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Les bonus dans les intercommunales

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 32 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 30/09/2020
    • de BIERIN Olivier
    • à DERMAGNE Pierre-Yves, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    Le 16 septembre, le CA d'Enodia a proposé à ses administrateurs de se pencher sur la question des avantages extra-légaux pour les cadres de la société et de ses filiales.

    Certains administrateurs se sont abstenus, car s'ils reconnaissent l'intérêt d'objectiver l'octroi de ces avantages et de ne plus les attribuer à la tête du client, ils veulent vérifier que le nouveau système ne coûtera pas plus cher que l'ancien.

    Pour ma part, si ce qui est sur la table semble légal et relève de la compétence du conseil d'administration, j'ai pourtant été interpellé par la possibilité d'octroyer des bonus aux dirigeants d'une intercommunale. Il s'agirait ici d'octroyer entre 8 et 20 % de primes à la productivité.

    Je voulais interroger Monsieur le Ministre, non pas sur la légalité du procédé, qui est encadrée par le Code de la démocratie locale, mais sur son opportunité et son analyse politique de celui-ci. Est-il pertinent d'octroyer des bonus au sein d'une structure chargée de remplir une mission d'intérêt public ? Une logique de bonus, a fortiori annuels, ne risque-t-elle pas de pousser ces dirigeants à viser une rentabilité financière à court terme, une maximisation des dividendes le cas échéant, plutôt qu'à défendre l'intérêt général et à élaborer une stratégie de long terme ? Le cas échéant, pourquoi limiter un tel système aux dirigeants et ne pas prévoir de récompenser l'ensemble du personnel ?

    Par ailleurs, Monsieur le Ministre peut-il nous indiquer dans quelles intercommunales ce système de bonus, de primes à la productivité, est-il en place ? A-t-il déjà été évalué ?
  • Réponse du 01/10/2020
    • de DERMAGNE Pierre-Yves
    L’examen de l’octroi d’un bonus aux dirigeants d’Enodia doit s’effectuer dans le cadre de l’exercice de la tutelle spéciale d’approbation. Un tel octroi doit, en effet, être traduit, de manière objective, dans les « dispositions générales en matière de personnel », s’agissant d’un élément du statut pécuniaire, qui doit faire l’objet d’une négociation préalable avec les organisations syndicales représentatives, conformément au statut syndical.

    Dès lors, dans la mesure où, en ma qualité d’autorité de tutelle, je suis potentiellement amené à examiner la légalité et la conformité à l’intérêt général d’une telle décision, je ne puis, à ce stade, me prononcer sur l’opportunité d’octroyer une prime à la productivité aux dirigeants d’Enodia, avant d’avoir pris connaissance du dossier. Dossier qui, à ce jour, n’a pas encore été reçu par mes services.

    Si l’on se base sur ce que dis le Code de la démocratie locale, on retrouve cette possibilité d’une rémunération variable éventuelle limitée à vingt pour cent de la rémunération brute annuelle totale, en son annexe 4 qui fixe les conditions et plafonds de rémunération des fonctionnaires dirigeants locaux.
    Ce montant annuel brut total de la rémunération variable est pris en compte dans le calcul du plafond de rémunération visé dans l’annexe 4.

    Par ailleurs, il y est prévu que la rémunération variable est déterminée en fonction d'objectifs mesurables, de nature financière ou autre, fixés au moins six mois à l'avance.

    Le CDLD ne traitant que des rémunérations des fonctionnaires dirigeants, sans viser les dispositions applicables aux fonctions de direction, tout laisse à penser qu’une application de ce principe à des cadres consiste en une extension de la politique rémunératoire applicable au fonctionnaire dirigeant.

    Pour rappel, cette annexe 4 a été insérée dans le CDLD par le décret dit « gouvernance » adopté par le Parlement sous la précédente législature, sur la proposition de la majorité MR-cdH.

    Cela étant, de manière générale, je peux convenir avec l’honorable membre que la question de l’octroi de primes diverses et variées ne manque pas d’interpeller. En effet, à mon sens, l’échelle barémique octroyée à un agent est censée tenir compte du degré de responsabilité afférente à la fonction exercée et donc couvrir l’ensemble des responsabilités liées à celle-ci.

    L’article L1523-27, §2, du CDLD indique d’ailleurs que : « Le régime pécuniaire et les échelles de traitement sont fixés notamment selon l’importance des attributions, le degré de responsabilité et les aptitudes professionnelles requises, compte tenu notamment de la place occupée par les agents dans l’organigramme de l’intercommunale ».

    Or, par le biais de primes, je constate qu’il s’agit bien souvent, en réalité, de revaloriser pécuniairement un agent, une prime présentant un caractère moins pérenne qu’une échelle barémique. Les primes liées à la productivité en particulier s’apparentent à des pratiques du secteur privé. Le modèle semble donc devoir être reconsidéré en fonction des réalités du terrain.

    Comme l’honorable membre le sait, la Déclaration de politique régionale prévoit de travailler sur les rémunérations des fonctions de direction dans les intercommunales. Je pense, moi aussi, que c’est une nécessité.

    En effet, nombreuses sont les intercommunales et les associations dites chapitre xii qui estiment, aujourd’hui, ne pas être concurrentielles sur le marché de l’emploi, si elles doivent demeurer dans le cadre des principes généraux de la fonction publique locale.

    Si la réforme de la gouvernance adoptée en 2018 a eu le mérite d’instaurer plus de transparence dans la fixation des rémunérations au personnel des intercommunales et a ainsi mis fin à une certaine opacité des négociations salariales du personnel d’encadrement, il faut maintenant s’attaquer à plus de transparence et d’objectivation dans les échelles de traitement, mais en tenant compte des réalités salariales d’aujourd’hui.

    Ce faisant, au même titre qu’il faut tenir compte des secteurs d’activité dans lesquels évoluent nos structures supra-locales, il nous faudra aussi considérer les capacités financières de nos pouvoirs locaux qui, comme l’honorable membre le sait, ne sont ni florissantes ni semblables d’une institution à l’autre.

    À ce jour, il n’existe pas de recensement des primes octroyées aux agents des intercommunales, mais ce travail sera réalisé à l’occasion des travaux que je viens d’évoquer.