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L'avenir de la pisciculture en Wallonie

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2019
  • N° : 82 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 26/11/2019
    • de COURARD Philippe
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    La pisciculture est le type de production aquacole prédominant en volume en Wallonie.

    Cela dit, il y a presque un an, la presse s’inquiétait du sort de la pisciculture wallonne, allant même jusqu’à dire que l’activité pourrait bien disparaître si aucune mesure n’était prise.

    Des propos qui corroboraient d’ailleurs ceux de l’Association des aquaculteurs de Wallonie, laquelle dénonçait alors un manque de reconnaissance, d’aides publiques et de soutien financier, entre autres, en plus de la concurrence étrangère.

    La situation semble toujours aussi inquiétante pour le secteur... En effet, aujourd’hui, on ne dénombre plus que quelque 25 pisciculteurs en Région wallonne (contre 120 il y a 30 ans), la majorité d’entre eux devant par ailleurs exercer une activité complémentaire pour vivre décemment.
    De plus, la moyenne d’âge de ceux-ci se situe entre 60 et 65 ans et les repreneurs sont très rares.

    Dans ce contexte, quelle politique et quelle stratégie Monsieur le Ministre entend-il mettre en œuvre par rapport à la pisciculture wallonne, notamment en vue de garantir son développement et sa pérennité ?

    Quel avenir envisage-t-il pour nos pisciculteurs ?

    Compte-t-il réanalyser la législation européenne actuelle sur les aides d’État à la pisciculture et, le cas échéant, interpeller ses homologues au sein de l’Union européenne pour tendre vers une reconnaissance de la sécheresse comme calamité naturelle pouvant faire l’objet d’une intervention du Fonds des calamités, à l’instar de ce qui se fait pour les agriculteurs ?
    Ou encore faire en sorte que nos pisciculteurs puissent compter sur les financements du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche ?

    Qu'en est-il par ailleurs des aides aux investissements pour les pisciculteurs wallons ?
  • Réponse du 17/12/2019
    • de BORSUS Willy
    La situation dressée par l’honorable membre est effective. Des aides ont été mises en place depuis un an, mais la situation du secteur aquacole en Wallonie reste précaire et préoccupante.

    Le règlement (UE) n° 1388/2014 exclut la sécheresse des calamités naturelles pouvant faire l’objet d’une aide publique pour les acteurs du secteur aquacole. Nous avons donc été contraints de nous limiter à une aide de maximum 30 000 euros par producteur, autorisée par le règlement (UE) n° 717/2014 (aides de minimis en aquaculture).

    Un arrêté du Gouvernement a été adopté le 16 mai 2019 afin de pouvoir aider nos pisciculteurs touchés par cette sécheresse. Alors que le secteur annonçait de nombreuses exploitations touchées, trois demandes d’aides ont été réceptionnées à ce jour. Deux d’entre elles ont déjà fait l’objet d’un versement d’aides, alors que la troisième (réceptionnée le 20 novembre) est en passe d’aboutir très prochainement. Les représentants du secteur aquacole, au sein du Collège des producteurs wallons (SOCOPRO), n’ont pas écho d’autres demandes qui devraient nous parvenir.

    Les deux seuls aquaculteurs ayant subi, à notre connaissance, des pertes pour plus de 30 000 euros ont introduit une demande d’aide. Ce n’est donc visiblement pas la faiblesse du plafond qui empêche les autres aquaculteurs touchés d’introduire une demande d’aide.

    Le Programme wallon pour le secteur commercial de la Pêche (PwSCP) cofinancé par le Fonds européen pour les affaires maritimes et la Pêche 2014-2020, élaboré en concertation avec les acteurs du secteur, prévoyait la mise en place de nouvelles mesures d’aides en Wallonie, plus adaptées aux moyens et aux pistes de développement du secteur aquacole.

    Le 25 avril 2019, le Gouvernement a adopté deux arrêtés relatifs aux aides à l’investissement dans les secteurs de la production aquacole et de la transformation des produits de la pêche et de l’aquaculture. Outre l’inclusion d’une nouvelle mesure d’aide, dédiée à l’installation d’une première exploitation aquacole (avec un taux d’aide de 50 %), les dispositions fixées dans ces arrêtés présentent différents avantages majeurs pour le secteur :
    - la mise en place d’une procédure unique, au sein du SPW-ARNE, de demande d’aide à l’investissement (en aquaculture et transformation des produits de la pêche et de l’aquaculture). Ces aides étaient antérieurement traitées par le SPW-EER pour l’aide régionale, puis par le SPW-ARNE pour la part européenne de l’aide ;
    - la mise en place d’un régime d’aide spécifiquement consacré aux moyens de protection contre les espèces protégées et bénéficiant d’office d’une aide de 50 % (le maximum admissible réglementairement) ;
    - l’augmentation du plafond d’aide pour les investissements productifs en aquaculture (jusqu’à 400 000 euros/aquaculteur, contre 200 000 euros auparavant) et des taux d’aide pour les investissements précités et ceux réalisés en transformation (jusqu’à 40 %, contre un taux moyen de 25 % antérieurement).

    Outre une demande émanant d’un transformateur, deux demandes d’aide à l’investissement ont été réceptionnées à ce jour et sont actuellement traitées.

    Le 21 février 2019, le Gouvernement a adopté deux autres arrêtés relatifs aux aides à la conversion à la production aquacole biologique. Cette aide peut atteindre le forfait de 25 000 euros pour celui qui réalise le cycle complet d’élevage selon les règles de production biologique. Une demande d’aide a été réceptionnée à ce jour et une aide publique a été octroyée.

    Le nombre de demandes reçues jusqu’ici (y compris pour des dédommagements de pertes subies) témoigne de la morosité qui touche les aquaculteurs. Nos aquaculteurs artisans, effectivement d’une moyenne d’âge proche de la retraite, sont faiblement enclins à investir, alors que la concurrence étrangère les restreint à des marchés de niche.

    Il est alarmant de constater le manque de jeunes repreneurs et le manque de nouveaux investisseurs dans des installations innovantes, à taille industrielle, susceptibles de mieux se positionner sur le marché de l’alimentation humaine.

    Si la situation actuelle perdure, la pérennité de l’activité aquacole sur le territoire wallon est effectivement compromise.

    À ce jour, le secteur est reconnu (stratégie spécifique et intégration de l’activité aquacole dans le code agricole wallon).

    Il fait également l’objet de régimes d’aides, au sein d’un programme régional.

    Il faut maintenant préparer l’avenir et, notamment, le programme 2021-2027 cofinancé par le Fonds européen pour les Affaires maritimes et la Pêche. Ce programme devra définir une stratégie visant le rajeunissement du secteur, le maintien de son savoir-faire en y investissant (notamment pour le développement d’une activité moins polluante et plus parcimonieuse en eau) et en diversifiant les débouchés (bio, et cetera). Les enjeux sont importants, car ils portent sur la sauvegarde d’un savoir-faire d’artisans avec des produits de très haute qualité et une activité de notre patrimoine socioculturel. Ils comportent également un enjeu économique régional si nous ne voulons pas dépendre exclusivement d’importations pour l’approvisionnement de nos citoyens en poissons (et autres aliments du secteur). La production aquacole mondiale démontre une forte croissance pour remplacer les produits de la pêche en mer et ainsi réduire la pression sur cette ressource naturelle. Notre région ne dispose pas de certains atouts naturels, tels que l’accès à la mer ou à des ressources hydriques importantes et stables tout au long de l’année. Elle peut, par contre, se targuer d’un savoir-faire des producteurs actuels et d’une connaissance scientifique de haut niveau, y compris dans des techniques innovantes permettant notamment d’être moins dépendant de l’approvisionnement en eau.