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Les mesures en faveur de l'écoconstruction en Wallonie

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 297 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 04/06/2020
    • de MATHIEUX Françoise
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Dans sa Déclaration de politique régionale, en son chapitre 7, le Gouvernement wallon prévoit notamment de « renforcer le soutien au secteur de l'écoconstruction, permettant des réductions importantes des impacts environnementaux et des coûts cachés liés au secteur de la construction (émissions de polluants et de gaz à effet de serre, déchets, transports, santé, etc.) » et d'améliorer ainsi « la qualité et la performance énergétique des bâtiments (construction et rénovation) ».

    Pour y parvenir, la DPR mentionne des mesures transversales visant les critères des marchés publics, la formation et la sensibilisation ainsi qu'un financement adéquat. S'il est évident que l'écoconstruction relève également des compétences des Ministres ayant en charge le Logement, l'Environnement et l'Énergie, Monsieur le Ministre peut-il m'informer des mesures prises en la matière sous l'angle de ses compétences ?

    Des actions ont-elles été menées afin d'inciter les marchés publics à prendre en compte les facteurs qualitatif et durable plutôt que l'éternel et prédominant facteur « prix » ?
    Dans l'affirmative, lesquelles ?

    Par ailleurs, le secteur de l'écoconstruction a souvent interpellé le monde politique quant à certains blocages légaux qui freineraient son développement, notamment en matière d'urbanisme. La réforme du CoDT en faisant basculer une large part de règles de construction d'une valeur réglementaire en valeur indicative a déjà partiellement facilité la réalisation de projets architecturaux plus écoresponsables.

    D'autres réformes sont-elles à prévoir en la matière ?
  • Réponse du 25/06/2020
    • de BORSUS Willy
    Au niveau environnemental, le secteur de la construction est responsable d’environ 50 % de la consommation mondiale en matières premières.

    Au niveau belge, il s’agit également d’un grand producteur de déchets : 40 % du total des déchets produits annuellement en Belgique.

    La majorité des bâtiments en Wallonie ne correspondent en effet plus aux normes énergétiques minimales.

    Dans ce contexte, il est extrêmement important d’apporter des solutions environnementales durables au secteur. Le secteur de l’écoconstruction propose d’y apporter des réponses efficaces et créatives.

    En ce qui concerne la question de l’honorable membre relative aux mesures transversales visant à soutenir le secteur de l’écoconstruction au niveau des critères des marchés publics, de la formation et de la sensibilisation ainsi que du financement adéquat, ma collègue Valérie De Bue a lancé tout récemment une enquête auprès des organismes publics (communes, intercommunales, sociétés de logement …) pour mieux connaître les clauses environnementales qui sont actuellement intégrées dans les cahiers spécifiques des charges des marchés publics de travaux. Par cette étude, les bonnes pratiques, mais également les freins éventuels relatifs à l’insertion des clauses environnementales dans les cahiers spécifiques des charges des marches de travaux publics seront mis en évidence, ce qui permettra peu à peu d’apporter les mesures nécessaires pour lever ces freins. Des clauses environnementales types pourront également être proposées aux pouvoirs adjudicateurs, ce qui facilitera grandement la tâche des rédacteurs de ces cahiers de charges pour leur transposition dans les marchés publics. Dans le panel des questions relatives aux clauses environnementales envisagées dans cette enquête, l’écoconstruction et notamment les matériaux mis en œuvre tels que les matériaux recyclés, les matériaux labellisés, les matériaux biosourcés, les matériaux issus du réemploi, les matériaux favorisant la déconstruction présentant des solutions réversibles et modulables sont bien présents.

    À côté de cette enquête, des outils ont déjà été développés, notamment les clauses techniques types relatives aux matériaux wallons innovants de conception durable qui ont été intégrées en 2019 dans le cahier de charges type bâtiments, connu sous l’appellation CCTB 2022. Des travaux sont en cours pour définir prochainement des clauses techniques pour les matériaux de réemploi. Ce sera un autre coup de pouce à l’écoconstruction. Ce CCTB 2022 prend également en compte la démolition sélective. Il prévoit également la possibilité d’établir des plans particuliers de prévention des déchets, mais ne propose pas encore de canevas, notamment en vue d’une réutilisation. C’est un sujet sur lequel le Gouvernement va travailler dans les prochains mois.

    Par ailleurs, il est clair que les matériaux durables, recyclés et de réemploi ainsi que les techniques de mise en œuvre sont amenés à se développer. Des formations en lien avec ces évolutions sont à prévoir. Je veillerai à ce que des formations professionnelles spécifiques puissent voir le jour notamment au travers des organismes de formation comme l’IFAPME qui relève de mes attributions. Ces formations destinées aux futurs ouvriers et entrepreneurs doivent pouvoir répondre aux besoins du secteur de la construction et plus spécifiquement au secteur de l’écoconstruction et de l’économie circulaire.
     
    La sensibilisation à l’écoconstruction rentre dans un mécanisme plus global. En effet, l’écoconstruction a des impacts positifs sur la réduction des gaz à effet de serre, sur les circuits courts et l’économie circulaire, sur le développement de nouveaux métiers, de nouvelles filières, etc. Les canaux de sensibilisation sont donc multiples. L’écoconstruction peut être plébiscitée au travers d’actions « grand public », au travers d’actions financières (primes) et certainement auprès des opérateurs publics participant au « Green Deal » achats circulaires. Le cluster écoconstruction qui possède une grande expertise en la matière (participation à de nombreux projets européens) est également très actif en termes de sensibilisation tant au niveau des entreprises (animation du réseau d’entreprises, aide à la labellisation, réemploi, et cetera) que du grand public (salons, conférences, et cetera).

    En matière de financement, ceux-ci seront couverts à la fois par les budgets alloués à la mise en œuvre de la Stratégie wallonne de déploiement de l’économie circulaire dont j’ai la charge, mais aussi dans le cadre de l’Alliance Emploi-Environnement rénovation qui dépend de mon collègue Philippe Henry comme cela a été annoncé dans la DPR.

    En ce qui concerne les incitants dans les marchés publics pour la prise en compte des facteurs qualitatif et durable plutôt que le facteur « prix » uniquement, plusieurs outils et incitants ont commencé à être développés ces dernières années :

    - En 2019, le Gouvernement wallon a décidé avec les régions flamande et de Bruxelles-Capitale, de tester dans une série de projets pilotes un outil intitulé « Échelle de performance CO2 » qui existe aux Pays-Bas depuis 2009, et qui vise à encourager les entreprises du secteur de la construction à réduire leurs émissions de CO2 grâce aux chantiers publics. Concrètement, un avantage est octroyé au niveau des critères d’attribution aux entreprises qui prennent les engagements les plus ambitieux en matière de réduction des émissions de CO2 lors de l’attribution d’un marché. La Wallonie devrait lancer 10 marchés de travaux supérieurs au (ou proche du) seuil de publicité européenne de 5 548 000 euros, entre 2019 et 2022. Les premiers marchés ayant recours à cette échelle de performance CO2 sont en train d’être passés. Mes collègues du Gouvernement impliqués dans ce projet que sont Madame De Bue, Monsieur Henry et Madame Tellier, pourront certainement tenir l’honorable membre au courant des avancées de cet outil.

    - Je voudrais aussi citer le décret adopté par le Parlement le 2 mai 2019, modifiant diverses dispositions relatives à l’intégration de clauses environnementales, sociales et éthiques dans le cadre de certains marchés publics subsidiés par la Wallonie. Ce décret vise à conditionner l’octroi de subsides pour certains marchés de travaux à l’insertion de clauses environnementales, sociales et éthiques. Ma collègue Valérie De Bue travaille sur l’AGW qui permettra prochainement de mettre en œuvre ce décret et d’encourager la prise en compte de critères durables dans les marchés publics.

    - Enfin, en ce qui me concerne directement, j’ai lancé en novembre 2019 le « Green Deal » achats circulaires. Les organisations qui se sont engagées dans ce « Green Deal » à modifier plusieurs de leurs achats pour les rendre circulaires pourront bénéficier de conseils et du réseau d’apprentissage qui sont en train d’être mis en œuvre par l’administration. L’échange d’expériences et le partage des bonnes pratiques seront encouragés, et j’espère que ce réseau permettra à de nombreux pouvoirs publics de rendre leurs marchés publics plus circulaires.

    En ce qui concerne une réforme au niveau législatif pour favoriser l’écoconstruction, des évolutions sont en effet à prévoir.

    Au niveau européen, la facilitation du réemploi des matériaux de construction au travers de la démolition sélective sera encouragée dans le cadre de la transposition dans le droit wallon de la Directive CE 2018/851 modifiant la directive 2008/98 / CE relative aux déchets.

    Au niveau wallon, le Plan wallon des Déchets-Ressources qui dépend de ma collègue, Madame Céline Tellier, reprend clairement des objectifs d’économie circulaire pour les matériaux de construction et présente de nombreuses actions notamment dans le cahier 2 « Prévention » (§5.6. ; §6) : développer des partenariats en pouvoirs locaux, entreprises d’économie sociale, centres de recherche et d’innovation, fédérations sectorielles, et cetera, et soutenir le développement de la filière de la réutilisation des déchets de construction (action 44).

    Au travers de ces réponses, l’honorable membre peut constater que des outils existent déjà, mais qu’ils demandent à être davantage coordonnés, renforcés et amplifiés pour répondre aux enjeux majeurs actuels. Au travers de la Stratégie wallonne de déploiement de l’économie circulaire, je compte amplifier les initiatives existantes et développer des actions allant dans le sens de l’économie circulaire, du développement des circuits courts, de la création de nouvelles filières dans le secteur.

    Finalement, plusieurs de mes autres collègues du Gouvernement sont aussi largement impliqués dans cette politique qui est transversale et concerne plusieurs compétences ministérielles.