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L'impact du Brexit sur l'économie wallonne

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 195 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 07/02/2020
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Le Brexit est aujourd'hui une réalité avec laquelle nous allons devoir vivre. Madame Delcominette, en sa qualité d'Administratrice générale de l'AWEx, évoquait récemment les pertes possibles pour la Wallonie en termes d'emploi.

    Qu'en est-il des conséquences économiques pour la Wallonie ?

    Les pertes d'emploi étant liées à une diminution de l'activité économique, quel état des lieux pouvons-nous dresser à ce jour ?

    Quelles mesures sont envisagées en vue de soutenir les entreprises qui seraient touchées par le Brexit ?
    Le cas échéant, sous quelles formes ces mesures seraient réalisées ?
    Comment celles-ci seraient proposées aux entreprises ? Suivant quelles modalités ?
  • Réponse du 27/02/2020
    • de BORSUS Willy
    Pour évaluer l’impact du Brexit sur l’économie wallonne et l’emploi, nous ne pouvons à ce jour que nous référer à des études évaluant l’impact d’une sortie sans accord, dans l’hypothèse où le commerce s’effectuerait sur la base des règles de l’OMC. Les négociations concernant la relation future entre l’UE et le Royaume-Uni sont en cours ; il nous faut donc attendre de voir à quel type d’accord commercial elles aboutissent.

    Notons que les exportations wallonnes vers le RU étaient en hausse de 9,8 % en 2018 et de 6,8 % pour les 6 premiers mois 2019.

    L’IWEPS a réalisé en septembre 2018 une étude sur les répercussions économiques potentielles d’un « Brexit dur » à moyen terme sur l’économie wallonne. C’est le scénario du « no deal » selon lequel le Royaume-Uni n’aurait plus automatiquement accès au marché intérieur européen et où les relations commerciales entre le Royaume-Uni et l’UE s’effectueraient sur base des règles de l’Organisation mondiale du commerce. Dans ce scénario, les marchandises importées dans l’UE depuis le Royaume-Uni seraient soumises à des droits d’importation. En retour, le Royaume-Uni introduirait des droits d’importation d’un niveau équivalent sur les marchandises en provenance de l’UE.

    L’IWEPS a pris comme base de travail le niveau des droits d’importation actuellement en vigueur dans l’UE vis-à-vis des pays tiers par grands groupes de produits. Il s’agit des tarifs moyens à l’importation pour les produits en provenance de pays tiers avec lesquels il n’existe pas d’accord de libre-échange (soit les tarifs dits « Most Favoured Nations »).

    Les estimations de l’IWEPS révèlent que, dans le cas d’un éventuel « Brexit dur », la Wallonie serait moins affectée que la Flandre. Au total, la Flandre perdrait 0,7 % de sa valeur ajoutée et accuserait un recul de 0,8 % de l’emploi, soit un peu plus de 20 000 postes de travail perdus. La Wallonie accuserait, en termes relatifs, des pertes à peu près moitié moindre que la Flandre, à hauteur de 0,4 % tant de sa valeur ajoutée que de son niveau d’emploi (soit l’équivalent d’un peu plus de 5 000 postes perdus).

    Ce résultat peut s’expliquer en partie par l’ampleur des flux commerciaux entretenus avec le Royaume-Uni, ceux-ci étant relativement plus élevés dans le cas de la Flandre que pour la Wallonie, mais il tient aussi en partie à la nature différente de ces flux au niveau régional. En effet, les principaux flux d’exportation de la Wallonie concernent des produits pharmaceutiques et apparentés (matériel médical) ainsi que des produits chimiques, pour lesquels les niveaux moyens de tarif sont relativement faibles à l’échelle mondiale.

    À l’inverse, les exportations de la Flandre concernent davantage de produits tels que les équipements de transport, les produits de la transformation alimentaire ou encore le textile, qui sont des catégories pour lesquelles les tarifs moyens à l’importation sont plus élevés.

    Par contre, cela signifie qu’en cas de « no deal », les ventes wallonnes de certains sous-secteurs de l’industrie alimentaire sur le marché britannique risquent d’être frappées par des niveaux de tarif relativement élevés (produits laitiers, sucres, cacao et confiseries ou encore les boissons), tout comme l’industrie de l’habillement.

    La banque de données « entreprises » de l’AWEx indique que près de 1 200 entreprises wallonnes déclarent exporter vers le Royaume-Uni. Certaines seront plus impactées que d’autres en fonction de la nature des produits qu’elles fabriquent, en fonction des droits à l’importation qui seraient fixés par le Royaume-Uni sur lesdits produits et, enfin, en fonction de la part que représente le Royaume-Uni dans leur chiffre d’affaires. En outre, les effets collatéraux sont difficiles à évaluer. En effet, à des degrés divers, le Brexit aura des répercussions sur les économies de tous les pays de l’UE ; y compris et plus particulièrement sur celles de nos plus proches voisins (Flandre en tête) qui constituent les principaux clients de la Wallonie. Le montant annuel des exportations des pays de l’UE vers le RU s’élève à plus de 300 milliards d’euros...

    Rappelons que les relations commerciales entre la Belgique et le Royaume-Uni ne s’arrêteront pas , ais que nos entreprises devront s’adapter à la nouvelle situation du marché.

    Afin de les inciter à anticiper les effets potentiels du Brexit (« no deal »), de nombreuses mesures d’information (séminaires, newsletters, Guide pratique…) ont été menées par l’AWEx et ses partenaires telles que l’Administration générale des Douanes et Accises (AGD&A) ces dernières années. Une grande campagne a été réalisée par l’AGD&A pour que les 25.000 entreprises belges qui commerçaient avec le Royaume-Uni et qui n’avaient pas encore de numéro EORI en demandent un.

    Après la sensibilisation et la validation des numéros attribués d’office par l’AGD&A, celle-ci nous a communiqué fin juin 2019 qu’au total 10.000 EORI avaient été créés en 18 mois dans le cadre du BREXIT. Il restait environ 15 000 n° de TVA qui avaient réalisé au moins une transaction intracommunautaire avec le Royaume-Uni en 2017 et qui ne l’ont pas demandé ni validé. Tous avaient reçu un courrier et certains ont décidé en connaissance de cause de ne pas le créer. On peut dire que la majorité des entreprises significatives sont désormais en ordre. Mais il n’y a pas de chiffre disponible spécifiquement pour la Wallonie.

    Le site Brexit de l’AWEx a régulièrement été actualisé dans le but d’informer concrètement nos entreprises sur les moyens de se préparer à une sortie sans accord. Il renvoie aux sites des Douanes, de l’AFSCA et de la FEVIA pour le secteur agroalimentaire, ainsi que vers les fiches sectorielles « preparedness » de la Commission européenne et du gouvernement britannique.

    En ce qui concerne une éventuelle aide financière aux entreprises touchées par le Brexit, il faut souligner que lorsque le Royaume-Uni aura quitté l’UE, certains incitants financiers de l’AWEx qui ne s’appliquaient pas encore à ce marché seront disponibles, à savoir l’intervention dans les frais de voyage de prospection, d’invitation de prospects et d’ouverture d’un bureau commercial.

    Il va de soi que l’AWEx continue son travail d’information auprès des entreprises wallonnes, avec l’aide de ses Conseillers économiques et commerciaux au Royaume-Uni, afin qu’elles puissent s’adapter aux nouvelles réalités du marché britannique. Un séminaire d’information est prévu le 29 mai 2020 lors des Wallonia Export Days.

    En outre, dans le cadre de la préparation des négociations sur la relation future entre l’UE et le RU, une réunion à laquelle l’AWEx a participé s’est tenue au sein de mon Cabinet, avec des chefs d’entreprises wallonnes de secteurs variés, afin de recueillir les points d’attention et recommandations utiles.

    Que l’honorable membre soit assuré que le Gouvernement wallon, dans la foulée du travail mené par son prédécesseur, suit et continuera à suivre ce dossier de manière minutieuse afin d’en limiter les effets pour l’économie de notre Région et de saisir de nouvelles opportunités.