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Les conditions de nage en eau libre en Meuse

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 311 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 13/03/2020
    • de DEMEUSE Rodrigue
    • à HENRY Philippe, Ministre du Climat, de l'Energie et de la Mobilité
    Depuis 1964, la Ville de Huy est le théâtre chaque année de la très attendue traversée hivernale de la Meuse. Ce rendez-vous était cette année programmé initialement le 23 février. Mais la 53e édition a dû être reportée au 15 mars en raison du débit du fleuve jugé trop important pour assurer la sécurité des nageurs.

    En effet, selon les nouvelles normes imposées par les pompiers et la direction des voies navigables de Liège, le débit moyen de l'eau de la Meuse ne doit désormais plus dépasser les 400 m3 par seconde pour que les nageurs puissent pratiquer leur sport. À ce seuil, le fleuve est considéré « en régime de crue » et toute activité nautique telle que la nage en eau vive est interdite.

    Si cette nouvelle norme peut se comprendre pour des nageurs occasionnels, elle pose question dans le cas d'un club organisé tel que « Cool Huy », l'ASBL organisatrice de la traversée hivernale de la Meuse. En effet, il s'agit de l'un des deux seuls clubs de nage hivernale de Wallonie et le seul à pratiquer la nage en eau vive.

    Les nageurs sont des habitués de la nage dans de telles conditions, dès lors qu'ils pratiquent cette activité chaque semaine, souvent dans un courant deux à trois fois supérieur à cette nouvelle norme, sans qu'aucun accident ne soit jamais survenu. Ils passent par ailleurs régulièrement des examens médicaux et des tests à l'effort pour s'assurer de leur condition physique.

    En hiver, le débit dépasse très souvent le seuil des 400 m3 par seconde. Aussi, les nouvelles normes de sécurité rendront-elles extrêmement compliquée l'organisation non seulement des évènements comme la traversée hivernale de la Meuse (alors qu'aucun accident n'est jamais survenu depuis plus de 50 ans), mais surtout des entraînements réguliers en eau froide auxquels s'adonnent hebdomadairement les membres du club. Ces entraînements sont pourtant primordiaux pour leur sécurité puisqu'ils sont nécessaires à l'adaptation de leur corps aux basses températures.

    Le risque d'assister à la fin de la nage en eau froide en Wallonie est donc clairement présent si aucune disposition spécifique n'est prise, alors que des débits beaucoup plus importants sont pourtant tolérés dans d'autres pays européens.

    Monsieur le Ministre pourrait-il m'indiquer ce qui justifie l'adoption de ces nouvelles normes de sécurité ?

    Des mesures spécifiques sont-elles envisageables pour les clubs de nage en eau vive, de façon à permettre aux nageurs de s'entraîner régulièrement dans la Meuse ?

    Des dérogations sont-elles possibles ?

    Des dérogations sont-elles également envisageables pour l'organisation d'évènements tels que la traversée hivernale de la Meuse, moyennant évidemment le respect d'un strict plan de sécurité ?
  • Réponse du 06/05/2020
    • de HENRY Philippe
    Les conditions inhérentes à l’autorisation délivrée par la Direction des Voies hydrauliques de Liège à l’organisateur stipulaient notamment :

    « La manifestation se déroulera sous l'entière responsabilité de l'organisateur qui veillera à prendre toutes les mesures de sécurité nécessaires au bon déroulement de celle-ci, y compris les moyens de secours sur l'eau. Entre autres, tenir compte du débit de la Meuse et prévoir l'encadrement des participants par des bateaux de sécurité. De même, il est impératif de positionner deux embarcations, une en amont et une en aval du parcours sur la Meuse, afin de signaler la zone d'arrêt de navigation ».

    Un incident est malheureusement survenu le 6 janvier 2018. Selon le rapport établi par l’ASBL Cool Huy, il apparaît « qu’au cours de la préparation d’un entraînement, le pilote d’un zodiac, équipé de son gilet de sauvetage, est tombé à l’eau et a réussi à regagner la rive par ses propres moyens, mais le bateau est parti à la dérive. Une équipe de pompiers s’est opposée à l’intervention de nageurs (présumés de l’ASBL Cool Huy) afin de récupérer l’embarcation en perdition et s’apprêtait à mettre leur zodiac à l’eau avant de se raviser en raison du débit de la Meuse et du fait qu’il ne s’agissait que de matériel ».

    À titre indicatif, le débit de la Meuse mesuré à la station d’Ampsin-Neuville avoisinait à cette date 1100 m³/s.

    Sur la base de ces éléments, il a été estimé que l’ensemble des critères d’évaluation des risques n’était pas maîtrisé par le demandeur notamment ceux liés au débit de la Meuse et aux dangers inhérents à la vitesse des courants et aux embâcles qui y sont liés, navigation avec une menue embarcation à un débit de la Meuse proche de celui pour lequel toute navigation avalante est interdite (1 200 m³/s).
    Il a été décidé par mesure de précaution d’ajouter une clause restrictive d’un débit maximal de 400 m³/s dans les conditions de l’autorisation.

    Ce débit correspond au régime de crue de la Meuse moyenne défini dans les règlements particuliers (avis à la batellerie n° 2000/34/212 du 20/12/2000). Les difficultés de navigation, et a fortiori de nage, sont accrues ainsi que le risque de charriage d’objets exogènes susceptibles de heurter un participant.

    Il apparaît nécessaire de préciser que l’organisation de la traversée hivernale de la Meuse n’est pas réservée à des nageurs expérimentés, mais est également ouverte à « de nouveaux nageurs déjà très habitués à l’eau froide, mais pas à traverser ».

    Néanmoins, le demandeur a été invité à fournir une analyse de risques démontrant la sécurité des participants et susceptible de permettre une réévaluation du critère de débit.
    Certaines informations présentées n’ont pas pu être considérées comme une analyse de risques convaincante.

    Il a été proposé au demandeur de faire confirmer par un service compétent en matière d’intervention dans le courant en eau libre, tel que les pompiers ou la protection civile, qu’il était possible d’assurer une traversée à des débits plus importants. Le demandeur a indiqué verbalement que suite à l’incident, les pompiers de Huy n’étaient pas favorables à la traversée dans ces conditions et qu’une telle sollicitation ne serait donc pas opportune.

    Moyennant la production d’informations valables et probantes telles qu’une analyse de risques conforme et une validation par un service compétent en matière d’intervention dans le courant en eau libre, la Direction des Voies hydrauliques de Liège est disposée à réexaminer, s’il y a lieu, sa position.