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L'assujettissement des intercommunales aux taxes communales et au précompte immobilier

  • Session : 2019-2020
  • Année : 2020
  • N° : 229 (2019-2020) 1

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  • Question écrite du 02/07/2020
    • de DEMEUSE Rodrigue
    • à DERMAGNE Pierre-Yves, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Les intercommunales ont longtemps été exemptes de toute taxation.

    Mais depuis lors, le champ d'activités des intercommunales s'est élargi et elles sont parfois mises en concurrence avec des entreprises privées.

    Aussi, le législateur a-t-il récemment reconsidéré cette exemption de principe.
    Sur cette base, la Cour constitutionnelle a conclu, dans un arrêt du 1er juin 2017, que « la nécessité d'une exception générale à la compétence fiscale des communes en ce qui concerne les intercommunales qui se livrent à des activités commerciales en concurrence directe avec le secteur privé n'est plus démontrée ». Dès lors, l'article 26 de la loi du 22 décembre 1986 ne peut plus être interprété comme excluant toute forme d'imposition des intercommunales.
    Désormais, les intercommunales ne peuvent dès lors plus être considérées comme exemptées d'office des taxes communales.

    Le même raisonnement vaudrait pour le précompte immobilier, dès lors que les biens des intercommunales ne sont plus d'office considérés comme appartenant au domaine national, s'ils sont affectés à des activités commerciales en concurrence directe avec le secteur privé.

    Comment l'arrêt de la Cour constitutionnelle est-il mis en œuvre au niveau local ?

    Les communes appliquent-elles leurs taxes communales aux intercommunales ?

    Comment distinguer concrètement, parmi l'ensemble des activités de ces dernières, lesquelles sont concurrentielles et donc soumises aux taxes communales et au précompte immobilier ?

    Les communes doivent-elles prendre des initiatives en ce sens ? Le cas échéant, quel soutien peuvent-elles recevoir pour mettre en œuvre cette jurisprudence et établir un relevé des activités imposables dans le chef des intercommunales ?

    En ce qui concerne spécifiquement le précompte immobilier, des démarches ont-elles été entreprises envers le Fédéral pour déterminer quels étaient les biens soumis à taxation ?
  • Réponse du 06/07/2020
    • de DERMAGNE Pierre-Yves
    L’article 26 de la loi du 22 décembre 1986 relative aux intercommunales prévoit une « exemption de toutes contributions au profit de l’État ainsi que de toutes impositions établies par les provinces, les communes ou toute autre personne de droit public ».

    Dans l’arrêt du 1er juin 2017 invoqué par monsieur le député, la Cour constitutionnelle a dit pour droit que l’article 26 de la loi du 22 décembre 1986 étant interprété comme excluant toute forme d’imposition des intercommunales lorsqu’elle porte sur des activités commerciales en concurrence directe avec le secteur privé, viole les principes d’égalité et non-discrimination.

    Comme le rappelle la Cour dans cet arrêt, cette disposition trouve sa source dans l’article 13 de la loi du 18 août 1907 relative aux associations de communes et de particuliers pour l’établissement de services de distribution d’eau.

    Il ressort des travaux préparatoires de cette loi que le législateur de l’époque souhaitait ainsi exempter les intercommunales de contributions auxquelles n’étaient pas soumises les communes.

    Cette situation préférentielle s’expliquait par le fait que les intercommunales exerçaient des activités qui se rapportaient à la réalisation d’objectifs d’intérêt communal et qu’il était dès lors légitime de les soumettre au même régime fiscal que les communes.

    Cependant, en 2015, le législateur a décidé de mettre fin à l’exemption d’office des intercommunales à l’impôt des sociétés. Ce changement de position du législateur fédéral s’explique par le fait que l’exemption automatique des structures intercommunales à l’Isoc a pu créer, dans le passé, des distorsions de concurrence avec le secteur privé.

    Désormais, seules les intercommunales qui ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif bénéficient de ce régime fiscal plus favorable.

    Par conséquent, il ressort de cette jurisprudence et de ce revirement de position du législateur que le critère adéquat pour déterminer si une intercommunale est ou non soumise aux taxes communales est de déterminer si les opérations exercées par celle-ci poursuivent ou non un caractère lucratif.

    Concernant le précompte immobilier, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 25 janvier 2019, les biens des intercommunales n’en sont exonérés que si ceux-ci répondent aux conditions posées par l’article 253, 3°, du Code des impôts sur les revenus 1992.

    Les biens doivent avoir le caractère de domaines nationaux, être improductifs par eux-mêmes et être affectés à un service public ou d’intérêt général. Dans une affaire récente, la Cour constitutionnelle a jugé que cette limitation n’est pas discriminatoire compte tenu de l’objectif purement fiscal du précompte immobilier et que le financement des biens exonérés est précisément assuré par le produit de l’impôt.

    Je n’ai reçu aucune demande d’information des communes ni aucune plainte d’intercommunale relative à la question de l’application par les communes wallonnes de cette nouvelle position de la Cour constitutionnelle.

    Par ailleurs, je rappelle à l’honorable membre que la législation ne m’a conféré aucun pouvoir au niveau du contentieux fiscal et que je ne pourrais donc pas intervenir directement dans un contentieux.

    Je ne peux donc lui confirmer que celle-ci est bien suivie par les communes.

    Mon administration, lors de l’instruction d’un dossier qui lui est soumis dans le cadre de la tutelle, veille cependant à ce que les règlements fiscaux ne prévoient plus une exemption sans limites en faveur des intercommunales. Je lui rappelle également que si les communes wallonnes refusent d’appliquer cette jurisprudence, elles verront très certainement les impositions établies à tort annulées par les cours et tribunaux.

    Enfin, pour répondre à la dernière question, je n’ai pas connaissance de démarches spécifiques entreprises envers le Fédéral pour déterminer quels étaient les biens des intercommunales qui sont soumis au précompte immobilier. Néanmoins, cette question relève davantage du Ministre des Finances et du Budget qui travaille à la reprise effective du précompte immobilier par la Région dès l’an prochain.