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La problématique des logements insalubres

  • Session : 2020-2021
  • Année : 2020
  • N° : 21 (2020-2021) 1

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  • Question écrite du 23/10/2020
    • de DEVIN Laurent
    • à COLLIGNON Christophe, Ministre du Logement, des Pouvoirs locaux et de la Ville
    C'est un constat : les locataires confrontés à un logement insalubre, voire un taudis, osent rarement porter plainte auprès de l'autorité compétente. Peu se risquent à saisir la justice de paix, d'autant que l'issue du combat judiciaire tourne rarement à leur avantage.

    Le plus souvent même, ce sont les propriétaires qui prennent l'initiative d'assigner les locataires en justice et quand ces derniers y sont contraints, il n'est pas rare qu'ils ne s'y présentent pas, par peur ou parce qu'ils pensent que tout est joué d'avance. Avec la conséquence que le juge donne raison au requérant en cas d'absence de l'autre partie.

    En d'autres termes, une affaire portée en justice pour un loyer impayé se terminera souvent en faveur du propriétaire, alors même qu'ils manquent eux-mêmes à leurs obligations par rapport à des logements laissant à désirer, où le constat d'insalubrité par le locataire est par ailleurs difficile à établir.

    Quels sont les leviers mis à la disposition de l'autorité pour prévenir les risques liés à la mise en location de logements insalubres ?
    De quel accompagnement les locataires les plus précaires disposent-ils dans leur parcours locatif ?
  • Réponse du 07/12/2020
    • de COLLIGNON Christophe
    Il est certain que l’étroitesse du marché locatif privé des logements « modestes » peut conduire certains propriétaires bailleurs à être assez peu « regardants » quant à la qualité des logements qu’ils proposent à la location. Il est vrai aussi que les candidats locataires à ces logements ne disposent pas toujours des outils leur permettant de faire valoir leurs droits légitimes.

    Les problèmes commencent parfois dès la prise en location : si le logement présente des défauts, même mineurs, le locataire est en droit d’exiger qu’ils soient repris dans l’état des lieux. Si le bailleur fait la promesse de mettre le logement en ordre, celle-ci doit être consignée de manière précise dans un écrit, avec une date de réalisation.

    Lors de ses permanences, mon administration constate régulièrement que les locataires confrontés à l’inexécution des travaux, et qui sont pourtant de bonne foi, n’adoptent pas toujours les bons réflexes pour tenter de contraindre le bailleur à réaliser les réparations urgentes voire juste nécessaires. Ces comportements à adopter sont :
    - inviter si possible le bailleur à venir constater sur place les travaux à réaliser ;
    - rechercher, le cas échéant, l’origine des désordres, aider éventuellement par un expert ou une entreprise spécialisée, par exemple dans le traitement de l’humidité, ce qui permet d’établir les responsabilités des parties ;
    - informer le bailleur par lettre recommandée ;
    - mettre en demeure, si nécessaire, le bailleur de réaliser les travaux.

    En pratiquant de la sorte, le locataire agit en personne prudente et raisonnable.

    Cette posture est bien entendu idéale et difficile à endosser par des personnes qui ne disposent pas d’un grand bagage socioculturel. Il est, par ailleurs, constaté qu’elles font trop rarement appel aux services d’aide juridique de première et de seconde ligne.

    Or, par exemple, le principe de l’exception d’inexécution — la retenue partielle des loyers — qui pourtant peut être une arme efficace pour contraindre le bailleur à exécuter les travaux est utilisé souvent à mauvais escient : absence de mise en demeure et d’information préalable, non-respect du principe de proportionnalité dans la retenue du loyer par rapport à la gravité du préjudice subi, etc. C’est ainsi que, parfois, les personnes se retrouvent devant le juge de paix dans une situation qui leur est extrêmement défavorable.

    De plus, il est rare que les arcanes des procédures civiles soient suffisamment maîtrisés par un usager agissant sans le conseil et l’appui d’un avocat.

    Par exemple, si le fait générateur, d’une déclaration d’interdiction d’occuper prise par le bourgmestre résulte de la responsabilité du bailleur, trop peu de locataires s’adressent au juge de paix pour réclamer des dommages et intérêts comprenant notamment les frais de déménagement.

    Les locataires disposent d’ores et déjà des mécanismes d’aide suivants :
    * Certaines associations de promotion du logement développent un accompagnement juridique et administratif des locataires se trouvant dans la situation qui nous occupe. Elles peuvent donc être sollicitées.
    * S’ils en ont la possibilité, les CPAS peuvent également développer ce type d’accompagnement. S’ils ne peuvent le faire, je leur suggère d’assurer une communication sur l’aide juridique de première et seconde ligne.
    * La Région a mis en place des permanences « logement » dans le cadre desquelles les agents régionaux répondent à toute une série de questions et peuvent aider les citoyens dans la réalisation de leurs démarches.
    * Dans une certaine mesure, les permis de location représentent également un outil important dans la lutte contre les logements insalubres, en garantissant la mise sur le marché locatif de logements en bon état.

    La lutte contre l’insalubrité des logements est une lutte de longue haleine qui nécessite la constance des efforts. D’autres pistes de réflexion pour permettre d’agir plus efficacement encore en la matière seront explorées au sein de mon cabinet avec le concours des parties prenantes dans les mois à venir.