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La diminution du nombre d'agriculteurs

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 32 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 22/09/2020
    • de GAHOUCHI Latifa
    • à BORSUS Willy, Ministre de l'Economie, du Commerce extérieur, de la Recherche et de l'Innovation, du Numérique, de l'Aménagement du territoire, de l'Agriculture, de l'IFAPME et des Centres de compétences
    Un article de presse relate qu'entre 1980 et 2019, le secteur agricole a perdu 68 % de ses exploitations.

    Monsieur le Ministre a-t-il un bilan précis de la situation ?

    A-t-il pu identifier la ou les causes de cette perte inquiétante des fermes ?

    Quelles sont les mesures qu'il envisage pour répondre à cette problématique ?
  • Réponse du 12/10/2020
    • de BORSUS Willy
    Le constat évoqué dans la presse est hélas correct. Le nombre d’exploitations a bien diminué de 68 % depuis 1980. Ce phénomène s’explique par différents paramètres.

    L’agriculture wallonne s’est d’abord spécialisée au cours du temps. En effet, la proportion d’exploitations spécialisées (lait, viande ou lait et viande) est passée de 66 % en 1990 à 78 % en 2016. Le phénomène est d’autant plus marqué en grandes cultures où cette proportion est passée de 13 % à 31 % tandis que, dans les spéculations bovines, elle est passée de 53 % à 47 %.

    De plus, on constate également un vieillissement de la population active agricole, avec des difficultés de reprise des exploitations. En 1990, 23 % des chefs d’exploitations étaient âgés de moins de 40 ans, un quart de siècle plus tard, ils ne sont plus que 12 %. Et seuls 21 % des exploitants de plus de 50 ans déclarent avoir un successeur présumé. Durant la dernière décennie où le taux de remplacement agricole a été calculé, il était en moyenne de 0.35, c’est-à-dire que seulement une ferme sur trois a fait l’objet d’une reprise par un successeur.

    L’augmentation du capital engagé par l’exploitant et le bailleur dans l’exploitation, ainsi que la diminution du revenu dégagé par son activité sont des facteurs déterminants également. Le capital engagé, en 2018, par exploitation s’élève en moyenne à 1 378 000 euros, soit une progression de près de 78 % depuis 1990. En revanche, le revenu du travail dégagé par l’exploitation wallonne moyenne a diminué de 25 % sur la même période. Vu l’évolution des structures et notamment de la superficie moyenne (SAU) de l’exploitation wallonne au cours de la période, le revenu du travail par hectare de SAU, a régressé de pratiquement 50 % en un quart de siècle passant d’environ 804 euros en 1990 à 401 euros en 2018.

    L’augmentation de la production du travail agricole peut être considérée comme un facteur non négligeable. Historiquement, ce phénomène a été induit par les progrès dans divers domaines : engrais, sélection des plantes et des animaux, mécanisation, et cetera. Pour une même production, la main-d’œuvre nécessaire pour produire a donc diminué. Ensuite, la rémunération permise par le secteur agricole (augmentation des investissements, diminution de la demande, et cetera) est rentrée en compétition avec l’opportunité de trouver du travail dans d’autres secteurs, pour une meilleure rémunération. Cela a provoqué une régression très marquée de la main-d’œuvre agricole.

    Aujourd’hui, on remarque que l’installation de nouveaux agriculteurs diminue. En élevage en particulier, la reprise d’une exploitation nécessite une importante organisation du travail, un travail d’astreinte quotidien tous les jours de l’année. De ce fait, le métier est plus contraignant et moins de jeunes ont envie de s’y consacrer.

    La situation économique, les diverses crises qu’a connues le secteur sont autant de facteurs qui peuvent expliquer une absence de reprise de certaines fermes.

    À l’aune de ce qui précède, on perçoit que le renouvellement des générations en agriculture constitue un épineux problème. C’est la raison pour laquelle, par le biais des 1er et 2e piliers de la PAC, une batterie de mesures favorisant les jeunes a été instaurée dans le cadre de la programmation 2014-2020, comme l’attribution prioritaire des droits au paiement de base aux jeunes agriculteurs et aux agriculteurs qui commencent à exercer une activité agricole.

    En ce qui concerne le 2e pilier de la PAC, une aide à l’installation de 70 000 euros est octroyée, soit le maximum autorisé par la Commission européenne. En outre, il est permis à plusieurs jeunes de bénéficier de l’aide à l’installation pour une même exploitation. Enfin, des critères d’éligibilité assouplis résidant notamment dans l’abaissement du seuil de taille économique sont appliqués dans le cas de ventes directes afin de permettre l’installation d’exploitations de plus petite taille. Quant aux aides à l’investissement, une priorité est également mise sur les jeunes de moins de 40 ans, par le biais de critères de sélection qui leur sont favorables et d’une bonification des aides.

    De plus, il est nécessaire de réintégrer plus largement les exploitations agricoles wallonnes dans une approche systémique et d’économie circulaire, diminuant ainsi la dépendance aux facteurs extérieurs (intrants) et se réappropriant la valorisation des produits. Les relations avec les consommateurs qui les entourent doivent être renforcées afin qu’à nouveau un lien fort se tisse basé sur la connaissance, la confiance et la qualité des produits agricoles. Selon les résultats d’une enquête menée par l’APAQ-W en 2018 au sein de la population belge, il apparaît que l’image des agriculteurs est positive et qu’ils sont considérés comme des travailleurs courageux faisant bien leur travail dans des conditions difficiles.