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La numérisation de l'agriculture

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 139 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 13/01/2020
    • de MAUEL Christine
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Le monde agricole est en évolution constante en laissant une place de plus en plus grande aux nouvelles technologies et au numérique.

    Les outils sont nombreux afin de produire autrement, plus efficacement et d'une manière plus respectueuse de l'environnement. Les GPS, les outils de géolocalisation, les enregistrements des travaux d'exploitation et les modulations de l'application des intrants sont quelques exemples qui reflètent cette actualisation des outils.

    La Wallonie n'a pas négligé ce virage numérique avec la mise en œuvre en décembre 2016 d'un plan triennal de recherches. Cela a débouché sur deux appels à projets, dont un sur le « smart-farming ».

    Les agriculteurs réalisent que l'utilisation de nouvelles technologies sur leur exploitation devient de plus en plus indispensable. Des associations d'agriculteurs, telles que WalDigiFarm encouragent ainsi ces derniers à utiliser ces outils numériques. Toutefois, la complexité de ces technologies nécessite un accompagnement adéquat.

    Quelle sera la suite du plan triennal de recherches ?

    Quel avenir sera-t-il réservé pour le numérique dans l'agriculture et en particulier pour le « smart farming » ?

    De quelles manières la Région wallonne et le Centre wallon de recherches agronomiques (CRA-W) peuvent-ils encourager, sensibiliser et accompagner les agriculteurs sur cette matière ?
  • Réponse du 31/01/2020
    • de BORSUS Willy
    Le Programme triennal de recherches (PTR) 2017-19 était le premier du genre.

    Le « smart farming » y a occupé une place de choix puisque dans chacun des appels à projets du SPW ARNE a été retenu le thème prioritaire « smart farming » : Combinaison des données de différentes sources et natures collectées à différentes échelles spatio-temporelles pour en tirer des enseignements/options /conseils en production végétale et animale via la mise en place de plateformes intégratives ou d’outils d’aide à la décision .

    Les projets de recherche sont en phase de clôture. Les résultats scientifiques ne sont pas encore disponibles, mais il ressort de ce premier PTR des enseignements utiles.

    Ce premier PTR a démontré tout le bénéfice à tirer d’une collaboration plus étroite entre les acteurs scientifiques. Il a montré également l’intérêt d’impliquer les bénéficiaires des recherches tant dans la définition des thèmes prioritaires de recherches que dans la participation à la réalisation des recherches et à l’appropriation des résultats.

    Pour le deuxième PTR je compte largement impliquer les différents partenaires, les producteurs, les transformateurs, les encadreurs/vulgarisateurs, dans la construction et la réalisation du PTR. L’objectif est de coconstruire et ensuite co-réaliser un PTR dont les résultats contribueront tant à la transition écologique de l’agriculture wallonne qu’au développement de l’économie régionale.


    Le « smart farming » regroupe un ensemble d’outils, de concepts et de pratiques visant à garantir la rentabilité des exploitations tout en préservant les ressources naturelles, le climat et la qualité de vie des agriculteurs ainsi que le bien-être des animaux.

    Intelligent, collaboratif et durable, le « smart farming » (ou « smart agriculture ») est déjà présent dans bon nombre d’exploitations et cette présence va certainement se généraliser et s’intensifier dans le futur. Il s’inscrit dans la mutation de la société tant dans ses valeurs que dans ses outils, numériques et connectés.

    Le cœur de la « smart agriculture » est la donnée. Elle est collectée en grandes quantités (« Big data ») par une multitude de capteurs aux champs (par exemple des stations météorologiques ou des sondes de mesure de l’humidité du sol) ou embarquée sur des drones, des tracteurs ou des satellites. Les données collectées permettent une caractérisation fine et en temps réel de l’état des parcelles agricoles. Sur la base de celle-ci, l’agriculteur pourra optimiser la gestion de ses intrants comme par exemple l’eau, les fertilisants ou bien encore les pesticides.

    La gestion raisonnée / intelligente des intrants est aussi facilitée par des systèmes de positionnement (« GPS »). Ces systèmes, de plus en plus précis, permettent d’éviter d’appliquer des PPP (produits de protection des plantes) ou des engrais plusieurs fois au même endroit ou bien encore permettent en combinaison avec des capteurs de localiser et traiter avec précision les mauvaises herbes.

    L’objectif du « smart farming » est d’aider à faire le bon choix (choix de technique, choix de produit), au bon moment et au bon endroit. Cela afin d’obtenir une production plus respectueuse de l’environnement et du climat tout en conservant une rentabilité suffisante pour le producteur et un niveau de rendement permettant de remplir la mission première de l’agriculture : fournir à la population de l’alimentation en quantité suffisante et de bonne qualité.

    La robotisation de l’agriculture qui en découle ne vise absolument pas à remplacer l’agriculteur, elle vise essentiellement à l’aider dans la prise de ses décisions, à soulager son planning plus que chargé et à l’aider dans la réalisation de travaux pénibles.

    L’utilisation des capteurs et des flux de données touche l’ensemble des domaines de l’agriculture. Des capteurs placés au cou des animaux ou placés sous une ruche permettent ainsi à l’éleveur ou l’apiculteur un suivi à distance à tout moment et une réaction rapide en cas de problèmes.

    Si les innovations sont matérielles, elles sont aussi numériques. Collectées et transmises ensuite dans le Cloud, les données sont traitées et retransmises à l’agriculteur au travers de plateformes en ligne, accessibles partout et à tout moment lui permettant d’avoir une vue d’ensemble sur son exploitation et le guidant dans ses choix de gestion. 

    Dans le même ordre d’idée, des plateformes collaboratives/réseaux sociaux agricoles émergent de plus en plus. Ces plateformes permettent par exemple la mise en place de financements participatifs ou de faciliter l’échange/la mutualisation de matériel agricole.

    Le « smart farming » permet donc une optimisation de la rentabilité économique, une diminution de la pression environnementale et une amélioration de la qualité de vie. Elle constitue de ce fait un domaine de recherches et d’activités à développer et à promouvoir auprès des agriculteurs.

    Dans ce cadre, le SPW (ARNE et EER) a mis en place en 2019 un plan de formations destiné aux agriculteurs ; le CRA-W a participé aux réunions destinées à déterminer le besoin de formations en lien avec le développement de la recherche dans le domaine du « smart farming » et de l’agriculture de précision. Des formations liées à l’utilisation du numérique ont été programmées.

    De son côté, le CRA-W a également donné un ensemble de formations sur le thème de l’agriculture de précision et dans le domaine du « smart farming » via la FWA, la FUGEA et au sein de différents organismes en contact direct avec les agriculteurs (centres pilotes, GAL, et cetera). Le CRA-W organise ou participe également régulièrement à des séances de restitution des résultats de ses projets de recherche dans le domaine.

    Le CRA-W répond directement aux questions des agriculteurs lors de foires, salons agricoles, et cetera. Il anime, par exemple, chaque année un stand au sein de l’îlot « smart farming » organisé par Digital Wallonia lors de la Foire agricole de Libramont (et ce depuis sa mise en place en 2017). Toujours en partenariat avec Digital Wallonia, le CRA-W a réalisé de nombreuses vidéos de vulgarisation qui sont présentées lors de ces événements. Le CRA-W participe également au salon Agribex. Lors du salon 2019 (du 3 au 8/12/2019 - stand du Service public de Wallonie) du matériel de haute technologie (maquette de satellite, drone, matériel de terrain) et des applications numériques sur tablette y ont été présentés. Un grand intérêt a été rencontré de la part du monde agricole.

    En ce qui concerne la recherche, le CRA-W est déjà impliqué dans une série de projets de recherche portant tant sur du matériel agricole connecté, que sur le désherbage par robot ou encore l’usage de divers capteurs pour l’analyse ou la détection, la télédétection, et cetera. Par exemple, en cultures : UAVSoils, EO4Agri, Belcam, Agromet, Potatosmart, VISA, GEOCAN, Défapot, et Innoveau et, en élevage : Wall-e-Smart, méthamilk. Certains projets sont destinés à tester les différents capteurs embarqués sur les machines agricoles et les solutions/applications proposées sont évaluées afin de donner un avis objectif aux agriculteurs en ce qui concerne la précision et la justesse des résultats obtenus ainsi que la facilité d’utilisation. Les résultats de ces recherches ont par exemple été présentés aux agriculteurs le 19/11, lors du lancement de Waldigifarm. Plus récemment, le CRA-W s’est intéressé à l’apport des technologies innovantes pour réduire l’utilisation des produits de protection des plantes notamment grâce à l’évaluation de robots de désherbage et de l’intelligence artificielle embarquée sur les pulvérisateurs. Les informations sur ces projets sont disponibles sur le site internet du CRA-W : www.cra.wallonie.be

    Un des grands défis du « smart farming » au-delà de la gestion du bigdata est la protection des données. Le CRA-W y est très attentif et a, sur fonds propres, financé le projet OpEnAgro4.0. Dans le cadre de ce projet, le CRIDS (Centre de Recherche Information, Droit et Société) de l’UNamur et PiCarré ont été sollicités pour mettre en place un plan de gestion des données issues de la recherche ou collectées par des applications agronomiques. Ce plan de gestion des données prend en compte le RGPD et les bases légales qui évoluent très vite à l’heure actuelle au vu de l’évolution du big data et de l’intelligence artificielle.

    Pour ce qui est du futur, comme je l’ai expliqué en ouverture, les priorités seront fixées avant tout par les partenaires et bénéficiaires des résultats de la recherche.

    Je ne doute pas que la priorité « smart farming » retenue lors du premier PTR sera poursuivie lors du second.