraient, les secteurs agréés et surtout les personnes qui y séjourneraient.

    Dans un premier temps, il est apparu aux négociateurs que le travail devait être remis sur le métier sur la base d’une analyse de l’existant, des besoins et avant tout d’une véritable concertation avec les acteurs de terrain et les représentants des publics visés.

    Il est prématuré de pouvoir communiquer le détail pour chacune des mesures puisque le texte est en révision comme expliqué ci-dessus. Révision qui pour rappel s’intègre pleinement dans le suivi et la mise en œuvre de la déclaration de politique régionale

    Néanmoins, l’AVIQ a déjà procédé à une enquête auprès de toutes les communes wallonnes afin d’identifier l’offre correspondant à ce type d’hébergement. Le cadastre est établi et doit maintenant faire l’objet d’une analyse, ce qui constitue une première étape.

    Un plan de travail sera prochainement défini afin d’atteindre l’objectif qui reste de mettre à disposition des publics fragilisés une solution d’hébergement et de prise en charge qui répondent à leurs besoins, mais aussi à leurs attentes avec toutes les garanties nécessaires qui s’imposeront aux différentes problématiques rencontrées tant en qualité de service qu’en sécurité.

    Le Gouvernement restera attentif à l’évolution des travaux et du plan de travail en cours afin que les personnes prises en charge le soient dans des conditions dignes et respectueuses que nous sommes en droit d’exiger sur le territoire wallon.