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Les taxes américaines sur l'Airbus et les produits européens

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 212 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 21/02/2020
    • de LUPERTO Jean-Charles
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Alors que le Boeing 737 Max peine à décoller, les USA, et particulièrement l'administration Trump, a décidé d'augmenter ses tarifs douaniers. Parmi les produits touchés venant d'Europe, on y retrouve de façon non exhaustive le vin, le fromage, des vêtements, qui sont frappés d'une taxe de 25 %. Pour Airbus, alors que la taxe s'élevait à 10 %, l'administration Trump a décidé de relever celle-ci à concurrence de 15 %.

    L'administration Trump entend faire de ces menaces un moyen de pression en vue d'ouvrir l'Europe à l'importation de produits américains, n'hésitant pas à menacer de frapper certains produits d'une taxe pouvant atteindre les 100 %.

    Si ce scénario semble avoir fonctionné avec la Chine, il semble que l'Europe fasse de la résistance, mais jusque quand ?

    En effet, des viticulteurs français frappés par ces taxes réclament à Airbus un fonds de compensation.

    Quelles sont les entreprises wallonnes impactées par ces mesures ?

    Ces sanctions grèvent-elles les possibilités d'expansions des produits wallons sur le marché américain ?

    Quels secteurs d'activités sont les plus touchés ?

    Comment sont-ils supportés par la Wallonie ?
  • Réponse du 11/03/2020
    • de BORSUS Willy
    1. Pour rappel, le 14 octobre dernier l’organe de règlement des différends de l’OMC a publié son rapport autorisant les États-Unis à prendre des contre-mesures à l’égard de l’UE et de ses États membres pour un montant de 7,496 milliards d’euros par an dans le cadre du différend Airbus. Il s’agit de la décision finale dans le cadre d’un contentieux - croisé - en cours depuis 15 ans et né après que les États-Unis eurent déclaré mort l’accord américano-européen de 1992 régissant les subventions dans le secteur aéronautique. En 2004, les États-Unis ont accusé les 4 pays partenaires du programme Airbus (la France, l’Allemagne, le Royaume-Uni et l’Espagne) d’accorder des subventions illégales pour soutenir la production d’une série de produits Airbus. Un an plus tard, l’Union européenne affirmait que Boeing avait reçu des milliards de dollars de subventions interdites de la part du gouvernement américain.

    L’Organe de Règlement des Différends de l’OMC a mis les deux parties en défaut (l’UE et les États-Unis) en reconnaissant l’existence de subventions illicites des deux côtés. Les États-Unis ont cependant l’avantage du calendrier, car ils ont initié leur procédure avant l’UE. 

    2. L’Union européenne n’a pas cessé de multiplier les démarches afin de trouver une solution négociée (vu la reconnaissance par l’OMC de subventions illicites des deux côtés) avec les États-Unis pour éviter l’imposition de droits de douane additionnels et une nouvelle escalade de la tension dans les relations commerciales UE-Etats-Unis. Force est cependant de constater que les États-Unis se sont montrés peu ouverts à la discussion. Ils ont décidé d’imposer le 18 octobre dernier des droits de douane additionnels sur une série de produits européens (10 % pour les nouveaux aéronefs et pièces détachées aéronautiques et 25 % pour les autres produits) pour l’équivalent de 6,9 milliards d’euros.

    3. Bien que l’examen de la liste des produits frappés par les droits de douane additionnels appliqués depuis octobre fait apparaître que 87 % de la valeur totale de la liste est portée par les 4 pays partenaires au sein du programme Airbus, les États-Unis ont également décidé de taxer des produits issus de l’ensemble des États membres de l’UE. La filière agroalimentaire européenne est la plus impactée par ces nouvelles mesures américaines.

    4. S’agissant de l’impact pour Wallonie, l’impact global des sanctions est relativement limité par rapport aux autres États membres de l’UE visés. Les catégories de produits impactés par les sanctions américaines sont pour l’essentiel les confitures (4,6 Mio d’euros) et les produits laitiers (2 Mio d’euros), ce qui représenterait potentiellement un coût en termes de droits d’entrée additionnels de l’ordre de 1,65 Mio d’euros. Si l’impact global sur nos exportations peut être qualifié de très faible, il n’en demeure pas moins que certains opérateurs spécifiques, dont le chiffre d’affaires vers les États-Unis est conséquent, sont affectés directement. On pense notamment à des sociétés telles que Materne (confitures), Corman (beurres) ou encore la Fromagerie de Chimay.

    Le 14 février dernier, le Bureau du représentant américain au commerce a publié la révision de ses sanctions à l’encontre des subventions européennes indûment perçues par Airbus. L’administration américaine a pour intention de mettre en place dès le 18 mars 2020 des « ajustements » aux mesures de rétorsion en vigueur depuis le 18 octobre 2019 ». Ces ajustements prévoient le relèvement de 10 à 15 % des droits de douane américains sur les aéronefs européens et des droits à l’importation de 25 % sur les couteaux de boucher allemand et français. Fort heureusement les produits de boulangerie-pâtisserie (biscuits, gaufres), les boissons alcoolisées (bières et cidres) ainsi que les chocolats sont toujours épargnés. Il n’y a donc pas de nouveaux produits belges impactés par ces nouveaux droits de douane additionnels.

    Depuis octobre 2019, les Conseillers économiques et commerciaux de l’AWEx présents aux États-Unis ont été sollicités par une vingtaine d’entreprises wallonnes qui s’inquiètent de l’évolution de la situation. Pour des raisons de confidentialités, les noms de ces entreprises ne peuvent être communiqués sans leur accord préalable.

    L’AWEx assure une information continue aux entreprises impactées. Un mailing spécifique a d’ailleurs été envoyé dans le cadre des droits de douane additionnels qui ont été imposés le 18 octobre dernier. Ces informations ont été transmises à destination des entreprises wallonnes qui effectuent des déclarations d’exportation et qui sont issues de la base de données de l’AWEx. Cette annonce a également été diffusée sur le site internet Walfood et sur les réseaux sociaux agro-food de l’AWEx (twitter - Facebook).

    Les sanctions américaines faisant suite au contentieux Airbus couplées à l’épidémie de coronavirus nous démontrent la nécessité pour nos entreprises ancrée dans un univers globalisé de diversifier leur portefeuille de clients, mais également de fournisseurs afin de limiter les impacts sur leur business model. À ce jour, l’AWEx et la SOFINEX n’ont pas développé d’aides spécifiques à la suite des sanctions américaines. Cependant une série d’aides existantes peuvent être mobilisées. Cela intègre notamment un support en consultance, un appui en communication, la participation à des foires à l’étranger, des lignes de cofinancement, des garanties pour réduire les risques …

    Que l’honorable membre soit assuré que le Gouvernement wallon continue de suivre l’évolution de ce dossier de manière très minutieuse.