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La prise en compte de la cohésion sociale dans les politiques d'aménagement du territoire

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2019
  • N° : 92 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 02/12/2019
    • de GAHOUCHI Latifa
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Dans une interview accordée à la DH en date du 25 octobre dernier, Monsieur le Ministre a déclaré que la Wallonie pourrait acheter des terrains à bâtir situés en zone plus rurale afin de retirer ceux-ci du marché et d’inciter les Wallons à aller en ville.

    Ne pense-t-il pas qu’en agissant de la sorte, donc en diminuant volontairement le nombre de terrains à bâtir disponibles sur le marché, ceux-ci se faisant plus rares, il va induire une augmentation des prix ?

    D’autre part, il déclare : « On aura un portefeuille vivant avec des terrains aujourd’hui en zone urbanisable que nous destinerions à ne pas être urbanisés, à être rendus à la nature », « on pourra échanger des terrains, faire de la compensation en disant ceci devient bâtissable, en revanche ceci ne l’est plus ».

    Ne craint-il pas, d’une part, de dévaloriser le prix des terrains à bâtir (et des autres biens immobiliers) dans les zones rurales (puisque les gens ne pourraient plus y construire leur maison) et, d’autre part, de gonfler le prix des terrains à bâtir et des biens immobiliers proches des centres-villes ?

    Le prix de l’immobilier ne cesse de grimper et rend donc l’accès à la propriété plus difficile d’année en année. La Région wallonne est la moins chère actuellement. Néanmoins, au premier semestre de 2019, selon Statbel, l'office belge de statistique qui a publié en septembre dernier les chiffres belges de l’immobilier pour le premier semestre 2019, (sur la base des transactions immobilières effectives), les maisons de type fermé ou demi-fermé ont affiché un prix médian de 145 000 euros, soit une hausse de prix de 5,5 % par rapport à la même période l’an dernier. Le prix médian des maisons de type ouvert a progressé en Wallonie de 6 000 euros (+2,6 %) pour atteindre 236 000 euros. Avec un surcoût de 5 000 euros, les appartements sont devenus 3,6 % plus chers et coûtaient 145 000 euros.

    Le souhait de Monsieur le Ministre d’inciter les Wallons à réinvestir les villes en limitant les autorisations de construction en zones plus rurales et/ou en achetant des terrains à bâtir afin de les enlever du marché ou de rendre certaines zones constructibles en zones inconstructibles, ne risque-t-il pas de créer des zones ou des communes « élitistes » où le prix de l’immobilier sera tellement cher que seuls les citoyens les plus nantis pourront y avoir accès et, a contrario, développer au fil du temps des zones ou des communes « ghettos » pour les autres. En d’autres termes, au lieu de favoriser la mixité sociale, en agissant de la sorte, je crains qu’indirectement la Wallonie se divise de façon discriminatoire. Actuellement des grandes disparités apparaissent déjà au niveau des communes wallonnes lorsque l’on sait que le prix médian d’un bien immobilier à Lasne est de 505 000 euros pour 100 000 euros à Dour ou 65 000 euros à Hastière.

    Avec les mesures que Monsieur le Ministre préconise, n’allons-nous pas davantage accélérer celle-ci ?
  • Réponse du 16/12/2019
    • de BORSUS Willy
    Dans sa question, l’honorable membre fait référence à une interview que j’ai accordée à la DH en date du 25 octobre dernier et considère que j’aurais déclaré que « la Wallonie pourrait acheter des terrains à bâtir situés en zone plus rurale afin de retirer ceux-ci du marché et d’inciter les Wallons à aller en ville ».

    Mes propos étaient cependant nettement plus nuancés puisque j’expliquais dans cet article que : « La Région wallonne pourra acquérir des terrains externes aux éléments centraux urbains, mais aussi ruraux » et que je précisais que « Certains villages sont aussi des éléments centraux ».

    Il n’y a donc pas lieu de mettre en opposition des zones rurales où l’on ne pourrait plus construire et dont les terrains seraient dévalorisés et des zones proches des centres-villes qui verraient leurs prix gonfler, mais bien une volonté de la Région de retirer du marché des terrains à bâtir jugés trop excentrés.

    La volonté n’est donc pas de créer comme le dit l'honorable membre des communes « élitistes » et des communes « ghettos », mais bien, au sein des communes, qu’elles soient urbaines ou rurales, de favoriser un recentrage progressif et concerté de l’urbanisation.

    En 1999 déjà, le SDER affirmait l’importance de renforcer les villes et les villages en vue d’éviter la dispersion de l’habitat et de mieux structurer l’espace.

    De la même manière, le SDT adopté, mais non encore entré en vigueur réaffirme qu’il faut rencontrer les besoins actuels et futurs en logements notamment par la valorisation des terrains « bien » situés et que « le développement du logement dans les centralités urbaines et rurales reste (…) une réponse adaptée à l’objectif de rencontrer les besoins de la collectivité en termes de logements ».

    Enfin, la DPR 2019-2024 fixe, parmi les objectifs de développement du territoire, que pour freiner l’étalement urbain, il y a lieu de « localiser au maximum les bâtiments à construire dans les tissus bâtis existants (urbains, ruraux ou périurbains) situés à proximité des services et transports en commun ».

    L’objectif de lutte contre l’étalement urbain n’est donc pas neuf, mais ma volonté est, par ce mécanisme d’achat, de donner les moyens à la Région de se positionner en acteur opérationnel de l’aménagement du territoire dans cette lutte. En application de la DPR, un groupe d’experts sera mis en place par le Gouvernement début 2020. Sa mission sera notamment d’examiner tous les instruments nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction de l’étalement urbain aux horizons 2025 et 2050. Ce mécanisme d’achat sera examiné par ce groupe d’experts.

    Il me parait enfin important de rappeler que la densification et le recentrage permettent aux pouvoirs publics de garantir un accès plus aisé aux services et équipements ce qui permet de restreindre les charges aussi bien individuelles que collectives, et particulièrement les coûts économiques et environnementaux induits par les déplacements, mais aussi de renforcer la cohésion sociale.