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La réhabilitation des friches industrielles d'ArcelorMittal

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 269 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 05/05/2020
    • de MARCOURT Jean-Claude
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Le 29 avril dernier, le journal l'Echo écrivait que la Wallonie voulait mettre la main sur les terrains de Carsid et de Chertal. Le lendemain, Monsieur le Ministre a donné une interview au journal La Meuse à travers laquelle le périmètre de l'opération est élargi à certaines friches d'Arcelor situées à Seraing pour porter la superficie totale à 300 hectares, en surplus du site de Carsid.

    Concernant les friches d'ArcelorMittal, La Meuse écrit : « l'idée est de créer une société mixte avec d'un côté les partenaires publics classiques que sont la SOGEPA, la SPI, Noshaq et pourquoi pas Nethys, et de l'autre des partenaires privés dont Arcelor peut-être ». Et il réplique « Mais ces derniers resteront majoritaires pour ne pas que l'Europe puisse nous taxer pour aides d'État illégales ».

    Une société mixte chargée de ces opérations existe déjà puisque La Foncière liégeoise réunit à ce jour la Région wallonne pour 50 % et ArcelorMittal pour 50 %, la SOGEPA participant également aux travaux. Il préconise donc de passer d'un modèle où la Région détient 50 % à un modèle où elle sera minoritaire dans le but, à en croire La Meuse, de faire avancer les choses plus rapidement.

    Monsieur le Ministre peut-il confirmer ces déclarations ?

    En quoi le changement d'actionnaires de cette société mixte, rendant le public minoritaire là où il est actuellement à part égale avec le privé, va permettre au secteur public de dégager sa pleine puissance favorisant une réhabilitation la plus rapide et la plus efficace possible ?

    La Meuse poursuit de la sorte : « il faudra alors discuter de la pollution historique des terrains, de l'ampleur de la dépollution selon la future activité prévue et de l'évaluation de son prix de vente une fois réhabilité ». Ces éléments ont été identifiés de longue date et des missions ont déjà été confiées. Entre autre, il appartient à ArcelorMittal de dépolluer les terrains à un niveau industriel.

    Quelles sont les sociétés qui réaliseront les études d'orientation et de caractérisation de la pollution ?

    Comment seront-elles choisies ?

    Peut-il décrire le processus par lequel leurs conclusions seront endossées par les pouvoirs publics ainsi que le ou les partenaires privés ?

    La Meuse écrit également « ça n'avance pas vite aujourd'hui parce qu'ArcelorMittal n'est pas pressé de dépolluer. Si on lui rachète les terrains à l'avance, il aura de l'argent pour le faire... ».

    Pour peu que l'on accepte de considérer que le Groupe Mittal n'a effectivement pas l'argent pour dépolluer ces sites, dans quelles proportions l'achat de ces terrains avant dépollution permettra de fournir des liquidités au groupe pour y procéder ?

    Autrement dit, quel ordre de grandeur attribue-t-il à la valeur de ces terrains pollués ?

    Peut-il décrire le mécanisme de désignation des sociétés qui procèderont aux travaux de dépollution et en détermineront donc le coût ?

    Peut-il décrire le mécanisme à travers lequel la valeur des sites sera établie et convenue entre les parties ?

    Les communes bénéficient encore de revenus en termes de précompte versés par ArcelorMittal. Plus vite ArcelorMittal les a vendus, moins il devra débourser de liquidités à cette fin. Il serait donc logique qu'une des contreparties soit une contrainte de temps.

    Profitera-t-il de cette révision des accords historiques conclus avec ArcelorMittal pour y insérer des contraintes de temps ?

    Peut-il décrire la nature de ces accords à cet égard ?

    Quelles garanties peut-il octroyer aux communes quant à ces rentrées financières ?

    Il est admis que la nature de la requalification des friches doit parfois être déterminée avant de procéder à la première étape de dépollution des terrains pour en maîtriser les coûts au plus juste.

    Qui décidera des requalifications des friches ?

    Quand ces décisions d'affectation interviendront-elles ?

    Quand et comment les communes et les acteurs locaux, tant de la Basse-Meuse que de la Haute-Meuse, seront-ils associés à ses démarches ?

    Quelle cohérence entend-il construire entre les projets qui se développeront entre la Basse et la Haute-Meuse, singulièrement sur les Communes de Oupeye, Seraing, Flémalle et Marchin où se trouvent les sites concernés ?
  • Réponse du 27/05/2020
    • de BORSUS Willy
    Le développement économique, quelle qu’en soit la nature, exige la disponibilité d’espaces où ces activités peuvent se mener, créer de l’emploi et apporter de la valeur ajoutée. Beaucoup des parcs d’activités mis en place en Wallonie arrivent à saturation. Dans le cadre global d’une gestion optimale de l’environnement et de la lutte contre le réchauffement climatique, il ne saurait être question d’encore y consacrer significativement des espaces agricoles ou forestiers, ce qui ne peut se faire que si c’est nécessaire ou dans des circonstances exceptionnelles.

    Les sites précédemment occupés par les activités sidérurgiques et aujourd’hui totalement délaissés constituent dans ce cadre une priorité absolue que la Wallonie se doit d’assumer.

    Pour cela, trois grands axes sont à prendre en considération :
    - la décontamination des sites, de telle sorte que des activités économiques nouvelles puissent s’implanter et exploiter ces espaces de façon durable ;
    - l’accès à la maîtrise foncière, après que les responsabilités légales des pollutions aient été identifiées et traitées conformément aux règles européennes et wallonnes ;
    - la cohérence du développement territorial - la réaffectation des sites ainsi remis à la vie active sera donc pleinement intégrée aux ambitions et aux projets des territoires concernés.

    Le Schéma de développement du territoire (SDT), approuvé par le Gouvernement wallon le 16 mai 2019, invite à travers son objectif stratégique « SS1 - accroître le rôle de la Wallonie dans les dynamiques métropolitaines de niveau européen » à renforcer l’ancrage des activités métropolitaines en Wallonie. Le SDT préconise ainsi de renforcer l’attractivité des pôles majeurs que sont Liège et Charleroi, en tant que « portes d’entrée de la Wallonie situées sur les réseaux de communication de niveau européen, qui jouent un rôle déterminant dans la dynamique de métropolisation ». Le SDT invite enfin à veiller, dans ces deux territoires à ambition métropolitaine, « à la requalification des espaces urbanisés dégradés (entrées de ville, quartiers de gares, friches, axes de communication, et cetera) »

    Le 30 avril dernier, le Gouvernement wallon a donc marqué son accord pour confier à la SOGEPA la mission de négocier l’acquisition, pour compte de la Région wallonne, des terrains désaffectés de Carsid à Charleroi et d’ArcelorMittal à Liège et d’y réaliser leur reconversion en étroite collaboration avec les acteurs locaux publics et/ou via des partenariats public-privé.

    L’objectif de cette mission est de reconvertir les friches industrielles pour y développer de nouvelles activités économiques génératrices d’emploi.

    Le Gouvernement wallon s’est fixé un objectif ambitieux : dépolluer et reconvertir au moins 100 hectares de friches industrielles par an. Il s’agit d’une nécessité absolue. En effet, face au manque de disponibilité de terrains et spécialement de grands terrains à vocation industrielle, face à la saturation de beaucoup de parcs d’activités wallons, face à la volonté de ne plus consommer de nouveaux terrains agricoles et dans un souci environnemental évident, la reconversion de friches industrielles est la solution idéale.

    Les sites d’Arcelor abandonnés par Mittal Belgique (AMB) en région liégeoise représentent le plus gros volume de friches sur le territoire de l’agglomération liégeoise. Leurs superficies et leurs localisations le long des axes fluviaux connectés aux axes routiers sont l’objet d’une attention intéressée par de plus en plus d’acteurs privés ou publics. La question de la reprise de la maîtrise publique de ces propriétés est un sujet important, au même titre que la nécessité de garantir le phasage de l’arrivée de ces nombreux hectares sur le marché immobilier liégeois.

    Nous avons pour ambition de :
    - réaliser une reconversion ambitieuse et efficace des sites dans un timing maîtrisé, vers des fonctions à valeur ajoutée et aux retombées positives pour tout le territoire wallon ;
    - créer un effet levier sur l’économie (création d’emploi, nouvelles filières et écosystèmes développés) ;
    - garantir la responsabilité environnementale d’AMB, directement ou indirectement ;
    - positionner un partenariat SOGEPA-SPI-NOSHAQ, pour l’atteinte de ces objectifs, au service de la Wallonie et des communes ;
    - positionner la Wallonie et son savoir-faire en matière de requalification de chancres industriels à l’échelle européenne en s’appuyant sur ces dossiers pour s’établir comme une référence dans tous les benchmarks européens.

    Pour ce faire, nous envisageons :
    - un partenariat d’opérateurs expérimentés, spécialisés et donc complémentaires, au départ d’un noyau SOGEPA-SPI-NOSHAQ, au service de l’objectif, pour concevoir et structurer le processus de reconversion, la programmation mixte répondant aux besoins identifiés, et ce jusqu’à la mise à disposition conditionnée à des entreprises ou investisseurs ;
    - une analyse du contexte de pollution et des contraintes techniques à prendre en compte pour l’acquisition des sites concernés avant assainissement par AMB, au départ d’un préfinancement des études par le partenariat public (à charge d’AMB en cas de non-exécution de la cession des sites) ;
    - une maîtrise publique de l’ensemble des sites actuellement propriété par une offre d’acquisition qui tienne compte des coûts objectivés de la pollution des sols et autres facteurs d’évaluation foncière ;
    - la mise en place d’une équipe de pilotage, au service du partenariat, et intégrant des compétences en matière d’urbanisme et planification territoriale, de programmation immobilière, d’assainissement des sols, de montage financier et juridique, de développement économique, de gestion de projet ;
    - une implication active et structurée des acteurs politiques et forces vives ;
    - un processus itératif de définition des fonctions attendues par site (études de pollution des sols, relevé précis et exhaustif des infrastructures et scénarisation des fonctions) ;
    - un phasage de la mise en œuvre de chacun des sites, avec business model et plan d’action spécifique, et en identifiant les partenaires publics complémentaires potentiels et/ou partenaires privés.

    La priorité d’ArcelorMittal, dans ce contexte de marché difficile, n’est pas d’assainir les sites à l’arrêt, mais de supporter les sites encore en activité. Le groupe n’a pas non plus la volonté et les moyens de mobiliser les financements et les équipes de façon optimale sur tous les sites en même temps. Tout cela ralentit inévitablement le processus. L’acquisition de l’ensemble permettrait d’avoir la mainmise sur le timing de reconversion. La Foncière liégeoise a été le véhicule grâce auquel les engagements d’ArcelorMittal en matière de responsabilités environnementales ont été préservés ces dernières années. Pour rappel, ArcelorMittal s’engageait à apporter les terrains assainis dans la Foncière liégeoise tandis que la Région apportait les moyens financiers en contrepartie de la valeur des terrains. Ce schéma ne permet non seulement pas d’avoir une maîtrise du processus de reconversion, mais surtout ArcelorMittal resterait indirectement propriétaire des terrains, en partenariat avec la Région, ce qui n’est pas l’objectif poursuivi.

    Pour accélérer le processus, la transaction d’acquisition et la reconversion vont donc se faire entre les acteurs concernés, en dehors du périmètre de la Foncière liégeoise.

    Concernant la pollution historique des terrains, beaucoup de missions et d’études ont, en effet, déjà été confiées ces dernières années. Malheureusement, elles ne permettent pas de chiffrer le coût d’assainissement de chaque site et les études n’ont pas été concrétisées par des plans d’action sur chaque des sites. Les sociétés qui réaliseront les études liées à la pollution sont les prestataires spécialisés habituels dans ce type de mission. Certaines études sont d’ailleurs déjà en cours, avec des bureaux tels que SBS ou Géolys, sélectionnés sur la base d’offres reçues.

    Le prix de la transaction d’acquisition par la Région des terrains à ArcelorMittal fera l’objet de négociations, qui se baseront notamment sur les coûts de dépollution et la valeur vénale assainie de chacun des sites en fonction de leurs caractéristiques propres et nous veillerons à ce qu’ArcelorMittal respecte le montant de ses engagements en matière de dépollution.

    Les prestataires de service qui procèderont aux travaux de la dépollution seront, comme nous en avons pour habitude, sélectionnés sur la base de la meilleure offre reçue compte tenu de certains critères tels que le prix, mais aussi la qualité des services et le timing endéans lesquels ils pourront être prestés.

    Les accords historiques avec ArcelorMitall ont permis de préserver les engagements de dépollutions, mais aujourd’hui la volonté est de reconvertir ses sites, en concertation avec les villes et autres pouvoirs locaux. Les contraintes de temps sont celles qui poussent justement la Région à devenir propriétaire de ces sites afin d’y accélérer le processus de reconversion et de développement de nouvelles activités économiques, au bénéfice des communes. Tous les éléments financiers liés à cette transaction, en ce compris les taxes, entreront en ligne de compte dans les négociations avec ArcelorMittal.

    Notre volonté est clairement que la reconversion et le développement de nouveaux projets se fassent en concertation avec les communes et acteurs locaux. La mission qui est confiée à la SOGEPA, outre l’acquisition des sites, est aussi d’en mener la reconversion par le biais de partenariats tant publics que privés, en fonction de la stratégie de reconversion spécifique à chacun des sites qui sera définie pour en optimaliser la valeur, mais aussi en ayant une réflexion plus large visant à une reconversion harmonieuse et qui a du sens au niveau de l’ensemble des communes concernées.