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Les affaires classées sans suite en matière d'urbanisme.

  • Session : 2005-2006
  • Année : 2006
  • N° : 150 (2005-2006) 1

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  • Question écrite du 03/04/2006
    • de STOFFELS Edmund
    • à ANTOINE André, Ministre du Logement, des Transports et du Développement territorial

    On se souvient encore des propos musclés de Monsieur le Ministre à l'égard des infractions en matière d'urbanisme. Dans une réponse à une question parlementaire, la Ministre fédérale de la Justice informe qu'entre le 1er janvier 2003 et le 30 juin 2005, 8.721 affaires d'urbanisme ont été classées sans suite, soite 48,2 % du total (cfr. Question n° 786 de la Chambre).

    Le classement sans suite est souvent motivé pour des raisons techniques, d'une part, et pour des raisons d'opportunité, d'autre part. Parmi les raisons d'opportunité, on constate souvent l'existence d'un permis de régularisation, corrigeant l'infraction et faisant rentrer les choses dans l'ordre

    327 affaires ont été convoquées devant le tribunal correctionnel, soit 1,81 % du total. Dans 432 cas, une amende administrative a dû être versée par le contrevenant.

    Les données vont probablement encore changer. Elles reflètent la situation à un certain moment dans une procédure généralement très longue. La durée s'explique aussi par le fait que si dans une situation litigieuse, le demandeur engage une procédure administrative (p. ex. demande de permis de régularisation) le Parquet doit attendre le résultat avant de pouvoir statuer définitivement.

    Quelles sont les statistiques de la Direction provinciale de la DGATLP ? Quel sera le suivi que Monsieur le Ministre compte réserver aux annonces d'une politique répressive à l'égard des infractions ? Pouvons-nous constater clairement une infraction tant que le certificat de conformité, prévu dans le CWATUP, n'est pas encore transposé dans les actes administratifs ?

  • Réponse du 22/05/2006
    • de ANTOINE André

    Dans son propos introductif, l'honorable Membre évoque la réponse de Mme Laurette Onkelinx, Vice-Première Ministre et Ministre de la Justice, à la question parlementaire n° 786 de M. le Député De Padt, pour en retenir principalement : « Entre le 1er janvier 2003 et le 30 juin 2005, 8.721 affaires d'urbanisme ont été classées sans suite, soit 48,2 % du total. ».

    l est vain de se focaliser sur cette information. Ce pourcentage n'a manifestement rien de définitif.

    A la lecture de la réponse de Mme Onkelinx, je constate que les données chiffrées sont bien extraites d'un tableau, mais assorties de diverses considérations, notamment :

    « Le tableau 2 donne par année d'entrée un aperçu de l'état d'avancement que connaissait chacune des affaire du tableau 1 au moment de l'extraction de donnée,s soit le 10 juillet 2005.

    Il ne s'agit donc pas du « nombre de décisions de classement sans suite » (…) étant donné que ces décisions ont souvent trait à des affaires entrées avant le 1er janvier 2003. Le tableau 2 se limite aux états d'avancement des affaires « urbanisme » entrées entre le 1er janvier 2003 et le 30 juin 2005 (et encodés au 10 juillet 2005). Cette présentation permet d'avoir un perçu du nombre d'affaires classées sans suite ou renvoyées devant le tribunal au sein de ce groupe de dossiers.

    Le tableau 2 montre que tout bien compté, 8.721 affaires d'urbanisme entrées entre le 1er janvier 2003 et le 30 juin 2005 étaient classées sans suite au 10 juillet 2005, il s'agit là de 48,2 % du total. ».

    Plus importants me paraissent les motifs du classement sans suite :

    - situation régularisée : 34,15 % ;
    - répercussion sociale limitée 6,30 % ;
    - préjudice peu important 2,22 % ;
    - conséquence disproportionnée - trouble social 2,47 % ;
    - …

    Aussi, les données du tableau 4 de la réponse précitée doivent être examinées en combinaison avec les statistiques régionales figurant ci-après.

    En outre, l'honorable Membre a lu que le dénombrement des affaires repose sur un système de codage enregistré par chaque Parquet.

    A cet égard, je souhaite éclaircir certains points avec les Procureurs généraux.

    En effet, l'élaboration de statistiques exige des choix, notamment quant à l'utilisation de concepts tels que celui d' « affaires », quant aux méthodes d'enregistrement , … Le site Internet auquel renvoie Mme Onkelinx (http://www.just.fgov.be/statistiqueparquet) dans sa réponse à M. De Padt contient de nombreuses précisions indispensables à la bonne compréhension des chiffres diffusés par le collège des Procureurs généraux.

    Autrement dit, l'examen des données fédérales est plus complexe qu'il n'y paraît.

    Cela étant, pour répondre aussi précisément que possible à la première question de l'honorable Membre, les statistiques des directions extérieures portent, d'une part, sur des données encodées pour la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2005 - et non sur 2 ans et demi comme dans la réponse à la question parlementaire de M. De Padt - et, d'autre part, sur d'autres données importantes permettant de rendre compte plus complètement des activités des directions extérieures en matière de poursuite des infractions.

    En ce qui concerne les statistiques de la Direction extérieure du Brabant wallon, je constate que les chiffres communiqués par le collège des Procureurs généraux ne correspondent pas à ceux de la DGATLP alors que le ressort territorial de cette direction coïncide avec celui du Parquet de Nivelles.

    Pour les années 2003 et 2004 (seules années complètes auxquelles il est fait référence), le code informatique de la prévention « urbanisme » a été donné respectivement dans 40 et 83 affaires (tableau n° 1 de la réponse parlementaire précitée). Toutefois, la Direction extérieure du Brabant wallon a communiqué au Parquet 130 dossiers en 2003 et 157 dossiers en 2004. Il y a donc des données à clarifier.

    Pour ce qui concerne les six autres directions extérieures couvrant le territoire de la Région wallonne, elles sont amenées à collaborer avec deux, voire trois Parquets différents.

    La Direction extérieure de Hainaut I, qui ne dispose manifestement pas de ressources humaines suffisantes, a obtenu 564 exécutions volontaires sur 574 procès-verbaux dressés (1995-1999)/

    Sur 111 décisions judiciaires prononcées, 89 furent exécutées volontairement (soit 80 % !) par les condamnés.

    La Direction extérieure de Hainaut II (créée en 2003) a dressé, de 2003 à 2005, 58 procès-verbaux. Quinze affaires sont toujours en cours d'instruction aux Parquets ou devant les juridictions et 41 dossiers furent classés sans suite pendant la même période.

    Avant la création de cette direction, plus de 50 % des décisions définitives ayant ordonné une mesure de réparation furent exécutées volontairement.

    La Direction de Liège I a rédigé, de 1995 à 2005, 2.892 procès-verbaux.

    Les Parquets ont décidé de classer sans suite quelque 36,5 % des dossiers qui n'avaient pas fait l'objet d'une régularisation administrative (permis, remise en état des lieux, transaction).

    L'honorable Membre notera qu'en ce qui concerne les communes germanophones, de 1996 au 27 mars 2006, sur 410 dossiers d'infraction d'urbanisme, 20 furent classés sans suite par le Parquet d'Eupen.

    Cette information ne peut être corroborée par le collège des Procureurs généraux, le Parquet d'Eupen n'utilisant pas la banque de données administratives des Parquets.

    La Direction extérieure de Liège II indique que, pour la période 2003-2005, les classements sans suite consécutifs à une régularisation administrative représentent 69 % des dossiers traités par le Parquet de Verviers et 78 % de ceux-ci au Parquet de Huy.

    Quant aux classements sans suite, justifiés par le caractère mineur de l'infraction ou encore le caractère civil du contentieux, ceux-ci sont respectivement de 25 et de 10 %.

    Encore une fois, ces pourcentages sont sensiblement différents de ceux avancés par les Parquets.

    La Direction extérieure de Namur a soumis, de 2003 à 2005, 120 procès-verbaux aux Parquets de Namur et de Dinant. Les comptages des Parquets ne correspondent pas non plus à ces données.

    Cela étant, pendant la même période, sur 17 décisions judiciaires définitives, 11 furent exécutées volontairement.

    La Direction extérieure du Luxembourg a dressé, de 2003 à 2005, 574 procès-verbaux. Sur 66 décisions judiciaires prononcées pendant la même période, 31 furent exécutées volontairement.

    De manière générale, l'honorable Membre admettra que l'action des directions extérieures est loin d'être vaine, les exécutions volontaires sont nombreuses, et ce, malgré l'absence d'exécution forcée des décisions judiciaires par la Région.

    Au-delà des chiffres, les contacts réguliers entre les Procureurs généraux, l'administration régionale et mon Cabinet qui ont eu lieu ces derniers mois, ont porté leurs fruits et ont permis de mener une réflexion globale sur la problématique des sanctions en matière d'urbanisme.

    Les Procureurs généraux se sont dits demandeurs d'une volonté politique forte afin de sensibiliser à nouveau les Parquets en vue de la poursuite des infractions urbanistiques.

    Différents constats ont été posés :

    - l'imbrication des procédures pénale et administrative ;
    - l'exécution forcée de décisions de justice par la Région est indispensable ;
    - la disparité des pratiques entre les directions extérieures et les Parquets ;
    - la collaboration des communes est indispensable ;
    - le manque de moyens humains ;
    - la nécessité d'un signal fort de la part des autorités.

    En regard de ces constats, il s'indique de mettre en chantier une réforme globale sur les infractions urbanistiques.

    C'est pourquoi, j'ai déposé au Gouvernement un avant-projet de décret relatif aux infractions et aux sanctions en matière d'urbanisme. Cet avant-projet de décret a été adopté en première lecture par le Gouvernement le 4 mai 2006.

    a) Le texte en projet vise à clarifier les rôles des Parquets et de l'administration régionale dans le traitement des dossiers d'infraction par le biais d'une dissociation plus marquée des procédures pénale et administrative. Concrètement, dès qu'un procès-verbal constatant une infraction urbanistique est dressé, un permis de régularisation devrait être déclaré irrecevable de telle manière que l'autorité administrative ne puisse interférer avec l'instruction éventuelle du dossier par le Parquet.

    Les contacts entre Parquet et administration ne doivent cependant pas être rompus. En conséquence, une meilleure communication entre les différentes instances ressort également de l'avant-projet de décret.

    b) L'exécution forcée des jugements permet d'assurer la crédibilité des règles adoptées en matière d'urbanisme. Elle est donc indispensable.

    La concrétisation de mesures de réparation (réalisation d'ouvrages ou de travaux ainsi que la remise en état des lieux) entraîne l'obligation pour la Région de se soumettre à la législation sur les marchés publics.

    En vue d'étendre la marge de manœuvre de l'administration régionale quant à cela, le Gouvernement a revu, en date du 4 mai 2006, son arrêté du 22 avril 1999 relatif aux délégations de pouvoirs spécifiques au Ministère de la Région wallonne. A l'article 62 de cet arrêté, le montant de la dépense pour lequel le Directeur général de la DGATLP a délégation de pouvoirs est de 31.000 euros. Cette limitation n'était pas adéquate. Désormais, le Directeur général est habilité à engager des dépenses de démolition et autres travaux jusqu'à un montant de 125.000 euros.

    Le Directeur général a pour mission d'exécuter de manière systématique l'ensemble des décisions de justice non exécutées. A terme, le nombre d'exécutions volontaires devrait augmenter.

    c) Une harmonisation des pratiques tant au niveau des Parquets que des différentes directions extérieures de la DGATLP est nécessaire afin d'assurer une meilleure transparence et une plus grande efficacité de la répression.

    Aussi, une réflexion est en cours avec chacun des fonctionnaires délégués et la Directrice générale de la DGATLP afin d'aboutir à une méthode commune de traitement des dossiers infractionnels.

    Les Procureurs généraux reverront, pour leur part, leur politique infractionnelle en matière d'urbanisme suite à la réforme globale engagée et veilleront particulièrement à une harmonisation des pratiques au sein des Parquets.

    d) Les communes ont une responsabilité tout aussi grande que les autorités régionales dans la gestion de leur territoire. Il est dès lors évident que les communes soient associées à la démarche.

    Un incitant financier est prévu en faveur des communes qui prendraient l'initiative de dresser procès-verbal pour constater l'infraction urbanistique.

    e) Un renforcement des moyens humains au niveau des différentes directions extérieures s'avère indispensable. En conséquence, il est prévu de désigner de nouveaux agents contrôleurs auprès de chaque direction.

    f) Un de mes soucis principaux dans le cadre de cette réforme consiste en une large concertation des différents acteurs. D'ores et déjà, le Conseil supérieur des villes et communes de la Région wallonne, la Commission régionale d'aménagement du territoire et le collège des Procureurs généraux, via la Ministre de la Justice, sont invités à présenter leurs remarques sur l'avant-projet de décret.

    Diverses autres consultations seront lancées afin que le décret soit un texte de consensus qui mette tous les acteurs en accord avec la réforme.

    Enfin, en réponse à la troisième question de l'honorable Membre, l'article 139 du CWATUP - depuis son remplacement par le décret-programme du 3 février 2005 - dispose que la déclaration, sollicitée par le titulaire du permis ou le propriétaire, certifie que les travaux sont ou non achevés dans le délai fixé et que les travaux ont été ou n'ont pas été exécutés conformément au permis.

    La déclaration certificative est indépendante et distincte des dispositions régissant les infractions en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire.