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Le enjeux du futur Plan wallon des déchets.

  • Session : 2005-2006
  • Année : 2006
  • N° : 120 (2005-2006) 1

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  • Question écrite du 31/03/2006
    • de BORSUS Willy
    • à LUTGEN Benoit, Ministre de l'Agriculture, de la Ruralité, de l'Environnement et du Tourisme

    Le Tableau de bord de l'environnement a montré que, depuis quelques années, la situation de la Région wallonne en matière de déchets s'est fortement améliorée.

    De nombreux objectifs, pourtant ambitieux, que la Région wallonne s'était fixés sont atteints, voire dépassés. L'effort vient bien-sûr du citoyen, mais aussi du monde de l'entreprise et des industries. Le TBE 2005 souligne à cet effet : « Depuis 2003, les quantités de déchets industriels générés sont tombées sous leur niveau de 1995 ».

    En matière de traitement des déchets, la seule méthode efficace repose sur une hiérarchisation des priorités politiques qui se basent sur la « pyramide » des déchets, à savoir : prévention, valorisation matiière, valorisation énergétique, incinération et mise en déharge. La taxation des déchets devrait idéalement suivre ce même schéma, mais en tenant compte de la situation existante quant aux infrastructures et à la localisation des outils.

    Nous le savons, Monsieur le Ministre annonce depuis un petit moment un re-lifting du Plan wallon de déchets. On nous annonce à court terme une note d'orientation, un plan d'équipement, un décret-taxe et la refonte du « décret déchets ».

    Monsieur le Ministre a soutenu que, dans le plan d'investissement des infrastructures qui sera bientôt présenté, des sommes importantes seraiaent consacrées à la modernisation et à l'extension de capacités des incinérateurs, voire à la construction de nouveaux outils.

    Il est vrai que l'arrêté de 2004 interdisant la mise en CET de certains déchets prévoit que tout une série de flux de déchets ne pourront bientôt plus aboutir dans les décharges tels les déchets recyclables, les déchets ménagers bruts et les encombrants ménagers non broyés en 2008 et les déchets organiques en 2001.

    Ceci amène mes premières questions : dans la mesure où les installations d'incinération actuellement opérationnelles en Région wallonne montrent une capacité de traitement suffisante, est-il opportun de prévoir de nouveaux outils qui vont peut-être tourner à vide tout en coûtant très cher au contribuable wallon ? Ces capacités ont-elles fait l'objet d'une étude sérieuse, notamment en termes de coût-avantage ? Quel sera le budget consacré aux outils d'incinération ?

    Par ailleurs, quel sera le type de taxation appliqué aux déchets destinés à ces outils ? Une étude réalisée par le CWEP, une association européenne d'entreprises privées et publiques de

    traitement de déchets, montre que très peu de pays européens taxent l'incinération. Ne risque-t-on pas, dès lors, de créer en plus du surcoût qu'il en résultera pour le citoyen, une charge supplémentaire à nos entreprises et industries ? Notons que ceci serait contradictoire avec l'esprit développé dans le Plan Marshall.

    Il se pose aussi la question de l'entrée en application de cette nouvelle taxation. Quand est-il prévu que celle-ci soit opérationnelle : déjà en 2006 ? Existe-t-il un calendrier ? Des projections ont-elles été établies quant aux rendements de ces nouvelles taxes ?

    Second point : il apparaît que le Plan de Monsieur le Ministre viserait uniquement le financement d'outils publics et intercommunaux alors que des programmes d'investissement existent visiblement dans les cartons de sociétés privées. Ne serait-il pas opportun, en s'inspirant toujours des bonnes résolutions émises avec le Plan Marshall, de favoriser aussi l'investissement privé et l'initiative privée dans ce secteur ?

    Un des enjeux majeurs de ce nouveau Plan et de la réorganisation du secteur des déchets qui devrait s'en suivre, est bien évidemment le coût pour le citoyen. Si la nouvelle taxation des déchets ménagers venait à s'appliquer dès 2006, il en résulterait d'importantes difficultés pratiques quant à l'enrôlement et la perception. On nous annonce aussi que l'application du coût-vérité est reportée de plusieurs années. Qu'en sera-t-il pendant cette période « transitoire » ? Les différentes intercommunales, et en conséquence les communes associées, seront-elles sur un même pied d'égalité, indépendamment des outils qu'elles possèdent ?

    Enfin, je me permets de poser la question sur le rapport entre les objectifs à atteindre et les moyens nécessaires. Dans la mesure où les objectifs n'ont pas fondamentalement évolué depuis 2003, date à laquelle les exigences européennes étaient connues, et que, depuis, nous avons pu constater, comme rappelé dans mon introduction, une stabilisation, voire une baisse de la masse de déchets produits, qu'est-ce qui justifie que le Plan en 2003 prévoyait 300 millions d'euros d'investissement et qu'aujourd'hui , il s'agit de près de 600 millions d'euros ? Quelles modifications substantielles provoque cette inflation de coût ? Le traitement et la prévention ont-ils connu des frais que nous ignorions ? Les objectifs du Plan sont-ils fondamentalement différents ? Si oui, en quels points ?
  • Réponse du 03/05/2006
    • de LUTGEN Benoît

    Le Gouvernement wallon a adopté, le 30 mars dernier, les principes directeurs de la politique wallonne de prévention et de gestion des déchets.

    Il est vrai que le citoyen wallon est un bon trieur, et donc un bon recycleur,. Cependant, si nous restons les bras croisés et que nous ne nous donnons pas de moyens suffisants, notamment en termes de financement, il nous sera impossible de rester dans le peloton de tête.

    De surcroît, il faut admettre que la Région wallonne est encore extrêmement tributaire de ses décharges, puisque 44 % de nos déchets y échouent. Des changements doivent donc être opérés et le Gouvernement wallon doit agir comme moteur.

    A cet égard, je remercie l'ensemble de mes Collègues du Gouvernement qui ont collaboré à la mise sur pied de cette politique.

    La politique de la Région wallonne se base sur le principe essentiel de la prévention. Cette politique prend notamment en compte le dispositif du coût vérité et la politique de cohésion sociale.

    Nous veillerons à la stricte application du principe du pollueur-payeur. Il est, en outre, prévu de

    développer des partenariats, que ce soit entre des acteurs publics ou entre acteurs publics et acteurs privés. Une hiérarchie entre les différents modes de traitement sera établie afin de favoriser les techniques parallèles à la mise en centres d'enfouissement technique.

    Une telle politique nécessite un financement important. Il ne faut pas que ces mesures restent de simples intentions, mais qu'elles soient véritablement appliquées sur le terrain.

    Ce nouveau plan prévoit toute une série de délais qui me sont imposés. J'en suis fort aise !

    En dix-huit mois, grâce à l'action de l'ensemble du Gouvernement wallon, nous avons abouti à un accord global que le Gouvernement précédent n'avait pas su réaliser. Si le Ministre Foret avait, lui aussi, respecté le calendrier qui lui était imposé, je n'aurais pas eu à faire le travail, mais simplement à l'exécuter.

    A cet égard, je désire saluer le dynamisme de l'ensemble des acteurs qui ont encouru à la mise sur pied de ce plan et, notamment, le monde associatif. De nombreuses concertations et réunions ont pu avoir lieu et ont permis de dégager des mesures intéressantes.

    La politique des déchets s'inscrit dans la droite ligne du Contrat d'Avenir et des directives européennes. La priorité va à la prévention, puisque le Gouvernement wallon a prévu de nombreuses campagnes de sensibilisation ainsi que de multiples actions de coordination.

    Ces actions concrètes seront aussi accompagnées d'incitants financiers et, notamment, fiscaux. Je tiens à souligner que le budget a été revu à la hausse et que le Gouvernement a prévu des aides complémentaires à destination des entreprises, que ce soit pour les investissements ou pour la recherche.

    Nous prônons également une diminution de la pression fiscale. De plus, une cellule de conseillers en environnement sera mise à la disposition des entreprises qui en manifesteront le souhait.

    Différents dispositifs seront mis en place avec pour objectif de faire peser une pression supplémentaire sur les citoyens en vue de diminuer la production des déchets ménagers. Une responsabilité accrue des entreprises est ainsi prévue.

    Un autre grand principe de cette politique est d'établir une hiérarchie entre les différents modes de traitement.

    Face à ces multiples défis, les pouvoirs publics ont une véritable responsabilité, notamment au niveau de la rationalisation des outils existants. Nous devrons notamment agir au niveau des parcs à conteneurs et des installations de biométhanisation. Pour ce faire, des moyens multiples seront prévus, que ce soit au niveau juridique, financier ou humain.

    La taxation sera aussi mise au service d'objectifs environnementaux. Par exemple, les déchets dangereux seront soumis à des taxes plus élevées.

    Le Gouvernement a décidé de joindre les actes à la parole. Nous avons ainsi prévu de nouvelles mesures en matière de compostage et de biométhanisation.

    Par ailleurs, ma priorité va au compostage à domicile. L'honorable Membre stipule dans sa question qu'il est inquiet de la nouvelle charge qui va s'appesantir sur le citoyen, alors que celle-ci ne sera que de trois, puis de six euros dans les années à venir.

    En fait, ce qui touche le citoyen dans ses finances, c'est le coût de la collecte des déchets et la réparation des dommages à l'environnement. De plus, il a également été rudement mis à contribution lorsqu'il a fallu travailler sur les décharges, sans oublier que deux à quatre milliards d'euros devront être dévolus à l'assainissement des sols pollués.

    La note de juillet 2003 concernant l'incinération faisait état d'une capacité d'un million de tonnes. Or, le plan mis en place diminue cette capacité à 100.000 tonnes.

    Le projet d'un incinérateur à Mons, d'une capacité de 300.000 tonnes, aurait été totalement démesuré. La capacité sera donc réduite de moitié et les accords finalisés vont dans ce sens.

    C'est donc là une politique volontariste et je me réjouis que les capacités prônées par le Ministre Foret n'aient pas été installées, car c'est là qu'il y avait surcharge.

    Le coût vérité entre 2008 et 2013 sera de minimum 70 % pour les communes.

    En imposant la transparence dans les coûts, les communes seront plus proches d'un coût en rapport avec leurs particularités et elles pourront comparer celui-ci. Ce coût vérité devrait porter à l'émulation et la performance. Ce principe pourrait également être appliqué aux intercommunales. Le passage au coût vérité sera progressif et l'impact de la taxe sera très limité. Ces mesures n'en sont pas moins nécessaires. Par exemple à Mont-Saint-Guibert, il n'y a pas de taxe relative aux immondices, ni d'encouragement au tri des déchets. Inversement, à Gembloux, ce sont cent trente-trois kilogrammes de déchets par an et par personne qui sont relevés.

    Concernant les partenaires, les opérateurs publics et privés ont été favorisés. Un ensemble de dispositions seront inscrites dans le décret avec une priorité aux déchets ménagers et une subvention accrue. Il y aura également une nouvelle aide aux infrastructures et les opérateurs publics ne pourront plus, sauf exception, gérer les déchets industriels.

    Le financement politique des déchets est différent des moyens décidés précédemment. Ces nouveaux moyens mis à disposition par le Gouvernement permettront :

    - le soutien à l'extension et à la création de parcs à conteneurs : trente-sept millions d'euros seront investis dans le but de favoriser le civisme et la participation ;
    - l'installation de la biométhanisation ;
    - la réhabilitation de fours ;
    - …

    Je reviendrai sur l'ensemble de ces investissements de manière bien plus détaillée en Commission.

    En conclusion, ce projet réaffirme la volonté du Gouvernement de participer à un plan d'investissement. La taxe n'a pas un objectif budgétaire, mais environnemental. Son but n'est pas d'obtenir une recette, mais de permettre aux opérateurs de changer de comportement.

    La taxation est avant tout dissuasive puisqu'il s'agit d'opérer un changement de comportement.

    Pour terminer, la décision du Gouvernement s'inscrit dans la logique d'un développement durable :

    - de protection de l'environnement ;
    - d'équité sociale, en tenant compte de réalités ;
    - de développement économique avec la création de plusieurs centaines d'emplois.